durée du travail
Question de :
Mme Paulette Guinchard
Doubs (2e circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 11 décembre 1997
M. le président. La parole est à Mme Paulette Guinchard-Kunstler.
Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Madame la ministre de l'emploi et de la solidarité, vous avez placé l'emploi au coeur de votre action, d'abord en organisant un dispositif sur l'emploi des jeunes, puis en présentant ce matin en conseil des ministres un projet de loi sur la réduction du temps de travail.
Ce texte participe d'un véritable projet de société: replacer l'homme au coeur de l'économie, partager le travail, créer des emplois. C'est sur cette dernière dimension que l'urgence de la situation nous oblige à mettre l'accent.
Les modalités d'organisation du temps de travail ont, depuis une dizaine d'années, profondément évolué: temps partiel subi, contrats de courte durée, fractionnement et flexibilité des horaires. Il est temps d'inscrire ces mutations dans le cadre d'une politique économique qui s'inspire d'une volonté de partage du travail et de création d'emplois.
Le débat autour de la lutte contre le chômage nourrit en permanence une controverse entre les partisans de la croissance et les tenants de la réduction du temps de travail. Cette opposition n'a aucun fondement.
M. Jean-Michel Ferrand. C'est une question ou une profession de foi ?
Mme Paulette Guinchard-Kunstler. L'histoire économique nous apprend que nous avons toujours relié la croissance économique et la réduction du temps de travail. Les deux sont évidemment complémentaires et forment le socle de votre politique. («La question !» sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.)
M. le président. Pouvez-vous poser votre question, madame ?
Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Il est donc essentiel d'aller plus loin grâce à un dispositif de réduction du temps de travail, dispositif législatif qui devra mobiliser toutes les parties prenantes: chefs d'entreprise, salariés, syndicats.
M. Philippe Auberger. Baratin !
M. Jean-Michel Ferrand. La question, monsieur le président !
Mme Paulette Guinchard-Kunstler. Pouvez-vous, madame la ministre, nous éclairer sur les grands axes de ce projet de loi qui devra être fondé sur le dialogue social et permettre la création d'emplois ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Comme vous venez de le dire, madame la députée, le Gouvernement qui, par la voix du Premier ministre, a annoncé que l'emploi serait sa priorité n° 1, a effectivement décidé d'emprunter toutes les pistes susceptibles de remettre notre pays sur le chemin de l'emploi.
Il s'agit d'abord de favoriser la croissance en relançant la consommation, en équilibrant mieux les prélèvements sur le travail et sur le capital, en faisant émerger les métiers de demain: nouvelles technologies et nouveaux services. Il convient aussi d'aider les petites et moyennes entreprises à créer des emplois. Enfin, il faut s'engager dans la voie de la réduction de la durée du travail.
Certes, il n'est pas facile de changer les habitudes, pour les chefs d'entreprise qui organisent le travail comme pour les salariés. Mais il est vrai aussi que nos concitoyens attendent que l'emploi soit notre priorité et que nous ne laissions de côté aucune solution.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a décidé de présenter au Parlement ce projet de loi d'orientation et d'incitation qui montre la voie en fixant au 1er janvier 2000 la date d'application des 35 heures dans les entreprises de plus de vingt salariés, tout en leur laissant une grande souplesse quant au choix des moyens, puisque les modalités de la réduction de la durée du travail, de même que les modalités de compensation, seront renvoyées à la négociation.
Telle est notre conviction, partagée sans aucun doute par les 1 500 chefs d'entreprise qui ont signé un accord en la matière cette année et par tous ceux qui s'attachent à la réalité du projet de loi au lieu de s'en tenir à certains slogans qui ont parcouru notre pays. Ils se disent qu'il s'agit pour leur entreprise d'une opportunité qui peut leur permettre de gagner en compétitivité, en essayant d'être plus réactifs par rapport à leurs clients, de mieux utiliser les machines et de davantage moduler le travail.
Cette évolution sera aussi une chance pour les salariés qui auront une durée du travail moins longue et des conditions de vie meilleures, ainsi que pour les chômeurs.
Pour la mener à bien, nous devons faire confiance aux chefs d'entreprise et aux organisations syndicales. Comme vous le savez, l'Etat a décidé d'accompagner ce mouvement en aidant financièrement ceux qui iront plus vite et plus loin. A la fin de 1999, il tirera les conséquences des négociations et fixera de façon précise les règles du passage aux trente-cinq heures avant le 1er janvier 2000 en prenant en compte la situation économique.
Nous engageons aujourd'hui en France un chantier formidable, qui peut être une source d'espoir pour des centaines de milliers de chômeurs. Il appartient désormais aux chefs d'entreprise et aux salariés de prendre leurs responsabilités. Plus je les rencontre, plus j'ai l'assurance qu'ils ne décevront pas ceux qui attendent aujourd'hui aux portes des entreprises. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Auteur : Mme Paulette Guinchard
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Travail
Ministère interrogé : emploi et solidarité
Ministère répondant : emploi et solidarité
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 11 décembre 1997