Question au Gouvernement n° 251 :
maladies professionnelles

11e Législature

Question de : M. Alain Tourret
Calvados (6e circonscription) - Radical, Citoyen et Vert

Question posée en séance, et publiée le 11 décembre 1997

M. le président. La parole est à M. Alain Tourret.
M. Alain Tourret. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.
Le caractère cancérigène de l'amiante est désormais reconnu par tous. La décision d'interdire la fabrication, l'importation et la mise en vente de produits contenant de l'amiante a été prise le 3 juillet 1996.
Reste l'essentiel: la situation des travailleurs qui, parce qu'ils ont été mis en contact avec l'amiante, voient, dix ou quinze années plus tard, leur santé diminuée et leur avenir brisé. Aucun employeur n'accepte plus d'embaucher un salarié qui est resté plusieurs années au contact de l'amiante, car il prendrait le risque d'avoir dans l'effectif de son entreprise un homme dont la santé est potentiellement diminuée.
Les responsabilités sont diverses, puisque certains ont délibérément laissé des hommes en contact avec des produits qui génèrent à terme des maladies professionnelles dont nul ne conteste la gravité.
D'autres pays que la France ont été confrontés au même drame, l'Italie, notamment, qui a décidé d'anticiper la mise à la retraite des travailleurs de l'amiante.
Mes deux questions sont les suivantes:
Premièrement, le Gouvernement a-t-il l'intention de créer un statut des travailleurs de l'amiante ?
Deuxièmement, envisage-t-il de bonifier la durée de cotisation à l'assurance vieillesse pour faciliter l'accès à la retraite à taux plein des travailleurs de l'amiante, qui ont bien mérité qu'on s'occupe d'eux ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et du groupe de l'Union pour la démocratie française.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat à la santé.
M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé. Monsieur le député, l'amiante pose un problème de santé publique majeur puisque, selon le rapport de l'INSERM, entre 1 500 et 2 000 cas de maladies dues à l'amiante - asbestose, fibrose pulmonaire, cancer bronchique, mésothéliome - sont dénombrés chaque année dans notre pays. La progression, pour le mésothéliome, serait de 25 % tous les trois ans. C'est dire l'ampleur du problème.
Le rapport de l'INSERM a conclu que la majorité des cas de cancer pulmonaire étaient dus à une exposition directe. Les ouvriers ayant travaillé dans les mines d'amiante ou dans les usines de fabrication de matériaux incluant de l'amiante sont très menacés. Mais ce rapport fait aussi mention du risque lié à la respiration de fibres microscopiques répandues dans l'atmosphère des bâtiments construits avec de l'amiante, en particulier des bâtiments administratifs tels que les établissements d'enseignement ou les hôpitaux. L'existence de ce risque est contestée.
En Italie, une loi de 1992 donne droit, en effet, à une majoration des retraites pour les travailleurs victimes de l'amiante, mais le niveau d'indemnisation des maladies professionnelles y est très inférieur. Je rappelle en outre que les primes versées à ce titre en France continuent d'être servies après le départ à la retraite, ce qui n'est pas le cas en Italie.
Il n'empêche que les personnes atteintes de ces maladies doivent accomplir un véritable parcours du combattant pour prouver qu'elles ont été en contact avec l'amiante. Car c'est aux malades qu'incombe la charge de la preuve.
Avec Mme Martine Aubry, nous avons décidé de convoquer au mois de janvier le comité interministériel de l'amiante. Des mesures seront proposées à cette occasion, ainsi que dans le cadre de l'UNEDIC, pour favoriser la prise en charge des malades.
M. Jean-Yves Le Déaut. Très bien !
M. le secrétaire d'Etat à la santé. D'ores et déjà, les conclusions de l'office parlementaire présidé par M. Jean-Yves Le Déaut sont prises en compte. Nous avons décidé également, après avoir reçu à plusieurs reprises l'ANDEVA, l'Association nationale de défense des victimes de l'amiante, de faire droit à ses légitimes requêtes.
Tout sera fait pour que ces maladies professionnelles soient prises en charge au titre de la branche accidents du travail et non pas seulement au titre de l'assurance maladie, comme c'est très souvent le cas aujourd'hui. C'est pourquoi, j'y insiste, nous serons très attentifs aux discussions qui auront lieu dans le cadre de l'UNEDIC.
Enfin, Martine Aubry et moi-même avons décidé de nommer un responsable pour que l'évolution des connaissances sur les maladies dues à l'amiante soit prise en compte. C'est le professeur Claude Got qui sera chargé, avec un groupe d'experts, non pas de réaliser une expertise supplémentaire, mais d'ajuster les décisions à prendre aux connaissances scientifiques. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Données clés

Auteur : M. Alain Tourret

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Risques professionnels

Ministère interrogé : santé

Ministère répondant : santé

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 11 décembre 1997

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