Question au Gouvernement n° 2607 :
politique économique

11e Législature

Question de : M. Jean-Claude Lefort
Val-de-Marne (10e circonscription) - Communiste

Question posée en séance, et publiée le 31 janvier 2001

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lefort, pour le groupe communiste.
M. Jean-Claude Lefort. Monsieur le président, tout d'abord, du fond du coeur, un mot sur le terrible tremblement de terre survenu en Inde, qui appelle la solidarité de notre pays.
Monsieur le secrétaire d'Etat au commerce extérieur, deux réunions internationales majeures viennent de se tenir, qui témoignent des temps nouveaux dans lesquels nous sommes entrés, l'une dans le froid et sous haute protection à Davos en Suisse, l'autre dans une chaleureuse ambiance à Porto Alegre, la ville joyeuse du Brésil.
La première réunissait les dirigeants économiques et politiques de la planète, qui entendent la dominer encore, la seconde des dizaines de milliers d'hommes et de femmes, dont beaucoup de jeunes, venus de 120 pays, des milliers de municipalités, dont celle de Saint-Denis - dont Patrick Braouezec est le maire -, 400 parlementaires, tous présents pour refuser l'insupportable libéralisme mondialisé (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) qui provoque tant de dégâts humains et écologiques.
M. Eric Doligé. Vive les communistes !
M. Jean-Claude Lefort. Depuis Seattle, le mouvement contre la mondialisation libérale a fait du chemin. Il est passé du rassemblement autour du seul «non» à une volonté de définir des alternatives à la situation actuelle. La tâche est considérable mais indispensable.
Certes quelques tentatives politiciennes sont à l'oeuvre dans ce contexte, mais elles sont loin de grandir leur auteurs.
Par ailleurs, chacun a noté que seule la France avait envoyé deux
ministres à Porto Alegre. Vous vous êtes, monsieur le secrétaire d'Etat au commerce extérieur, nettement exprimé dans cette ville devant un auditoire particulièrement attentif. Vous avez néanmoins déclaré que les ministres français présents à Davos, du moins ceux qui ont pu rejoindre cette ville, tenaient le même discours que vous.
M. Eric Doligé. C'est dur, le grand écart !
M. Jean-Claude Lefort. A Porto Alegre ont été discutées des propositions comme la taxe Tobin, la reconversion de la dette des pays pauvres en programmes sociaux, l'accès de tous aux médicaments, la démocratie participative. Je doute que de telles idées aient été débattues à Davos.
Monsieur le secrétaire d'Etat, quelle synthèse existe-t-il pour vous entre Davos et Porto Alegre ?
Enfin, comment imaginer que la prochaine conférence de l'OMC puisse se tenir dans un pays qui est un émirat, je veux parler du Qatar ?
Refusons le Qatar, monsieur le secrétaire d'Etat ! Refusons de nous trouver devant des problèmes très sérieux dont l'OMC ne sortira pas grandie ! (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, et du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur quelques bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat au commerce extérieur.
M. François Huwart, secrétaire d'état au commerce extérieur. Monsieur le député, je suis tenté de vous répondre que la synthèse entre les deux forums, c'est aussi celle que les organisations non gouvernementales sont capables de trouver entre elles.
Pour sa part, le Gouvernement - vous le savez mais je vous le redis - est à l'écoute de toutes les ONG et, cela va de soi, des parlements. Mais c'est dans la clarté que les rôles doivent être réaffirmés: aux gouvernements, qui ont la légitimité pour le faire, celui d'assumer dans les instances internationales de négociation des positions définies à l'écoute de tous; à la société civile d'exprimer sa diversité en l'organisant sur des propositions alternatives.
Le Gouvernement veut une mondialisation plus solidaire avec des règles prenant en compte les questions de pauvreté, de dette, de médicaments, d'environnement et de sécurité alimentaire. A Davos comme à Porto Alegre, avec des acteurs et des accents certes différents, toutes ces questions étaient à l'ordre du jour. Et je veux vous dire que des passerelles peuvent être jetées entre des gouvernements d'opinions souvent plus diverses qu'on ne le dit et des ONG elles-mêmes traversées de courants souvent contradictoires.
Je ne veux donc pas céder à la caricature d'une réalité trop complexe pour être décrite de façon lapidaire.
«Un autre monde est possible» nous ont déclaré les organisateurs à Porto Alegre. Le Gouvernement considère qu'une autre mondialisation est possible et il y travaille tous les jours.
Ces organisations ont montré qu'elles savaient mobiliser leurs sympathisants. Pour sa part, le Gouvernement a montré qu'il savait les écouter et qu'il acceptait le dialogue, où qu'il soit. C'est pour cette raison que le Premier ministre nous a demandé d'oeuvrer pour une OMC plus légitime, plus transparente et plus démocratique.
Quand à la question concernant l'organisation de la prochaine réunion au Qatar, je parlais tout à l'heure de complexité et ce choix en est bien l'illustration. D'une part, le Qatar est le seul candidat. D'autre part, je vous rappelle que, en avril dernier, le G 77 élargi, c'est-à-dire 100 pays en développement réunis à La Havane, ont soutenu cette candidature.
Naturellement, le Gouvernement partage vos préoccupations et, à travers ses représentants, a constamment exprimé son souci que la liberté et la transparence puissent accompagner la prochaine session de l'OMC. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, citoyen et vert.)
M. Eric Doligé. C'est vraiment parler pour ne rien dire !

Données clés

Auteur : M. Jean-Claude Lefort

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Relations internationales

Ministère interrogé : commerce extérieur

Ministère répondant : commerce extérieur

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 31 janvier 2001

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