SMIC
Question de :
Mme Marie-Thérèse Boisseau
Ille-et-Vilaine (6e circonscription) - Union pour la démocratie française
Question posée en séance, et publiée le 3 décembre 1997
M. le président. La parole est à Mme Marie-Thérèse Boisseau.
Mme Marie-Thérèse Boisseau. Madame la ministre de l'emploi et de la solidarité, l'abaissement de la durée légale du travail à trente-cinq heures aura un certain nombre de conséquences...
M. Jacques Myard. Du chômage !
Mme Marie-Thérèse Boisseau. ... dont je ne suis pas sûre que vous ayez mesuré l'ampleur, notamment sur le SMIC. Que va-t-il devenir ? Pour simplement le maintenir à son niveau actuel, il vous faudra augmenter son taux horaire de 11,5 %. Vous avez jugé, le lundi 24 novembre, qu'il n'y avait là qu'un problème technique et que vous aviez deux ans pour y réfléchir. Je crois, pour ma part, qu'il s'agit d'un problème économique majeur et que vous ne pouvez laisser deux ans dans l'incertitude l'ensemble de l'économie française très inquiète. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française et du groupe du Rassemblement pour la République.)
En effet, la hausse du coût du travail qui résulterait d'une telle revalorisation mettrait en difficulté l'ensemble de nos entreprises, y compris celles de moins de vingt salariés, puisqu'un relèvement du taux horaire du SMIC s'appliquerait par définition à tout le monde.
Vous avez affirmé le 28 octobre dernier, en réponse à une question de notre groupe, que les smicards n'y perdraient pas. C'est une réponse trop floue pour une question si grave.
Pouvez-vous enfin, madame, répondre précisément à cette question simple mais capitale: effectuerez-vous oui ou non la revalorisation de 11,5 % du taux horaire nécessaire à garantir le niveau actuel du SMIC ? (Applaudis-sements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française et du groupe du Rassemblement pour la République.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Madame la député, il faut regarder ce problème des trente-cinq heures...
Un député du groupe de l'Union pour la démocratie française. Regardez...
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. C'est ce que nous faisons et beaucoup d'entreprises le font avec nous, ce qui nous fait très plaisir ! (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française et du groupe du Rassemblementt pour la République.)
Il faut regarder ce problème des trente-cinq heures de manière dynamique et non pas de manière statique. Si une entreprise réduit la durée du travail sans rien modifier, sans réfléchir à son organisation du travail, sans gagner en compétitivité, sans réduire les délais, sans améliorer la qualité et la qualification, ce qu'aucune entreprise ne fera, le coût supplémentaire sera effectivement de l'ordre de 11,5 %.
Les 1 200 entreprises qui ont signé un accord de réduction de la durée du travail l'année dernière nous l'ont bien montré; celles qui rémunéraient des salariés au SMIC n'ont pas réduit les salaires, je vous rassure.
Mme Marie-Thérèse Boisseau. Ca n'a rien à voir !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Mais si, madame. («Non !» sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française.) Vous ne regardez que le coût sans prendre en compte les gains de productivité pour les entreprises, ni l'aide de l'Etat qui sera d'autant plus importante, contrairement à la loi Robien, que les salaires seront bas, puisque c'est une aide forfaitaire, quels que soient les salaires. Vous verrez in fine que le coût doit, pour une entreprise qui traite correctement la question, représenter le tiers de la somme que vous avancez.
En arrière-plan de l'organisation de l'entreprise, qui pose un problème économique, il y a un problème technique.
M. Pierre Lellouche. Surtout !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Nous avons aujourd'hui un SMIC horaire, une durée du travail hebdomadaire, un salaire mensuel et, de plus en plus, des horaires annualisés. Comment travailler ensemble, en s'appuyant sur la négociation, pour mieux lier les deux, la rémunération et la durée du travail, sans porter atteinte aux avantages des salariés, comme l'ont souhaité certains, en n'intégrant pas le treizième mois et les primes d'ancienneté ?
M. Pierre Lellouche. Quelle entreprise avez-vous gérée ?
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. C'est sur ce problème technique que nous sommes en train de travailler.
Pour le reste, aux entreprises de faire preuve d'imagination ! (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.) Elles commencent à le faire et le Gouvernement s'en réjouit. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Auteur : Mme Marie-Thérèse Boisseau
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Travail
Ministère interrogé : emploi et solidarité
Ministère répondant : emploi et solidarité
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 3 décembre 1997