Iran
Question de :
M. Claude Goasguen
Paris (14e circonscription) - Démocratie libérale et indépendants
Question posée en séance, et publiée le 6 avril 2000
M. le président. La parole est à M. Claude Goasguen.
M. Claude Goasguen. Monsieur le ministre des affaires étrangères, ma question concerne la situation des droits de l'homme en Iran.
Dans quelques jours, un tribunal spécial sera réuni à Téhéran pour juger treize personnes de confession israélite. Ce tribunal les qualifie de «Juifs», et uniquement de «Juifs». Les droits de la défense ne sont pas garantis par la procédure et il n'y aura aucune présence étrangère.
Pourtant, le 28 octobre 1999, M. Khatami, qui était alors en pleine campagne électorale et cherchait à anesthésier les démocraties occidentales, avait promis à la France que des observateurs étrangers seraient présents devant ce tribunal spécial et qu'un minimum des droits de la défense serait respecté.
Aujourd'hui que la campagne électorale est terminée, M. Khatami ne tient pas ses engagements et nous sommes en passe d'assister à une mascarade de procès, qui est, en réalité, une exécution.
Monsieur le minsitre, personne n'a pu obtenir un visa lui permettant de se rendre en Iran pour assister au procès. Je vous demande solennellement si nous pouvons tolérer cet acte grave commis à l'encontre de la France, à qui le Gouvernement iranien a fait des promesses qui ne sont pas tenues, et à l'encontre des droits de l'homme. Pouvons-nous accepter une telle situation ? Pouvez-vous nous donner des informations sur ce qui se passe réellement à Téhéran ? Et au cas où ces funestes rumeurs se confirmeraient, pouvez-vous nous indiquer quelle sera l'attitude de la France ?
La France peut-elle envisager sereinement une coopération économique avec un pays qui fait preuve d'un tel cynisme et d'une telle désinvolture envers les droits universels de l'homme ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants, et sur quelques bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.
M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères. Monsieur le député, nous suivons cette affaire très préoccupante et inquiétante avec une grande attention et une extrême vigilance depuis que nous en avons connaissance, c'est-à-dire depuis plusieurs mois.
Sur le plan pratique, cela signifie que, chaque fois que nous avons eu des contacts avec les autorités iraniennes actuelles, nous leur avons signalé que le déroulement de ce procès serait un élément fondamental à nos yeux, comme aux yeux des autres pays européens ou occidentaux - puisque les Etats-Unis commencent à bouger par rapport à ce régime -, du jugement que nous serons amenés à porter sur la capacité de ce pays à évoluer.
Il faut savoir que, en Iran, même après les victoires électorales du président Khatami - sa propre élection et la victoire de son camp aux élections législatives -, il y a encore une lutte de tous les instants entre, d'une part, ceux qui veulent préserver la ligne la plus dure de la révolution islamique, avec sa dimension de xénophobie et de piétinement des droits de l'homme, et, d'autre part, ceux qui, comme le président Khatami, tentent de faire évoluer ce pays. C'est en tout cas de la sorte qu'il faut interpréter le choix des électeurs chaque fois qu'ils ont la possibilité de se prononcer. Et cette lutte a lieu tant dans le domaine de la politique étrangère que dans d'autres domaines concernant la vie interne de l'Iran, comme la justice ou la police par exemple.
Malheureusement, la lutte d'influences est à son paroxysme dans le secteur de la justice. C'est un élément d'explication que vous devez avoir à l'esprit, même si cela ne change rien à notre position claire, à nos exigences et à notre détermination.
Je me suis assuré que notre sentiment était partagé par les Italiens, par les Allemands, par les autres pays qui développent leurs relations avec les autorités iraniennes - en tout cas avec le gouvernement du président Khatami, si ce n'est avec toutes les autorités -, ainsi que par les Américains, qui commencent à changer de position vis-à-vis de l'Iran, puisqu'ils ont annoncé récemment certaines mesures ponctuelles de levée d'un embargo qui remontait à fort longtemps.
La pression exercée est donc claire, nette et exigeante. A ce stade, je ne veux pas baisser les bras et considérer que toutes ces pressions et toutes ces attentes resteront sans résultat. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Auteur : M. Claude Goasguen
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : affaires étrangères
Ministère répondant : affaires étrangères
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 6 avril 2000