Question au Gouvernement n° 2396 :
aliments pour animaux

11e Législature

Question de : M. Yves Cochet
Val-d'Oise (7e circonscription) - Radical, Citoyen et Vert

Question posée en séance, et publiée le 15 novembre 2000

M. le président. La parole est à M. Yves Cochet.
M. Yves Cochet. Monsieur le président, ma question s'adresse à M. le Premier ministre.
Depuis des années, les Verts essaient d'alerter l'opinion publique et les politiques sur les risques sanitaires et environnementaux que font courir les farines animales.
Le moratoire que nous réclamions et qui a été relayé par Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement est maintenant décidé par le Gouvernement. Nous nous en félicitons.
M. Charles Cova. C'est ce qui s'appelle se raccrocher aux branches !
M. Yves Cochet. Dès lors, la question des substituts alimentaires que nous donnerons aux animaux se pose. La France va-t-elle choisir des oléo-protéagineux de qualité ou bien du soja génétiquement modifié importé des Etats-Unis ?
M. Jean-Pierre Michel. Très bonne question !
M. Yves Cochet. Au nom des accords de Blair House, il semble que le Gouvernement choisisse plutôt la seconde solution, à laquelle nous nous opposons.
Nous pensons que la France ne doit pas abandonner la peste farineuse pour le choléra OGM ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
La France doit refuser l'importation du soja génétiquement modifié comme elle a su s'opposer à l'importation de boeuf aux hormones américain.
Plus généralement, cette crise révèle les méfaits de la politique agricole productiviste, défendue notamment par la FNSEA, cette même FNSEA qui, il y a quelques jours, proposait, pour masquer sa responsabilité, d'abattre tous les bovins nés avant 1996, sans remettre en cause l'usage des farines animales.
Maintenant, le moratoire est décidé, et nous nous en félicitons.
Monsieur le Premier ministre, comment comptez-vous mettre en oeuvre le stockage, le traitement et l'élimination des déchets animaux et des farines animales ?
Ne croyez-vous pas, par ailleurs, qu'il faudrait peut-être adopter, pour ces déchets, la nomenclature des déchets toxiques de classe A, qui suppose un stockage et un traitement plus rigoureux ?
Enfin, l'agriculture biologique, seule garante d'une alimentation de qualité, disposera-t-elle d'aides supplémentaires ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Lionel Jospin, Premier ministre. Monsieur le député, avant de vous répondre, je voudrais dire que le Gouvernement s'associe au geste d'hommage qui a été à l'instant accompli par le président de votre assemblée. La semaine prochaine, le Gouvernement, et notamment moi-même, participerons à l'hommage solennel qui sera rendu à la mémoire du président Chaban-Delmas.
Je vais maintenant répondre à votre question.
Il y a trois semaines, le 24 octobre, Jean Glavany, le ministre de l'agriculture, annonçait devant l'Assemblée nationale que le Gouvernement allait demander à l'AFSSA, l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments, d'évaluer les risques liés à l'utilisation des farines animales dans l'alimentation des volailles et des porcins.
L'avis de l'AFSSA a été demandé.
La semaine dernière, dans cette même enceinte, j'ai indiqué que le Gouvernement était en train d'étudier les modalités d'interdiction des farines animales.
Depuis lors, le Gouvernement a travaillé à préparer...
M. Guy Teissier. Rien du tout !
M. le Premier ministre. ... les conditions de la mise en oeuvre d'une suspension de l'utilisation des farines en attendant l'avis de l'AFSSA. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Ce travail a été conduit avec une exigence: arrêter un ensemble de mesures à la fois efficaces et techniquement possibles - je dirai même: efficaces parce que techniquement possibles. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Il ne faut pas dans ces domaines proclamer, mais être capable d'agir dans des conditions de sécurité pour les Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Huées sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Pierre Lellouche. Cela fait trois ans que le Gouvernement réfléchit !
M. le président. Monsieur Lellouche, je vous en prie.
M. le Premier ministre. Ces propositions sont de plusieurs ordres.
Il s'agit, premièrement, de la suspension de l'utilisation des farines animales. Le Gouvernement a décidé de suspendre l'utilisation des farines d'os et de viande dans l'alimentation des porcs, des volailles ainsi que des animaux domestiques.
M. Jean Auclair. Merci Chirac !
M. le Premier ministre. Pour accompagner cette décision et limiter les risques pour l'environnement et la santé, un certain nombre d'évaluations et de mesures ont été décidées.
Des capacités d'incinération supplémentaires immédiatement mobilisables ont été recensées pour 486 000 tonnes. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Bernard Accoyer. En huit jours ?
M. le Premier ministre. Absolument, et cela a demandé un travail important. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
Des capacités supplémentaires, estimées à 350 000 tonnes, devraient être décidées d'ici au mois de juin 2001.
Il est clair que des nourritures de substitution seront nécessaires. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Certaines impliqueront des importations supplémentaires. Il n'y a a priori aucune raison que nous importions des produits génétiquement modifiés. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe communiste et sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Enfin, nous devrons développer la culture d'oléagineux et de protéagineux en France, comme déjà le Gouvernement a décidé de le faire.
Deuxièmement, nous prendrons des mesures de retrait supplémentaires. Déjà, conformément aux recommandations des scientifiques, le Gouvernement a décidé, au vu de l'avis de l'AFSSA, la mise en oeuvre du retrait des colonnes vertébrales de la chaîne alimentaire et la modification de la découpe dans les abattoirs et chez les bouchers.
Troisièmement, les moyens de contrôle sur l'ensemble de la chaîne alimentaire seront renforcés.
Il s'agit, quatrièmement, de l'extension du dépistage de l'ESB par des tests biologiques en vue de l'extension de la campagne de tests à tout le territoire national. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
Il s'agit, cinquièmement, de l'étude de mesures de retrait de certains animaux de la chaîne alimentaire.
Il s'agit, sixièmement, du renforcement des mesures de précaution et de sécurisation pour la santé de l'homme. Les mesures nécessaires ont été prises et seront amplifiées contre les risques éventuels de transmission humaine à l'occasion des activités de soins.
Il s'agit, septièmement, du renforcement de la recherche, dont les moyens seront triplés.
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance. C'est nul !
M. Maurice Leroy. Il est en train de manger son chapeau !
M. le Premier ministre. Enfin et hors de ce plan centré sur la sécurité sanitaire, le Gouvernement va mettre en oeuvre des mesures de soutien, d'accompagnement pour la filière bovine et avicole.
M. Maurice Leroy. Il est bon, le chapeau ?
M. le Premier ministre. Nous avons pleinement conscience de la gravité de la situation pour toute la filière bovine,...
M. Thierry Mariani. Il était temps !
M. le Premier ministre. ... injustement stigmatisée. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
La baisse de la consommation de viande bovine qui a été enregistrée se traduit par un déséquilibre important du marché.
M. Maurice Leroy. Il a quel goût, le chapeau ?
M. le président. Monsieur Leroy, je vous en prie.
M. le Premier ministre. La France demande que la situation du marché de la viande bovine soit inscrite à l'ordre du jour du Conseil des ministres de l'agriculture qui se tiendra à Bruxelles les 20 et 21 novembre prochains.
J'ai demandé au ministre de l'agriculture de présenter au Gouvernement, dans les meilleurs délais, des mesures nécessaires au soutien et à l'accompagnement de la filière agricole et avicole.
M. Christian Bergelin. Quelle tristesse !
M. le Premier ministre. Pour conclure, monsieur le député,...
M. Maurice Leroy. Il continue de manger son chapeau !
M. le Premier ministre. ... agir dans la transparence, appliquer le principe de précaution, faire primer la santé publique sur toute autre considération,...
M. Pierre Lellouche. Comme le disait M. Chirac !
M. le Premier ministre. ... éclairer les décisions par l'avis des scientifiques, préparer des décisions en évaluant leurs conséquences...
M. Richard Cazenave et M. Pierre Lellouche. Comme le disait M. Chirac !
M. le Premier ministre. ... pour être en mesure de les appliquer efficacement et dans le respect de la santé et de l'environnement,...
M. Pierre Lellouche. Merci, monsieur Chirac !
M. le Premier ministre. ... tels sont les principes qui doivent guider un gouvernement. Tels sont les principes qui doivent guider les décideurs lorsqu'ils sont responsables.
M. Pierre Lellouche. Comme le disait M. Chirac !
M. le Premier ministre. C'est en s'appuyant sur ces principes que le Gouvernement, dans un dialogue constant avec le Parlement, continuera d'agir. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Richard Cazenave. Merci Chirac !

Données clés

Auteur : M. Yves Cochet

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Agroalimentaire

Ministère interrogé : Premier Ministre

Ministère répondant : Premier Ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 15 novembre 2000

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