conseil supérieur de la magistrature
Question de :
M. André Vallini
Isère (9e circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 20 janvier 2000
M. le président. La parole est à M. André Vallini.
M. André Vallini. Madame la ministre de la justice, le Président de la République a donc décidé de reporter la réunion du Congrès, qu'il avait pris l'initiative de convoquer, lundi prochain, à Versailles, en vue de voter la réforme constitutionnelle du Conseil supérieur de la magistrature. C'est évidemment un recul du Président de la République (Rires et exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), ....
M. Jean-Michel Ferrand. Mais non ! Il ne voulait pas que l'on vote votre mauvaise loi !
M. André Vallini ; ...un recul auquel il a dû se résoudre devant le désaveu que s'apprêtaient à lui infliger ses propres amis politiques. Leur incohérence allait en effet les conduire à rejeter une réforme qu'ils avaient votée massivement en première lecture à l'Assemblée et au Sénat, et qui était approuvée et soutenue par le Président de la République.
M. Maurice Leroy. C'est petit !
M. André Vallini. Cet événement sans précédent dans l'histoire de notre République depuis 1958 est révélateur du profond désordre qui règne dans l'opposition mais ne saurait, à nos yeux, remettre en cause l'essentiel: la continuation de la réforme de la justice attendue par les Français. Car nous voulons, nous, que cette réforme aboutisse. Les Français souhaitent une justice plus accessible, plus respectueuse des libertés, plus impartiale, et donc indépendante.
Avec vous, madame la ministre, nous avons commencé depuis deux ans et demi cette oeuvre importante. C'est pourquoi je vous demande, au nom du groupe socialiste, de nous faire part de vos intentions sur la suite de cette réforme attendue par les Français. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux.
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le député, si le Président de la République a dû se résoudre à reporter le Congrès, c'est bien parce que la droite, submergée par des réflexes politiciens (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert), n'a pas voulu voter cette réforme d'intérêt général, comme la gauche avait su le faire, elle, en 1993, sur la proposition de M. Balladur et de M. Méhaignerie. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
Vous avez, monsieur le député, entendu le Premier ministre.
M. Jean Ueberschlag. Bel exemple de dialogue !
Mme la garde des sceaux. Le Gouvernement reste tout aussi déterminé à poursuivre la modernisation de la justice afin qu'elle réponde mieux aux attentes des Français. Car vous avez raison de souligner que, ce qui prime, c'est d'améliorer le fonctionnement de la justice au quotidien en remédiant à ce qui ne va pas.
A cet égard, l'Assemblée et le Sénat, et je les en remercie, ont non seulement voté deux lois très importantes pour faciliter l'accès au droit et renforcer l'efficacité de la lutte contre la petite et moyenne délinquance...
M. Jean-Michel Ferrand. Ce n'est guère efficace !
Mme la garde des sceaux. ... mais ils ont aussi accordé au Gouvernement des moyens sans précédent qui ont permis de progresser sur le terrain.
M. Jean-Michel Ferrand. On ne s'en rend pas compte !
Mme la garde des sceaux. C'est ainsi qu'il existe aujourd'hui une cinquantaine de maisons de la justice et du droit alors qu'il n'y en avait que seize lorsque nous sommes arrivés au pouvoir. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
C'est ainsi que nous avons pu lancer un plan de sauvetage des cours d'appel, qui étaient submergées par les recours dont les délais d'examen étaient extrêmement longs. Cent magistrats supplémentaires leur ont été attribués sur l'année dernière et cette année.
M. Maurice Leroy. Tout va bien !
Mme la garde des sceaux. Si bien que toutes les cours d'appel se sont vu affecter au moins un conseiller supplémentaire, en moyenne cinq ou six, et même neuf pour celle d'Aix-en-Provence qui accusait le plus grand retard. On n'avait pas vu cela depuis des années ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
Je veux également souligner l'importance de l'action menée pour lutter contre la petite et moyenne délinquance, en particulier celle des jeunes, qui empoisonne la vie quotidienne de nos concitoyens. Des recrutements records viennent renforcer la protection judiciaire de la jeunesse: 680 créations d'emplois cette année au lieu de 30 à 40, en moyenne, lorsque vous étiez aux responsabilités. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)
M. Jean-Michel Ferrand. Baratin ! Nous voulons des résultats !
Mme la garde des sceaux. Nous allons maintenant poursuivre l'examen du projet de loi sur la présomption d'innocence, texte essentiel pour les garanties données aux justiciables, qui viendra à nouveau en discussion à l'Assemblée nationale le 9 février prochain. Nous verrons bien alors ce que l'opposition proposera. Mais je rappelle à M. Debré que j'ai déjà accepté, lors des premières lectures, plus de soixante amendements de l'opposition: quinze à l'Assemblée et quarante-sept au Sénat. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe communiste. - Exclamations sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
Sur les autres projets de loi, chancellerie et parquet, statut des magistrats, le Gouvernement va se donner le temps d'examiner calmement comment le travail parlementaires peut être poursuivi dans la situation nouvelle créée, hélas ! par le report du Congrès.
Ne doutez pas un instant, mesdames et messieurs les députés, de ma détermination à poursuivre et à conduire cette réforme. Je remercie la majorité du soutien indéfectible qu'elle m'a toujours apporté. (Applaudissement sur de nombreux bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Auteur : M. André Vallini
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Justice
Ministère interrogé : justice
Ministère répondant : justice
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 20 janvier 2000