élèves
Question de :
Mme Conchita Lacuey
Gironde (4e circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 1er décembre 1999
M. le président. La parole est à Mme Conchita Lacuey.
Mme Conchita Lacuey. Madame la ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire, vous avez récemment annoncé, au salon de l'éducation, la possibilité que la pilule du lendemain soit délivrée dans les collèges et les lycées par les infirmières scolaires à de jeunes adolescentes en difficulté.
Nous savons qu'en France, chaque année, il y a près de 10 000 grossesses non désirées chez les adolescentes, dont 6 700 donnent lieu à une IVG. En Gironde, le chiffre est supérieur à la moyenne nationale. La persistance de ce phénomène traduit l'échec de l'information et une maîtrise très imparfaite, voire l'ignorance des moyens de prévention chez les jeunes.
Depuis le 1er juin, la pilule du lendemain est en vente libre et délivrée sans ordonnance dans les pharmacies. Elle est sans effets secondaires graves et efficace à 95 % si on la prend dans les 24 heures qui suivent le rapport sexuel. Mais, nous devons le reconnaître, l'information reste incomplète.
Votre proposition, madame la ministre, prend en compte ce constat. Cependant, des réserves ont été formulées par les parents d'élèves. En effet, certains parents s'inquiètent de voir l'éducation nationale se substituer à leur responsabilité et craignent une banalisation des rapports sexuels sans protection.
Pour rassurer les parents et mieux prévenir les grossesses non désirées, quelles précisions pouvez-vous apporter sur cette délicate question ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire.
Mme Ségolène Royal, ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire. Madame la députée, je sais que cette décision, dont j'ai précisé les conditions la semaine dernière lors d'une réunion sur les problèmes de santé des adolescents à laquelle participaient trois cents infirmières scolaires, peut susciter des interrogations, voire des résistances et des oppositions.
J'insiste sur le fait qu'elle a été mûrement réfléchie: d'abord, elle répond à une urgence; ensuite, elle est accompagnée d'un certain nombre de conditions; enfin, elle s'inscrit dans une démarche globale d'éducation à la santé et à la sexualité.
Elle répond d'abord à une urgence. Comme vous l'avez rappelé, il y a 10 000 grossesses non désirées chaque année, chez les jeunes filles de moins de dix-huit ans, qui donnent lieu à 6 500 avortements, ceux-ci révélant d'ailleurs souvent des violences sexuelles. Il m'apparaît humainement nécessaire de mettre à la disposition de ces adolescentes en détresse les progrès scientifiques et médicaux, ...
M. Lucien Degauchy. Et l'éducation que donnent les parents ?
Mme la ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire. ... surtout lorsque ces moyens contraceptifs d'urgence sont en vente libre dans les pharmacies. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
Mais cette mesure s'accompagne d'un certain nombre de conditions. En effet, elle est décidée dans le cadre du système scolaire, et nous avons une responsabilité éducative à cet égard. Le protocole national que je mets en place prévoira donc explicitement qu'il s'agit de répondre aux cas d'extrême urgence ou de détresse; les parents seront informés, sauf si l'adolescente s'y oppose; enfin, l'adolescente sera mise en contact avec un centre de planning familial ou un service hospitalier spécialisé, afin d'être accompagnée, soit parce qu'il y a eu violence, soit parce qu'il y a eu une mauvaise information sur la contraception.
Cette décision s'inscrit également dans une action globale d'éducation à la sexualité. J'ai décidé de relayer dans les lycées et les classes de troisième des collèges la campagne que Martine Aubry lancera au mois de janvier, et sur laquelle nous avons travaillé ensemble. J'estime en effet que le système scolaire peut apporter beaucoup aux adolescents en ce qui concerne la prévention des conduites à risques, pour rappeler un certain nombre de valeurs comme l'estime de soi, le respect des autres, le refus des rapports sexuels contraints ou imposés, aux filles comme aux garçons, pour rappeler aussi que la sexualité précoce n'est pas forcément un progrès, bref, pour faire aussi de l'information sexuelle une éducation au respect mutuel.
En tout état de cause, je fais confiance aux infirmières scolaires pour faire face à cette mission de dialogue, d'information des adolescentes, en particulier des plus démunies, des plus isolées, des plus abandonnées, afin que, pour elles aussi, la naissance d'un enfant soit toujours un bonheur désiré. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Auteur : Mme Conchita Lacuey
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Enseignement secondaire
Ministère interrogé : enseignement scolaire
Ministère répondant : enseignement scolaire
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 1er décembre 1999