Question au Gouvernement n° 268 :
ex-Yougoslavie

11e Législature

Question de : M. Arthur Paecht
Var (7e circonscription) - Union pour la démocratie française

Question posée en séance, et publiée le 17 décembre 1997

M. le président. La parole est à M. Arthur Paecht.
M. Arthur Paecht. Je ne ferai pas comme M. Pandraud et je me permettrai d'interroger à nouveau M. Jospin sur l'affaire du tribunal pénal international.
Monsieur le Premier ministre, vous avez eu tout à fait raison de souligner que la France a participé d'une manière extrêmement importante aux actions internationales dans l'ex-Yougoslavie.
Vous avez eu raison de rappeler, on ne le fait jamais assez, le lourd tribut que nos troupes ont payé - 70 tués et 700 blessés - les sacrifices que nos troupes ont consentis. Nous devons tous ensemble, encore une fois, rendre hommage à nos militaires au moment même où les feux de l'actualité internationale ne portent pas forcément sur l'ex-Yougoslavie.
Vous avez eu raison, monsieur le Premier ministre, de rappeler que c'est bien la France qui, la première, a voulu que l'on crée le tribunal pénal international afin d'y déférer les criminels de ce territoire, face d'ailleurs à l'indifférence quasi générale ou à la lassitude générale des autres pays qui nous entourent.
C'est pourquoi je m'interroge avant tout sur les raisons qui ont poussé Mme Arbour, le procureur général du tribunal pénal international, pour remettre en cause l'action passée et présente de nos hommes. Vous avez dit, et vous avez raison, que c'est inacceptable. J'ajoute que c'est surtout profondément injuste.
M. Laurent Dominati. Très bien !
M. Arthur Paecht. Nous avons pris acte des déclarations du Gouvernement. Mais, après les déclarations, il y a les actions. On sait très bien où sont les criminels, qui ils sont, et on sait aussi de quelle manière ils sont protégés, pour ne pas dire qu'ils sont invulnérables. Pour les déloger, il faut de véritables opérations militaires, avec des risques importants que nous ne pouvons pas courir seuls.
Ma question, monsieur le Premier ministre, est la suivante: après le moment des déclarations, quelles sont maintenant les initiatives que vous allez prendre afin que le tribunal pénal international puisse accomplir effectivement sa mission ? Cela suppose des conversations extrêmement serrées avec nos partenaires sur l'art et la manière d'engager les actions qui vont effectivement déférer au tribunal pénal international ceux qui devraient y être depuis longtemps.
Je n'accuse personne et surtout pas le Gouvernement de la France. Je pose simplement la question parce que nous ne pouvons pas en rester là, nous ne pouvons pas accepter que l'on jette l'opprobre sur la France qui, dans ce domaine, n'a rien à se reprocher. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française, du groupe du Rassemblement pour la République et sur divers bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Lionel Jospin, Premier ministre. Monsieur le député, vous avez bien voulu approuver l'essentiel des termes de ma réponse. Moi-même, je me sens parfaitement en accord avec les termes de votre question.
Je crois avoir déjà répondu en ce qui concerne la façon dont la France peut réagir en allant plus loin. Ces questions engageant l'ensemble des autorités publiques, engageant la France et, au premier chef, le Président de la République, vous comprendrez que le représentant du Gouvernement que je suis ici ait besoin d'en conférer avec celui-ci.
Il peut y avoir débat avec le tribunal pénal international sur la façon dont la France coopère en fonction de son droit et avec le souci d'éviter que des confusions ne s'établissent aux yeux de l'opinion publique dans la façon dont sont traités les témoins par rapport à d'autres. Mais notre volonté de coopération est entière. J'ai dit que j'étais prêt personnellement à examiner le cadre dans lequel cela peut évoluer et que le Gouvernement en parlerait avec le Président de la République.
Ce que nous n'avons pas accepté, ce sur quoi la représentation nationale doit être au clair et rassurée, ce à propos de quoi l'opinion française ne doit pas être dans le trouble, c'est qu'il n'y a rien qui autorise quiconque à dire qu'il y aurait impunité pour les criminels dans une zone qui serait une zone française, d'abord, parce qu'il n'y a pas de zone française, et que si les Français sont là où ils sont, c'est parce qu'ils étaient les premiers à être dans les lieux mêmes où il y avait le maximum de tensions, de dangers et de crimes. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste, du groupe Radical, Citoyen et Vert, sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française et sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
L'ensemble de la conduite et du maintien des forces d'interposition et de paix relève de la SFOR, relève d'un commandement intégré et non d'une politique qui serait celle soit des autorités françaises, soit des militaires français sur place.
En ce qui concerne la recherche des criminels à laquelle la France entend apporter tout son concours, cela relève aussi de discussions qui sont menées entre plusieurs pays à des niveaux qu'il n'est pas d'ailleurs nécessaire d'évoquer ici publiquement et engage solidairement chacun de ces pays.
L'idée qu'on voudrait introduire dans l'opinion publique française qu'il y aurait une politique particulière de nos troupes, ou une politique particulière de la France, ne correspond en rien à la réalité.
J'ai été heureux d'entendre le secrétaire général de l'OTAN le confirmer. J'ai été heureux que le porte-parole officiel de l'état-major américain le dise. J'ai été moins heureux d'entendre une source toute récente sembler indiquer qu'il faudrait peut-être que la France fasse ce qu'elle a à faire du côté du département d'Etat américain. Nous en parlerons avec nos amis. Chacun au niveau des chefs d'Etat ou de Gouvernement est parfaitement au fait des conditions dans lesquelles sont pensés un certain nombre de projets, des difficultés qui s'opposent éventuellement à leur réalisation ainsi que de la solidarité de tous dans la volonté de pourchasser les criminels. Nous n'accepterons pas que notre pays soit, de ce point de vue, désigné injustement à la critique publique. (Applaudissement sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste, du groupe Radical, Citoyen et Vert, sur de nombreux bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française et sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

Données clés

Auteur : M. Arthur Paecht

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Politique extérieure

Ministère interrogé : Premier Ministre

Ministère répondant : Premier Ministre

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 17 décembre 1997

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