politiques communautaires
Question de :
M. Bernard Outin
Loire (4e circonscription) - Communiste
Question posée en séance, et publiée le 21 juin 2001
M. le président. La parole est à M. Bernard Outin, pour le groupe communiste.
M. Bernard Outin. Monsieur le ministre délégué chargé des affaires européennes, le Conseil de l'Union européenne réuni à Göteborg les 15 et 16 juin a émis une série de recommandations sur les grandes orientations des politiques économiques des Etats membres et de la Communauté.
Ces recommandations constituent en fait un véritable plaidoyer idéologique en faveur du libéralisme, essentiellement dans le domaine public, mais pas seulement.
Ainsi le Conseil recommande-t-il à la France d'inciter les travailleurs âgés à conserver le plus longtemps possible leur emploi, de favoriser l'emploi à temps partiel, d'alléger encore plus les charges sociales. Il recommande également de suivre de près les effets des 35 heures afin d'éviter que leur application ne s'accompagne d'une hausse des salaires.
Ces recommandations mettent en cause notre système d'assurance chômage et menacent notre système de retraite et de préretraite.
Il s'agit là d'une vision simpliste de l'économie qui semble considérer toute législation en faveur des salariés comme un frein au développement économique de l'Europe.
M. Jean-Paul Charié. Ce n'est pas ce qui a été dit !
M. Bernard Outin. La construction européenne ne peut se poursuivre sur la seule base d'un credo libéral niant aux citoyens tout droit à la parole.
M. Guy Teissier. C'est faux !
M. Bernard Outin. Cette vision, excessivement réductrice, est à l'opposé de la construction de l'Europe sociale, seul rempart efficace face au libéralisme. («Ah !» sur plusieurs bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Monsieur le ministre, comment la France va-t-elle se faire le porte-parole des millions d'Européens qui réclament une véritable Europe sociale ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des affaires européennes.
M. Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes. Monsieur le député, ainsi que vous l'avez précisé, le Conseil européen a adopté, à Göteborg, les grandes orientations de politique économique préparées par le Conseil Ecofin, et affirmé la volonté d'une politique économique axée à la fois sur la croissance et sur la stabilité.
Je fais cependant de ses conclusions une lecture un peu différente de la vôtre, non que je nie l'existence, au sein du Conseil européen, de pressions libérales ou de forces qui y sont favorables, mais parce que je souhaite insister, vous le comprendrez, sur l'action de la France en faveur de la réorientation de la construction européenne vers la croissance et l'emploi. Nous nous y sommes engagés depuis 1997 et avons agi en ce sens, à Amsterdam d'abord, puis à Luxembourg, en élaborant des lignes directrices pour l'emploi, enfin à Lisbonne, en insistant sur la croissance, la création d'emplois, l'innovation et la cohésion sociale.
Cela traduit la volonté de parvenir à une approche commune insistant non seulement sur la concurrence ou l'uniformisation des politiques économiques, mais aussi sur leur coordination.
Le double mérite de cette stratégie est de mettre l'accent sur la croissance et de faire de l'Union européenne un pôle d'organisation différent des Etats-Unis et du Japon.
La présidence française de l'Union européenne a fait, vous le savez, de la cohésion sociale l'une de ses priorités, et je me contenterai de citer quelques titres de chapitres: l'agenda social, d'abord, qui doit permettre de progresser dans les cinq années qui viennent dans le domaine du droit social européen; l'inclusion des droits sociaux dans la Charte des droits fondamentaux, que la France a obtenue non sans mal; le statut de la société européenne, qui a enfin abouti alors qu'il est resté en suspens pendant vingt-cinq ans; l'aboutissement de la directive «Information et consultation des travailleurs», dite «Renault Vilvorde», qu'Elisabeth Guigou a réussi à obtenir et qui représente une conquête importante; enfin, la déclaration sur les services d'intérêt économique général.
Bref, je crois pouvoir affirmer que, s'agissant de l'Europe, la France a bien pour priorité l'approfondissement de la dimension sociale. Nous nous battrons toujours pour les mêmes valeurs que vous, à savoir un volontarisme plus grand en faveur du plein emploi, de la qualité des emplois, qui est importante, et de la cohésion sociale. En clair, nous voulons comme vous, par des voies peut-être un peu différentes, réaliser l'Europe sociale. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Yves Nicolin. Baratin !
Auteur : M. Bernard Outin
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique économique
Ministère interrogé : affaires européennes
Ministère répondant : affaires européennes
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 21 juin 2001