Question au Gouvernement n° 2688 :
commerce international

11e Législature

Question de : M. François Asensi
Seine-Saint-Denis (11e circonscription) - Communiste

Question posée en séance, et publiée le 5 avril 2001

M. le président. La parole est à M. François Asensi, pour le groupe communiste.
M. François Asensi. Monsieur le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, depuis quatre ans, le Gouvernement a mis en oeuvre des dispositions importantes qui ont permis des avancées sociales, la décrue du chômage et l'engagement de réformes sociétales.
Pourtant, la France subit les effets pernicieux de la mondialisation des économies et du modèle libéral, ce qui a des conséquences directes sur la vie des Français. En témoigne la vague de licenciements décidés brutalement par les états-majors de multinationales comme Danone ou Marks & Spencer.
En outre, la persistance de l'exclusion et la vitalité de l'économie souterraine marquent les limites actuelles de l'intervention publique. Cela vaut même pour votre gouvernement qui, dans le cadre contraint de ses choix en matière de redistribution, se borne à de simples ajustements alors qu'il faudrait redimensionner le partage du bien commun pour répondre à l'attente sociale.
M. Yves Fromion. C'est vrai !
M. François Asensi. Le mouvement de concentration des firmes transnationales, les incertitudes sur l'évolution de la législation du travail en Europe font craindre pour l'avenir des salariés des start-up comme des grandes entreprises mondiales. Le modèle productiviste et financier menace les politiques publiques, les fondements démocratiques en Europe, les équilibres écologiques.
Cette pression de la financiarisation capitalistique atteint tous les gouvernements sauf l'administration états-unienne, qui entend accélérer ce processus. La relance par le président Bush de la course aux armements, le refus d'adhérer aux accords de Kyoto et son choix, par conséquent, d'accentuer la pollution de la planète confortent la position des multinationales dans leur cynisme et la recherche effrénée de positions dominantes alors que de nouveaux modes de développement durable sont nécessaires pour les peuples du Nord et du Sud...
M. Roland Vuillaume. La question !
M. François Asensi. ... et non la dictature des laboratoires pharmaceutiques qui empêche l'Afrique du Sud d'avoir des médicaments génériques pour lutter contre le sida.
Dans ce contexte, je demande au Gouvernement quelles initiatives il va prendre pour assurer la prééminence des politiques publiques en France et en Europe, pour apporter des réponses concrètes aux attentes de nos concitoyens, fragilisés par la mondialisation financière, pour donner un sens plus solidaire à l'action de la France dans les instances internationales, notamment l'OMC, pour donner plus de poids à l'Europe de la paix, afin de nous inscrire dans une autre logique de développement et dans le respect de l'environnement ! (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le député, votre question est très vaste et vous comprendez que je ne puisse pas répondre à tout en deux minutes et demi. Je traiterai donc surtout de la mondialisation qui me semble en avoir constitué la trame.
La mondialisation, l'internationalisation, est un fait. La question est de savoir si elle doit être financière, ce que nous ne pensons pas, ou si elle doit être humaine, pour employer un terme qui sera parlant pour chacun.
A ce propos je veux d'abord souligner qu'il ne faut pas se livrer à des attaques purement démagogiques contre la mondialisation ; vous ne l'avez d'ailleurs pas fait. En effet, l'internationalisation, qui existe notamment dans le domaine économique, a aussi des aspects positifs. Ainsi, les investissements étrangers en France ont représenté plus de 30 000 emplois l'an dernier. De même, dans votre département, la Seine-Saint-Denis, Citroën ne fonctionnerait pas aussi bien s'il ne pouvait pas exporter et vous bénéficiez de la présence d'entreprises comme IBM, Canon et Panasonic.
M. Dominique Dord. Exactement !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Pour répondre à votre question précise de savoir ce que peut faire la France pour humaniser cette mondialisation, je vais prendre quelques exemples.
En matière d'environnement la critique que vous portez contre l'attitude de la nouvelle administration américaine est totalement partagée par le Gouvernement. Il nous semble que les Etats-Unis d'Amérique ont adopté une position à courte vue qui fait peu de cas de la réalité et de l'avenir de la planète. Le Gouvernement français s'opposera donc résolument à cette position. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste, du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
En ce qui concerne les services publics je vous rappelle que lors d'une réunion qui s'est tenue à Stockholm il y a deux semaines en présence du Président de la République et du Premier ministre, la France s'est opposée à une dérégulation sauvage des secteurs de la poste et de l'énergie. Nous considérons en effet que les services publics doivent avoir toute leur place pour équilibrer la réalité humaine dans un pays comme la France. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
Mon troisième exemple, qui relève directement de ma compétence, est la régulation financière, la régulation économique. A cet égard se déroulera bientôt à Washington une réunion du FMI et de la Banque mondiale. A cette occasion la France proposera de nouvelles initiatives afin d'orienter l'action de ces institutions dans le sens auquel nous croyons, vous et nous. En effet si nous savons qu'il faut tenir compte des réalités économiques et financières, nous tenons à ce que le primat de la dimension humaine ne soit jamais oublié. Bref nous ne faisons preuve ni de résignation face à cette réalité ni de démagogie, mais nous prônons une mondialisation humanisée. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Rires et exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

Données clés

Auteur : M. François Asensi

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Relations internationales

Ministère interrogé : économie

Ministère répondant : économie

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 avril 2001

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