inondations
Question de :
M. Francis Hammel
Somme (4e circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 18 avril 2001
M. le président. La parole est à M. Francis Hammel.
M. Francis Hammel. Monsieur le Premier ministre, depuis trois semaines, une soixantaine de communes du département de la Somme sont sous les eaux. Lors de votre visite à Abbeville, nous avez démenti une rumeur
insensée, orchestrée par un mouvement extrémiste bien connu dans notre région, selon laquelle Paris aurait inondé la province. Il fallait la démentir; il faut continuer à le faire. Reste qu'un inventaire exhaustif des causes de cette montée des eaux et une information la plus claire possible de la population sont indispensables.
Sans qu'il soit besoin d'études préalables, nous connaissons tous parfaitement la cause majeure, qui est due à la combinaison, après des pluies à caractère inhabituel, de trois phénomènes: crue de la rivière Somme, crue des étangs et des marais, crue des nappes phréatiques.
Vous avez pu le constater, monsieur le Premier ministre: le département est dans une situation catastrophique. Plus de 2 500 maisons inondées, environ 1 000 habitations évacuées, des dizaines d'hectares de champs et de prairies envahi par les eaux, des entreprises au chômage technique, une saison touristique perdue; bref, un véritable drame pour un département déjà durement éprouvé par une situation économique plus que difficile.
Face à une population en état de choc et à la montée inexorable de l'eau, les élus, les services municipaux, les pompiers, les militaires et les associations caritatives font preuve d'efficacité, de compétence, de générosité et de solidarité.
Trois temps fondamentaux sont maintenant devant nous. D'abord, celui de la gestion de la situation actuelle pour aider matériellement et moralement les sinistrés, maintenir l'activité économique, rétablir autant que possible les réseaux de communications, rassurer le monde rural et les agriculteurs. Viendra ensuite le temps de la décrue,...
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance. Et de la question !
M. Francis Hammel. ... pendant lequel, au-delà des remboursements par les compagnies d'assurances, la nécessaire solidarité nationale devra s'exercer avec autant, sinon davantage d'ampleur qu'aujourd'hui. Enfin, celui de la réflexion et d'une action très forte pour lutter, et surtout prévenir, afin d'éviter que pareille catastrophe ne se reproduise. Mais, dès à présent, monsieur le Premier ministre, pourriez-vous nous faire part des mesures immédiates que le Gouvernement entend prendre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre.
M. Lionel Jospin, Premier ministre. Monsieur le député, nombre de nos compatriotes de la Somme vivent aujourd'hui, vous l'avez rappelé, une situation dramatique, d'autant plus dramatique que, du fait de la lenteur de la décrue des eaux elle dure plus longtemps en Bretagne qu'ou en Normandie.
Je me suis rendu sur place, accompagné par le ministre de l'intérieur. Vous étiez là, ainsi que deux autres parlementaires de la majorité. Nous nous sommes trouvés face à des gens choqués, un peu désespérés et de surcroît bouleversés par une rumeur que nous avons dû démentir et que tout, à l'évidence, dément, mais qui a expliqué la force de leur émotion. Encore fallait-il y être et nous y étions, assumant notre devoir de solidarité, même si le contact n'était pas facile. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Aujourd'hui, la décrue semble amorcée, mais celle-ci sera lente en raison des conditions météorologiques que vous avez rappelées.
M. Gilles de Robien. Amorcée ? Mais c'est faux !
M. le Premier ministre. Tant mieux si elle est plus brève mais pour ce qui me concerne, je préfère rester prudent ! (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Quoi qu'il en soit, il est essentiel que le Gouvernement continue à mobiliser l'ensemble des moyens mis en oeuvre et tire par ailleurs des leçons de ces événements catastrophiques. Huit cents personnels civils et militaires sont en permanence sur le terrain: je veux rendre hommage à leur dévouement et à leur professionnalisme. Une aide d'urgence, initialement destinée à de petits achats pour les gens les plus en difficulté, avait été dégagée pour un montant de 600 000 francs. Celui-ci a d'ores et déjà été doublé et porté à 1 200 000 francs et cette aide pourra être encore réévaluée à la mesure des demandes des gens plongés dans une situation particulière de détresse.
Je veux maintenant annoncer qu'une somme de 20 millions de francs sera dégagée par le Gouvernement pour venir en aide aux communes afin, notamment, de réparer les bâtiments publics et rétablir les routes; ce sera là un élément de solidarité nationale tout à fait important. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Des aides seront naturellement accordées aussitôt que l'état de catastrophe naturelle aura été déclaré par la commission compétente, qui devrait se réunir le 25 avril; il faut évidemment attendre cette date pour avoir une appréciation réelle des dégâts. De la même manière, au titre des calamités agricoles, un effort pourra être fait en faveur de l'hortillonage notamment, qui intéresse la ville d'Amiens, mais aussi, grâce aux fonds du FISAC, en faveur des artisans et des petites entreprises contraintes au chômage technique.
Je tiens d'ailleurs, à cette occasion, à saluer le mouvement spontané de solidarité qui s'est exprimé chez les habitants de la grande région Nord et de la Picardie, mais également dans nombre d'autres villes et communes de France. Ces mouvements spontanés de la population, qui viennent prolonger l'effort de l'Etat, sont eux aussi nécessaires.
Il nous faut maintenant essayer de tirer des leçons utiles de cette catastrophe, certes exceptionnelle, due à une pluviosité très forte. Aussi ai-je souhaité qu'une mission d'expertise, composée de spécialistes de haut niveau, analyse les causes de ces inondations et propose des mesures. Cette mission a été constituée, elle est déjà sur le terrain et travaille. Comme l'ont demandé les élus de la Somme, des experts locaux seront associés à ses travaux, il est prévu qu'elle rende ses premières conclusions au mois de mai.
Par ailleurs, le comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire, dont la réunion aura lieu comme prévu en juillet, avait déjà à son ordre du jour, entre autres points, l'examen des problèmes du bassin de la Somme. Les événements récents auront rendue cette question, si j'ose dire, encore plus d'actualité.
Sur la base des propositions de la mission d'expertise, les mesures de prévention indispensables seront décidées le plus rapidement possible, en concertation, bien sûr, avec les élus locaux et les collectivités locales qui, elles-mêmes, doivent assumer leurs responsabilités. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Auteur : M. Francis Hammel
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Sécurité publique
Ministère interrogé : Premier Ministre
Ministère répondant : Premier Ministre
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 18 avril 2001