délinquance
Question de :
M. Marc-Philippe Daubresse
Nord (4e circonscription) - Union pour la démocratie française-Alliance
Question posée en séance, et publiée le 18 novembre 1999
M. le président. La parole est à M. Marc-Philippe Daubresse.
M. Marc-Philippe Daubresse. Je voudrais revenir aux questions posées par mes collègues de l'opposition sur la crédibilité de la police et de la justice.
D'abord, pour confirmer à M. le ministre de l'intérieur que, contrairement à ce qu'il vient d'indiquer à la représentation nationale, M. Marion a déclaré clairement que les renseignements généraux avaient informé M. Yvan Colonna. Je l'invite donc à revoir sa copie ou à relire le passage du rapport de la commission d'enquête du Sénat où figure la réponse à la question de M. Charasse. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratique libéral et Indépendants.)
Ensuite, pour interpeller M. le Premier ministre à propos de la visite qu'il a effectuée dans l'Essonne, visite au cours de laquelle il a déclaré que la lutte contre les violences urbaines était une priorité d'Etat.
Monsieur le Premier ministre, on peut imaginer que vous vous adressiez de la sorte à votre ministre de l'intérieur et à votre ministre de la justice, qui ont bien du mal à coordonner leurs politiques pour atteindre l'efficacité réclamée en ce domaine par tous les Français.
Vous avez également affirmé, lors de cette visite, que la délinquance et les incivilités ne venaient pas de l'Etat mais de la société elle-même, ce qui est une manière habile de vous défausser de vos responsabilités. Car ce n'est pas la société qui est coupable de l'augmentation des délits; c'est bien l'impunité dont bénéficient les auteurs des agressions qui en est la cause première.
J'en veux pour preuve, mes chers collègues, ce fait extrêmement rare: un conseil municipal d'une ville de banlieue qui vote à l'unanimité une motion pour contester une décision de justice consistant à remettre en liberté trois jeunes convaincus d'une agression au couteau sur un mineur et formellement reconnus par la victime elle-même. Monsieur le Premier ministre, la remise en liberté de tels individus renforce, aux yeux des Français, le sentiment d'impunité laissé aux petits caïds, au désespoir, notamment, des policiers qui font leur travail.
Face à la gravité de cette situation et au manque de crédibilité des politiques en matière de police et de justice, ma question est simple. Etes-vous prêt à déposer rapidement, au nom du Gouvernement, un projet de loi qui réforme l'ordonnance d'après-guerre sur la délinquance des mineurs, qui déconcentre et décentralise au niveau municipal les moyens humains et financiers de lutte contre les incivilités, qui instaure le principe d'une «tolérance zéro à la française», pour reprendre l'expression de Julien Dray, c'est-à-dire qui sanctionne systématiquement et de manière proportionnée tous les actes de délinquance et de violence urbaine ?
Bref, êtes-vous prêt, monsieur le Premier ministre, à traduire dans les faits la devise du colloque de Villepinte: «Des villes sûres pour des citoyens libres» ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe Démocratie libérale et Indépendants et sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le député, il est vrai que la petite et moyenne délinquance est celle qui empoisonne tous les jours la vie quotidienne de nos concitoyens. Bien entendu, nous nous sommes attaqués à ce grave phénomène en lui accordant une toute première priorité, comme vient de le souligner le ministre de l'intérieur. Il n'y a aujourd'hui aucune impunité pour les auteurs d'actes de petite et moyenne délinquance. («C'est faux !» sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Nous nous sommes justement attachés à mettre en place les moyens diversifiés qu'une telle action demande. Quels sont ces moyens ?
D'abord, nous avons demandé à tous les acteurs locaux de travailler ensemble. Nous savons en effet que la lutte contre la petite et moyenne délinquance est d'abord une question de partenariat local entre les élus, la justice et la police, mais aussi avec le personnel éducatif et les travailleurs sociaux. Ce partenariat, nous le mettons en oeuvre dans les contrats locaux de sécurité, qui sont cosignés par les préfets et par les procureurs, et dans ces structures de proximité que sont les maisons de la justice et du droit. Il y en avait dix-sept quand nous sommes arrivés, il y en a soixante maintenant, il y en aura plus d'une centaine l'an prochain.
Nous mettons également en place des procédures de traitement immédiat, en temps réel, de la petite et moyenne délinquance. Sur tout le territoire, les procureurs veillent à ce qu'aucun acte de délinquance commis par des jeunes ne reste sans réponse: convocation immédiate, édiction de mesures évidemment proportionnées, recours aux mesures de sanction-réparation.
Comme vous le voyez, monsieur le député, nous refusons les solutions de facilité, nous nous attaquons aux problèmes de fond et, aujourd'hui, la justice est très sévère, comme en témoigne la décision récemment rendue par un tribunal de l'Est de la France qui a condamné à dix mois de prison ferme les agresseurs d'un employé des chemins de fer.
Nous avons pris le problème de la délinquance des jeunes comme il fallait le prendre, c'est-à-dire de façon diversifiée en évitant les solutions simplistes et les effets d'annonce, ce que vous n'avez pas toujours su faire. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert - Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Auteur : M. Marc-Philippe Daubresse
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Jeunes
Ministère interrogé : justice
Ministère répondant : justice
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 18 novembre 1999