durée du travail
Question de :
M. Arthur Paecht
Var (7e circonscription) - Union pour la démocratie française-Alliance
Question posée en séance, et publiée le 13 juin 2001
M. le président. La parole est à M. Arthur Paecht, pour le groupe UDF.
M. Arthur Paecht. M. le président, ma question s'adresse à M. le ministre délégué à la santé.
Monsieur le ministre et cher confrère, si vous me permettez de m'adresser à vous ainsi, ... («Ah !» sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)
M. Bernard Kouchner, ministre délégué à la santé. Certainement, monsieur le député.
M. Arthur Paecht. ... hier soir, une personne proche de l'un des nôtres a été transportée au service des urgences de l'hôpital Georges-Pompidou à Paris. En y arrivant, elle a vu placardé cet avis: «Vous êtes en danger,...».
M. Michel Herbillon. Eh oui !
M. Arthur Paecht. ... nous ne pourrons pas assurer votre sécurité par manque d'effectifs.»
M. Jacques Myard. Il n'y a pas que là !
M. Arthur Paecht. Monsieur le ministre, nous étions fiers, et à juste titre, d'avoir l'un des meilleurs services hospitaliers du monde, sinon le meilleur.
Le malade était alors au centre du système. Nous faisions la visite le matin, en équipe, et la contre-visite l'après-midi; vous avez connu cette époque. Il y avait alors une très forte personnalisation du lien entre le malade et son médecin, son infirmière, son aide-soignante. Notre temps ne comptait pas, ni celui des médecins ni celui du personnel paramédical.
Les temps ont changé et les avancées technologiques au profit de la santé publique ont été - qui pourrait le nier ? - considérables. Il en va de même, en principe, des conditions de travail des personnels et c'est heureux. Et si les 35 heures doivent aussi s'appliquer dans la fonction publique hospitalière, elles doivent l'être au bénéfice de tous, médecins hospitaliers compris.
Mais le malade, lui, n'a que faire des 35 heures.
Plusieurs députés du groupe socialiste. Ce n'est pas vrai !
M. Arthur Paecht. Il veut rester, et c'est normal, au centre d'un système hospitalier fait pour lui avant d'être fait pour les personnels soignants et l'administration.
Je ne remets pas en cause la décision du Gouvernement de mettre en place les 35 heures dans la fonction publique hospitalière,...
M. Jacques Myard. Si !
M. Arthur Paecht. ... mais la spécificité des emplois liés aux malades est en totale contradiction avec les déclarations du Premier ministre indiquant que ce passage aux 35 heures se fera sans création d'emplois.
M. François Sauvadet. Tout à fait !
M. le président. Venez-en à votre question, monsieur Paecht.
M. Arthur Paecht. La nécessaire démultiplication des soignants autour du lit d'un malade qui, lui, ne fait pas les 35 heures, entraînera forcément une rupture du lien personnalisé dont j'ai parlé au début de ma question.
M. Jean-Claude Perez. Au fait !
M. Arthur Paecht. En tout état de cause, le coût pour la collectivité sera d'environ 20 milliards par an.
La question comportera deux temps mais elle sera courte.
M. le président. Voilà !
M. Arthur Paecht. Premièrement, comment le Gouvernement compte-t-il financer les nouveaux emplois que tous les établissements réclament d'urgence pour assurer la sécurité et la pérennité des soins et des traitements ?
Deuxièmement, le Gouvernement a-t-il vraiment conscience de l'absolue nécessité de préserver les relations humaines entre le malade et les différents acteurs des structures de soins ? La situation des hôpitaux publics et privés se détériore à un rythme exponentiel (Protestations sur les bancs du groupe socialiste)...
M. le président. Monsieur Paecht, veuillez terminer.
M. Arthur Paecht. ... mais il est encore temps d'inverser la tendance. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement our la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à la santé.
M. Bernard Kouchner, ministre délégué à la santé. Monsieur le député, vous vous êtes livré à un véritable réquisitoire mais vous été assez aimable pour ne pas remettre en cause la nécessité de passer aux 35 heures à l'hôpital et je commencerai par là.
C'est vrai, il faudra créer des postes à l'hôpital; nous les créerons au moment où la négociation sera terminée.
M. Jean-Louis Debré. Et alors ?
M. le ministre délégué à la santé. La première phase s'achève; nous abordons la deuxième phase de la négociation avec le personnel hospitalier, la fonction publique hospitalière et les médecins.
La spécificité du travail hospitalier, que je reconnais avec vous, a été relevée dans le premier rapport. L'hôpital est, dans toute l'administration, l'endroit où l'on se rapproche le plus de l'horaire légal hebdomadaire, sachant que la spécificité de certaines tâches, les gardes et les astreintes, en particulier, interdisent d'imaginer que l'on puisse partir après son temps de travail alors que le malade attend... C'est en fonction du malade qu'il faudra organiser les 35 heures à l'hôpital et c'est précisément, monsieur Paecht, l'occasion rêvée pour remettre toutes ces professions autour et au service du malade, comme vous l'avez souligné au début de votre question. Pour cela, il faut une concertation: le passage aux 35 heures nous en donne l'occasion, bien que nous l'ayons déjà entamée - et vous aussi - à plusieurs reprises. Ce sera un progrès social manifeste, non seulement pour les personnels, qui déjà s'en félicitent, mais aussi pour les malades. Je crois sincèrement que nous pourrons ainsi, avec évidemment des créations de poste, améliorer le service rendu.
L'exemple des urgences est excellent, car la situation est difficile. L'hôpital Pompidou est, c'est vrai, extraordinairement moderne. Le problème est d'habituer le personnel à prendre en charge le malade et, dans le même temps, à saisir les données informatiques. On ne lui impose pas, mais c'est véritablement la médecine de demain. Or tout cela exige, je vous l'accorde, un temps d'adaptation.
C'est dans les urgences que la réduction du temps de travail met en évidence deux faits importants: la nécessité absolue de renforcer les postes de médecins et de personnel, hospitalier, à ce niveau,...
M. Edouard Landrain. On manque de médecins, on manque d'infirmières !
M. le ministre délégué à la santé. ... et la nécessité, tout aussi évidente, de leur ménager un repos de sécurité. Il nous faut aménager, pour l'améliorer, la prise en charge du malade et je reconnais volontiers que celle-ci n'est pas encore optimale dans certains établissements. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
Auteur : M. Arthur Paecht
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Fonction publique territoriale
Ministère interrogé : santé
Ministère répondant : santé
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 13 juin 2001