crédit lyonnais
Question de :
M. Charles de Courson
Marne (5e circonscription) - Union pour la démocratie française-Alliance
Question posée en séance, et publiée le 4 mai 2000
M. le président. La parole est à M. Charles de Courson.
M. Charles de Courson. Monsieur le ministre de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, («Ah !» sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie librale et Indépendants), d'après les informations publiées par la presse et confirmées par l'intéressé, Jean-Claude Trichet, ancien directeur du Trésor de 1987 à 1993, va être mis en examen étant soupçonné d'avoir participé à la diffusion de fausses informations au marché et à la publication de comptes sociaux inexacts, notamment pour l'exercice 1992, du Crédit lyonnais.
Or vous avez été, comme ministre de l'économie et des finances d'avril 1992 à fin mars 1993,...
M. François Goulard. Il a oublié !
M. Charles de Courson. ... en charge du Crédit lyonnais en tant que représentant de l'actionnaire qu'était l'Etat et en tant que responsable de la tutelle sur le système bancaire.
Dès le 1er septembre 1992, le directeur du Trésor vous a averti que les comptes du premier semestre 1992 du Crédit lyonnais seraient très mauvais à cause des pertes enregistrées sur un client de la filiale du Crédit lyonnais aux Pays-Bas, la Metro-Goldwin-Mayer.
; Le 23 octobre 1992, vous avez demandé au directeur du Trésor de mettre en place une procédure de suivi de l'évaluation des engagements importants du Crédit lyonnais. Or, dans sa déposition du 2 juin 1994 devant la commission d'enquête sur le Crédit lyonnais, M. Pavie, commissaire aux comptes du Crédit lyonnais, a précisé: «Il nous a été déclaré et confirmé au conseil d'administration qui s'est tenu le 26 mars 1993, deux jours avant le deuxième tour des élections législatives, que les comptes ont été arrêtés en accord avec la direction du Trésor, avec la Banque de France et avec la commission bancaire». Et on sait aujourd'hui que les pertes du Crédit lyonnais auront coûté aux contribuables près de 100 milliards, sans compter les frais de portage et de restructuration estimés à 50 milliards.
M. François Goulard. Rendez l'argent !
M. Charles de Courson. Enfin, dimanche soir, sur FR 3...
M. le président. Votre question, monsieur de Courson !
M. Charles de Courson. ... à Christine Ockrent qui vous demandait si, au travers de Jean-Claude Trichet, c'est l'Etat qui est en cause, vous avez répondu: «Ce n'est pas Jean-Claude Trichet lui-même qui est en cause, c'est Jean-Claude Trichet responsable du suivi du dossier.»
Mais, monsieur le ministre, Jean-Claude Trichet était sous votre autorité (Protestations sur les bancs du groupe socialiste) et vous a alerté sur la gravité de la situation du Crédit lyonnais. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Ma question est donc simple: avez-vous donné des directives au directeur du Trésor sur l'arrêté des comptes de l'exercice 1992 du Crédit lyonnais et quelles ont été vos responsabilités dans l'arrêté des comptes de cet exercice ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Plusieurs députés du groupe socialiste. Cette question est scandaleuse.
M. le président. La parole est à M. le ministe de l'économie, des finances et de l'industrie. («Sapin !» sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le député, il y a au moins deux aspects dans la question qui est soulevée.
Il y a d'abord l'aspect proprement judiciaire, puisque nous avons appris de l'intéressé lui-même que le directeur du Trésor de l'époque était mis en examen sur la base, je le précise, d'une plainte déposée un peu plus tard par le ministre de l'économie, M. Arthuis.
M. Charles de Courson. En 1996 !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Sur ce plan proprement judiciaire, il faut, je crois, s'en tenir à la règle à laquelle nous nous conformons tous et qui veut que la justice fasse son travail.
M. Lucien Degauchy. Ben voilà !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. La question comporte un autre aspect qui ne peut pas nous laisser indifférents. Depuis lors, en effet, l'intéressé a accédé à d'autres fonctions.
M. Patrick Devedjian. Vous voulez parler de M. Sapin !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Il est aujourd'hui gouverneur de la Banque de France et membre de la Banque centrale européenne.
M. Thierry Mariani. Ce n'est pas la question !
Mme Nicole Bricq. Mais si, vous savez bien que c'est la question !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je tiens à la vérité de dire qu'il bénéficie d'une réputation exceptionnelle et qu'il n'est pas dans l'intérêt de notre pays de mettre en cause cette réputation. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Auteur : M. Charles de Courson
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Banques et établissements financiers
Ministère interrogé : économie
Ministère répondant : économie
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 4 mai 2000