illettrisme
Question de :
M. Alain Cousin
Manche (3e circonscription) - Rassemblement pour la République
Question posée en séance, et publiée le 1er février 2001
M. le président. La parole est à M. Alain Cousin, pour le groupe du RPR.
M. Alain Cousin. Ma question s'adresse à M. le Premier ministre, dans la mesure où elle me permet d'interpeller l'ensemble de son gouvernement.
Selon l'INSEE, 2 300 000 Français ont aujourd'hui des difficultés à parler, lire ou écrire la langue de la vie courante. Les journées d'appel de préparation à la défense ont en outre permis de révéler que 10 % des jeunes âgés d'environ dix-sept ans rencontrent de graves difficultés de lecture. Comment voulez-vous que ces jeunes qui ne savent ni compter, ni lire, ni écrire puissent espérer un jour trouver du travail ? Alors même que de très nombreux artisans, notamment dans les secteurs du bâtiment, de la restauration et de l'hôtellerie, cherchent désespérément à embaucher. La dignité de ces jeunes est définitivement mise à mal. Il est impérieux de tout mettre en oeuvre dès maintenant pour donner aux jeunes une vraie chance car ce sont souvent les situations de désespoir qui mènent à l'escalade de la violence à laquelle nous sommes chaque jour davantage confrontés.
Trop longtemps, vous vous êtes voulus les soutiens indéfectibles du slogan: «Il est interdit d'interdire.» Les jeunes vous ont crus, voilà le résultat ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) Vous savez qu'il ne suffira pas de demander à des associations, qui réalisent au demeurant un travail exemplaire, de corriger le tir. C'est en amont qu'il faut agir, notamment en donnant enfin aux enseignants les moyens d'affirmer les valeurs de la République dans nos écoles. Du fait de cet illettrisme, ne vous en déplaise, trop de jeunes ne trouvent pas leur place, leur part dans notre société, et leur dignité d'être humain s'en trouve bafouée.
68 Monsieur le Premier ministre, qu'allez-vous nous proposer de véritablement offensif pour lutter contre ce fléau qu'est l'illettrisme ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Mélenchon, ministre délégué à l'enseignement professionnel (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République) pour une réponse rapide. Un slogan suffira ! (Sourires.)
M. Jean-Luc Mélenchon, ministre délégué à l'enseignement professionnel. Avant de protester, ayez au moins la patience d'attendre ma réponse. Je n'ai pas encore ouvert la bouche ! (Sourires.)
Cela dit, monsieur le président, je vais tâcher d'être bref. Vous avez mille fois raison, monsieur le député, de dire que c'est par la valorisation et le respect de soi-même que l'individu est capable de s'élever dans la société et de renoncer aux comportements de violence barbare auxquels nous sommes si souvent confrontés.
Dès lors, que devons-nous faire, sinon réparer ? Car si vous y réfléchissez, vous constaterez que les jeunes dont vous évoquez les comportements...
M. François Rochebloine. De mai 68 !
M. le ministre délégué à l'enseignement professionnel. ... sont nés et ont été élevés dans le creux de la crise qu'a connue notre pays. Nous sommes donc, en quelque sorte, aujourd'hui face aux conséquences de cette période terrible.
Encore une fois, que devons-nous faire ? A cette question, il existe des réponses de court terme, celles du moment que nous affrontons, et des réponses de long terme. Le temps qui m'est imparti ne me permet que de dire la chose suivante: nous avons inversé une tendance dont il est temps de reconnaître qu'elle était extrêmement dommageable. En effet, trop longtemps, on a cru qu'en maintenant les effectifs, qui sont à la base des moyens que nous déployons, tandis que s'opérait la baisse démographique, les choses iraient leur cours et que cela suffirait.
Nous avons donc renversé la tendance en nous appuyant à la fois sur la baisse démographique et sur une augmentation considérable des moyens mis en oeuvre; et l'amélioration de l'encadrement devrait produire ses effets.
Monsieur le député, vous devez savoir que le Gouvernement partage votre préoccupation concernant l'enseignement des valeurs morales de la République. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
M. Lucien Degauchy. Non ! Pas vous...
M. le ministre délégué à l'enseignement professionnel. Si, monsieur: les valeurs morales de la République, les vertus républicaines du travail et du respect des autres. Nous avons institué cette année, pour la première fois, dans tous les établissements, un enseignement civique, juridique et social; nous avons consacré à cette matière moyens et horaires. Et si vous m'interrogez de nouveau, je vous donnerai davantage de détails sur le plan très cohérent et très ample que nous avons mis en oeuvre. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Auteur : M. Alain Cousin
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Enseignement
Ministère interrogé : enseignement professionnel
Ministère répondant : enseignement professionnel
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 1er février 2001