Question au Gouvernement n° 284 :
euro

11e Législature

Question de : M. Pierre Carassus
Seine-et-Marne (3e circonscription) - Radical, Citoyen et Vert

Question posée en séance, et publiée le 8 janvier 1998

M. le président. La parole est à M. Pierre Carassus.
M. Pierre Carassus. Monsieur le ministre chargé des affaires européennes, le soutien apporté au mouvement des chômeurs par une grande partie de l'opinion témoigne de la légitime angoisse des Français face au chômage de masse. Si le Gouvernement se doit de répondre à l'urgence des situations les plus précaires, il doit surtout mener une politique hardie en faveur de l'emploi.
A cet égard, l'emploi des jeunes, la loi sur les 35 heures, le soutien à la croissance constituent des avancées positives que les députés du Mouvement des citoyens approuvent. Mais pour réussir dans la durée, le gouvernement de gauche plurielle doit parvenir à réorienter la construction européenne.
D'ailleurs, il est un peu curieux que, parmi les soutiens les plus tapageurs aux occupants des antennes d'ASSEDIC, aucun ne fasse le lien entre le chômage de masse dont a hérité ce gouvernement il y a sept mois. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française)...
M. François Vannson. Et en 1993 ?
M. Pierre Carassus. ... et la politique économique et sociale menée depuis des années au nom d'une certaine construction européenne.
A quelques mois de la date théorique des choix des pays qui entreront dans l'euro, le peuple français demeure très mal informé sur les enjeux véritables.
Quelle politique économique et sociale de gauche, s'attaquant vraiment au chômage, peut-on mettre en oeuvre durablement en France sans modifier en profondeur la logique libérale de la construction européenne ?
Comment contrebalancer le poids d'une banque centrale européenne toute-puissante, qui sera indépendante des gouvernements mais pas des marchés financiers, et ce qu'elle soit dirigée par le candidat de l'Allemagne ou par M. Trichet ?
Comment répondre, demain, aux futures secousses sociales, lorsque nous serons prisonniers du pacte de stabilité, qui risque de limiter totalement les marges de manoeuvres budgétaires du gouvernement élu par le peuple ?
Monsieur le ministre, comptez-vous associer le peuple français à une réflexion citoyenne sur les enjeux réels de la construction européenne ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le président. La question de M. Carassus a duré deux minutes trente. Il reste exactement le même temps pour la réponse.
La parole est à M. le ministre délégué chargé des affaires européennes.
M. Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes. Monsieur le député, vous avez souligné qu'il était urgent d'apporter des réponses au chômage. Le Gouvernement s'y emploie. Il répond aux situations d'urgence par des mesures qui ont été annoncées. Il s'efforce aussi d'engager une autre politique pour l'emploi à travers le projet relatif aux trente-cinq heures, dont le Parlement aura à débattre, le plan pour l'emploi des jeunes, et la relance de la croissance, qui commence à porter ses fruits. Sur tous ces points, je partage votre point de vue.
En revanche, en tant que ministre chargé des affaires européennes, si je suis également sensible à certaines dérives d'une Europe libérale, je ne peux accepter que l'on fasse de l'Europe le bouc émissaire de toutes les peurs françaises. Depuis qu'il est en fonction, le Gouvernement s'efforce précisément de rééquilibrer la construction européenne.
Il le fait tout d'abord à travers la résolution sur la croissance et l'emploi obtenue lors du fameux sommet d'Amsterdam, qui a permis que se tienne à Luxembourg un sommet spécifiquement consacré à l'emploi, au cours duquel ont été définis des objectifs pour l'emploi, comme l'ont été hier des critères monétaires et financiers pour Maastricht. Oui, cela sera décliné à travers des plans d'actions nationaux, le premier étant présenté dans six mois à Cardiff. Bien sûr, la France présentera le sien.
Par ailleurs, nous avons le souci de faire en sorte que la Banque centrale européenne indépendante ne vive pas en apesanteur. C'est pourquoi nous avons insisté - et notamment le ministre des finances - pour que soit mis en place un conseil de l'euro, autorité politique à même de dialoguer avec la Banque sur les objets particuliers. C'est là une disposition fondamentale dont on ne mesure pas encore tous les nombreux effets.
D'ores et déjà, nous avons le sentiment que la construction européenne est réorientée dans un sens plus favorable à la croissance et à l'emploi. L'Europe pour laquelle nous nous battons commence à toucher la conscience de nos partenaires européens. Elle change et la mise en place de l'euro, positive pour l'emploi, ne se réalisera pas exactement dans les mêmes conditions que celles dans lesquelles elle devait se faire lorsque nous avons pris les responsabilités du Gouvernement.
Enfin, vous vous êtes interrogé sur le débat devant les Français. Eh bien, il y aura un débat citoyen sur le traité d'Amsterdam et au moment du passage à la monnaie unique. Nous verrons quelles en seront les modalités. En tout cas, le Parlement y sera étroitement associé. Après tout, il est le meilleur représentant du peuple français ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. Robert Pandraud. Vive le référendum !

Données clés

Auteur : M. Pierre Carassus

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Union européenne

Ministère interrogé : affaires européennes

Ministère répondant : affaires européennes

Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 8 janvier 1998

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