Question au Gouvernement n° 2406 :
entreprises

11e Législature

Question de : Mme Geneviève Gaillard
Deux-Sèvres (1re circonscription) - Socialiste

Question posée en séance, et publiée le 15 novembre 2000

M. le président. La parole est à Mme Geneviève Perrin-Gaillard.
Mme Geneviève Perrin-Gaillard. Ma question s'adresse à M. Guy Hascoët, secrétaire d'Etat à l'économie solidaire. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Jeudi 16 novembre se déroulera à l'Assemblée nationale le premier colloque sur l'économie sociale, à l'initiative du groupe parlementaire que pilote notre collègue Jean-Louis Dumont. Vous y participerez, monsieur le secrétaire d'Etat, et tous les parlementaires y sont conviés.
Les 760 000 entreprises de l'économie sociale, associations, coopératives, mutuelles d'assurances et de santé, fondations, emploient plus de 1,7 million salariés. Elles représentent un gisement formidable d'emplois. Mais, aujourd'hui, elles s'interrogent sur le sort qui pourrait leur être réservé dans l'économie marchande que nous connaissons.
La pensée dominante consiste à véhiculer un seul modèle de société: les sociétés de capitaux, et lie inéluctablement production et rémunération du capital. Or les entreprises de l'économie sociale, qui n'ont pas pour objet de maximiser un profit ni de rémunérer un capital ne peuvent trouver de fonds sur les marchés financiers pour survivre. Elles n'ont pas de socle législatif défini comme les sociétés de capitaux avec la loi de 1966. Elles sont fondées sur divers codes et les textes législatifs ne les prennent jamais en compte, ce qui nous oblige, lorsque nous le pouvons, à les adapter au coup par coup.
Face aux risques encourus par ces entreprises qui positionnent l'homme au coeur de l'activité de production et qui répondent à une éthique souhaitée par tous nos concitoyens, je vous serais reconnaissante, monsieur le secrétaire d'Etat, de bien vouloir me dire si vous envisagez de développer un vrai statut des sociétés de personnes et quelles sont les mesures de soutien à cette forme d'économie que vous pouvez mettre en place ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat à l'économie solidaire.
M. Guy Hascoët, secrétaire d'Etat à l'économie solidaire. Madame la député, vous avez raison de vous étonner du fait que certains voudraient nous faire croire que la vertu serait du côté de l'enrichissement rapide, individuel, et que ceux qui, sûrement, produisent des services et des biens dans l'idée de construire des solidarités, de dégager une plus-value sociale, ou environnementale, de contribuer à l'émergence d'un patrimoine partagé seraient finalement fautifs. Il n'en est rien. Et quand nous faisons l'analyse financière des aides publiques accordées à certains secteurs, par l'Etat comme par l'Union européenne, par rapport à la place qu'ils occupent dans le PIB, on s'aperçoit que ce sont ceux qui, au nom de la libre concurrence, voudraient empêcher certaines spécificités ou certains droits de s'affirmer, qui se tournent le plus souvent vers la puissance publique pour obtenir des subventions. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste. - «Prouvez-le !» et exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Il est bon d'examiner objectivement quelle est la place respective: de la puissance publique, qui joue un rôle de régulation; de l'économie de marché, dont le rôle est légitime; et des sociétés de personnes, dont le rôle est indispensable pour produire cette plus-value que j'évoquais à l'instant. Mon secrétariat d'Etat a d'ailleurs pris l'initiative des premières rencontres pour l'économie plurielle, qui se tiendront les 23 et 24 novembre à Tours et qui regrouperont 600 réseaux européens de l'économie sociale et solidaire, plusieurs ministres, le conseil consultatif des mutuelles, assurances et fondations, pour aller au coeur de cette question.
Préserver la pluralité de la démarche économique, c'est ce que fait le Gouvernement quand il prend des mesures pour mettre en sécurité la spécificité mutualiste, de telle sorte que, huit années après l'adoption de la directive «Assurance», le secteur mutualiste dispose d'un cadre juridique refondé qui lui permette de bien envisager son avenir.
Ouvrir de nouvelles reconnaissances, c'est ce que fait le Gouvernement quand, à la faveur d'un chantier sur le code des marchés publics, non seulement certaines reconnaissances passées sont préservées, mais la réflexion s'ouvre sur la manière d'affirmer plus nettement l'intérêt général.
Ouvrir de nouveaux horizons, c'est ce que je fais aussi quand je lance le chantier de l'épargne solidaire, mais je crois, et vous avez raison, madame la députée, que le champ, dans son ensemble, mérite d'être revisité.
M. Maurice Leroy. Oh la la !
M. le secrétaire d'Etat à l'économie solidaire. Il y a sans doute une adaptation nécessaire de certains statuts existants. Il y a des nécessités qui touchent à des secteurs modernes: les services de proximité, que tout le monde revendique mais qui ont besoin d'un cadre juridique plus net; la solvabilisation des services; la prise en compte du commerce équitable. Je pourrais m'étendre. Je dis simplement que le balayage de ce chantier, mon équipe et mon cabinet sont en train de l'opérer.
M. Maurice Leroy. Et concrètement ?...
M. le secrétaire d'Etat à l'économie solidaire. Il s'agit à la fois d'adapter, de moderniser et finalement d'affirmer politiquement (Mouvements d'impatience sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) - je vois que cela dérange sur certains bancs (Exclamations sur les mêmes bancs) - que la pluralité des démarches économiques est constitutive de la pluralité démocratique. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste.)

Données clés

Auteur : Mme Geneviève Gaillard

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Économie sociale

Ministère interrogé : économie

Ministère répondant : économie

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 15 novembre 2000

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