Question au Gouvernement n° 1868 :
mer et littoral

11e Législature

Question de : M. François Fillon
Sarthe (4e circonscription) - Rassemblement pour la République

Question posée en séance, et publiée le 23 février 2000

M. le président. La parole est à M. François Fillon.
M. François Fillon. Monsieur le Premier ministre, cela fait deux mois que la marée noire de l'Erika a atteint les côtes de Bretagne et des Pays de la Loire. Depuis le 26 décembre, des milliers de bénévoles, mais aussi des agents des collectivités locales et de l'Etat, civils ou militaires, travaillent d'arrache-pied, souvent dans des conditions extrêmement difficiles, pour effacer les conséquences de cette catastrophe écologique et empêcher qu'elle ne se transforme pas en une catastrophe économique.
Mais, depuis plusieurs semaines, court, sur le littoral atlantique, une rumeur terrible: le produit échappé des cales de l'Erika serait dangereux pour la santé de ceux qui le ramassent.
Lorsque nous nous sommes rendus à votre invitation à Matignon, il y a quelques jours, la plupart des élus vous ont alerté sur ce sujet, et vous avez d'ailleurs tenu des propos plutôt rassurants. Votre ministre de l'environnement, Mme Voynet, a même ironisé sur la fiabilité du laboratoire privé qui est à l'origine de cette polémique.
Mais hier, à Vannes, elle a ravivé nos inquiétudes en déclarant qu'elle ne pouvait pas affirmer que ce produit n'était pas dangereux pour la santé de ceux qui le ramassent et qu'elle attendait encore un certain nombre d'analyses commandées par le Gouvernement.
Monsieur le Premier ministre, je vous le dis au nom de tous les élus du littoral, cette situation ne peut plus durer: vous devez nous dire si nous pouvons continuer à envoyer nos concitoyens nettoyer nos côtes souillées. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Monsieur le député, la position du Gouvernement et le discours des différents intervenants qui se sont exprimés au nom de l'Etat n'ont pas varié. Nous connaissons depuis les premiers jours du naufrage de l'Erika la composition précise du produit: il s'agit bien de fioul lourd n° 2, un résidu de distillation du pétrole brut qui, comme tous les produits pétroliers, contient un certain nombre de composants dangereux pour la santé, je pense notamment aux hydrocarbures aromatiques polycycliques.
La composition de ce produit est connue. Les analyses de l'Institut français du pétrole, du centre antipoison et des différents instituts que nous avons sollicités sont convergentes: moyennant le respect des règles diffusées dès le mois de décembre sur les plages et dans tous les PC avancés, le risque reste limité.
Ces mesures de sécurité, vous les connaissez: porter des gants spéciaux pour hydrocarbures, des masques et des lunettes, si l'on doit manipuler des équipements projetant de l'eau sous pression.
Cela dit, nous avons voulu nous entourer du maximum de garanties. Et quand nous avons eu connaissance des résultats qui ont été colportés par un laboratoire indépendant à la fiabilité contestable, nous avons commandé des études et des contre-expertises de complément de sécurité: certaines à l'INERIS, l'Institut national de l'environnement industriel et des risques, d'autres à l'étranger. - aux Pays-Bas - afin de ne pas nous exposer à l'accusation de partialité. Des pré-résultats, encore précaires, sont disponibles. Ils semblent montrer que les mesures préconisées sont suffisantes et qu'il n'en est pas besoin de supplémentaires.
Cela étant, nous avons régulièrement rappelé ces consignes de sécurité. J'ai visité personnellement, à la fin de la semaine dernière, plusieurs chantiers. Sur chacun d'eux, j'ai constaté que les consignes étaient respectées de façon très aléatoire et très inégale.
Enfin, nous avons mis en place, à la demande des professionnels et des bénévoles, un suivi épidémiologique. Le dispositif de surveillance des sites de nettoyage n'a pas permis de déceler des hydrocarbures dans l'air. Nous avons analysé les urines des pompiers qui, jour après jour, ont travaillé sur le site. (Murmures sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.), sans déceler d'hydrocarbures aromatiques dans une proportion supérieure à la population. Si j'insiste sur ces précisions extrêmement concrètes, c'est pour montrer qu'on ne joue pas avec la santé des gens. Nous ne souhaitons pas avancer, de façon précipitée, des éléments qui pourraient permettre de faire revenir plus de bénévoles sur les plages au risque de mettre en danger leur santé sur le long terme. (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Données clés

Auteur : M. François Fillon

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Déchets, pollution et nuisances

Ministère interrogé : aménagement du territoire et environnement

Ministère répondant : aménagement du territoire et environnement

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 23 février 2000

partager