protection judiciaire
Question de :
M. Pierre Cardo
Yvelines (7e circonscription) - Union pour la démocratie française
Question posée en séance, et publiée le 20 novembre 1997
M. le président. La parole est à M. Pierre Cardo.
M. Pierre Cardo. Monsieur le Premier ministre, je voudrais attirer votre attention sur le problème posé à notre pays par la massification, la banalisation et le rajeunissement de la délinquance des mineurs à laquelle nous assistons depuis plusieurs années.
L'incapacité de notre société à se déterminer clairement à ce sujet, - je n'en veux pour preuve que les déclarations assez peu compatibles du ministre de l'intérieur et du garde des sceaux - l'impuissance de nombre de magistrats à juguler les phénomènes de multi-récidive exigent que nous révisions les modes d'intervention judiciaire et administrative auprès des mineurs.
Un débat s'impose aujourd'hui sur la forme et les moyens de nos réponses, éducatives et répressives, auprès d'une population mineure fragile et difficile. Nous devons évaluer et redéfinir notre système de détection et de signalement afin qu'il permette très tôt de lancer l'action éducative et, très vite, lors du premier délit, de signifier une sanction pertinente, seul moyen d'enrayer la récidive. Nous devons construire plus solidement le dispositif permettant la réparation, l'éloignement momentané du mineur dans un cadre adapté et la responsabilisation des parents.
Tout cela, y compris des solutions surprenantes envisagées par des membres de votre Gouvernement, relève de l'ordonnance de 1945 que vous ne souhaitez pas réformer. Sur un sujet aussi grave, je ne crois pas bon de laisser le débat se dérouler uniquement dans la presse ou dans la rue et les réformes chez nos voisins d'outre-Manche. Monsieur le Premier ministre, acceptez-vous d'organiser ce débat à sa place, c'est-à-dire ici, dans cette assemblée, afin que nous assumions pleinement notre responsabilité politique, en dehors de toute polémique et à l'écart de tout terrorisme intellectuel ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française et du groupe du Rassemblement pour la République.)
M. le président. La parole est à Mme le garde des sceaux, ministre de la justice.
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le député, vous avez raison, la délinquance des mineurs est aujourd'hui l'un des problèmes les plus graves qu'a à affronter notre société. Il est vrai que, de plus en plus tôt, des jeunes commettent des actes de plus en plus graves.
Par rapport à ce problème, que nous connaissons tous et auquel sont confrontés notamment ceux qui ont des responsabilités municipales, je crois, en effet, que nous devons définir des lignes d'action très claires. Le Gouvernement a fait de cette question l'une de ses premières priorités. Et aussi bien la police nationale, que la gendarmerie nationale, que les services du ministère de la justice sont mobilisés pour apporter des réponses à cette très importante question.
La gendarmerie nationale vient de créer des brigades de prévention de la délinquance des mineurs. La police nationale vient de renforcer ses effectifs, avec la création de 35 000 postes d'adjoint de sécurité qui viendront renforcer l'action des services de police, notamment dans les quartiers difficiles. Quant au ministère de la justice, le budget qui m'a été alloué cette année m'a permis d'accorder la première priorité à la protection judiciaire de la jeunesse par le recrutement d'éducateurs - qui avait considérablement pâti ces dernières années -, par le recrutement de magistrats pour enfants, par la construction de nouveaux foyers d'hébergement. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
Au-delà de cet effort budgétaire déjà consenti par le Gouvernement, il faut aller plus loin et réfléchir à de nouveaux modes de traitement de la délinquance des mineurs. A cet égard, il importe que tout acte de délinquance reçoive une sanction qui soit, certes, adaptée à la gravité des faits, mais une sanction. Il est également très important que nous puissions apporter des réponses diversifiées et que, tout en privilégiant l'action éducative vis-à-vis des jeunes, nous leur fassions savoir que nous ferons montre de fermeté dans l'application de la loi pénale. Enfin, il faut que nous puissions mobiliser tous les acteurs et tous les partenaires, aussi bien au niveau national qu'au niveau local. Je vous signale à cet égard que le Gouvernement met en place des contrats locaux de sécurité...
Mme Odette Grzegrzulka. Très bien !
Mme le garde des sceaux. ... qui seront déployés sous l'autorité conjointe du préfet, du procureur et des autres responsables des services de l'Etat.
Cet après-midi même se réunit pour la première fois, sous la présidence du Premier ministre, le conseil national de sécurité qui a précisément à son ordre du jour la lutte contre la délinquance des jeunes.
Mme Odette Grzegrzulka. Très bien !
Mme le garde des sceaux. Vous le voyez, monsieur le député, dans ce gouvernement on débat de cet important sujet mais, comme l'a dit le Premier ministre dans sa déclaration de politique générale, il y a une ligne claire: assurer la sécurité pour tous. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe communiste.)
Auteur : M. Pierre Cardo
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Jeunes
Ministère interrogé : justice
Ministère répondant : justice
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 20 novembre 1997