commerce international
Question de :
M. Jean-Claude Lefort
Val-de-Marne (10e circonscription) - Communiste
Question posée en séance, et publiée le 21 juin 2001
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lefort, pour le groupe communiste.
M. Jean-Claude Lefort. Chaque année, dans le monde, plus de cinq millions de personnes, principalement des femmes et des enfants, meurent du sida, de la tuberculose et du paludisme.
M. Lucien Degauchy et M. Jacques Myard. Et du communisme !
M. Jean-Claude Lefort. Sous la pression de cette réalité insupportable, la Commission européenne négocie actuellement avec l'industrie pharmaceutique un programme d'action visant à aboutir à une tarification échelonnée des médicaments.
Ce programme est certes appréciable. Toutefois, il ne s'attaque pas au problème central: les médicaments déclarés essentiels par la communauté internationale sont jalousement protégés par des brevets industriels négociés au sein de l'OMC, ce qui les rend inaccessibles aux pays pauvres.
A l'occasion de son voyage en Afrique du Sud, M. le Premier ministre a annoncé des mesures de soutien financier, qui répondent, c'est vrai, à une situation d'urgence. Reste qu'en ce domaine vital il faut, selon nous, des mesures qui s'attaquent définitivement à la racine du problème.
La France et l'Europe doivent prendre une position avancée pour obtenir une révision de l'accord international sur la propriété intellectuelle, comme le demandent de nombreux pays du Sud.
Il convient que les médicaments essentiels soient déclarés biens publics globaux, et qu'ils soient en conséquence soustraits aux lois étroitement marchandes.
A quand donc une initiative forte de l'Europe sur cet aspect majeur des relations Nord-Sud ?
A quand une révision de l'accord OMC, qui prive aujourd'hui les populations qui en ont le plus besoin de ces médicaments essentiels ?
L'Europe doit agir pour mettre l'humain au coeur de la mondialisation: tel est le sens de ma question. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué à
la coopération et à la francophonie, pour une réponse rapide.
M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie. Monsieur Lefort, depuis 1997, la France se bat pour l'accès aux médicaments des malades des pays du Sud, là où les malades sont les plus nombreux. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Yves Fromion. Et avant ?
M. Jean-Luc Préel. Vous êtes partisan !
M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie. Cette année-là, la création du Fonds de solidarité thérapeutique international en a été la première manifestation concrète. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
Longtemps isolés, nous avons été rejoints par nos partenaires européens et par les Etats-Unis, à l'exception notable du nouvel administrateur de l'Agence de développement américaine, qui préconise de ne pas donner d'argent pour l'accès aux médicaments, ce qui a heureusement provoqué la réaction très forte des associations de victimes du sida aux Etats-Unis et de ceux qui luttent contre cette maladie.
La session spéciale des Nations unies qui va avoir lieu la semaine prochaine et à laquelle le docteur Bernard Kouchner participera («Ah !» sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants)...
M. Francis Delattre. Ce sera le top !
M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie. ... sera l'occasion de confirmer ce consensus.
L'accès aux soins signifie des structures de soins adaptées, au plus près du terrain et des malades, ainsi que des moyens financiers.
M. Jean-Claude Lefort. Vous ne répondez pas à ma question !
M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie. A cet égard, chacun s'est félicité de l'annonce faite par le Premier ministre de la contribution française de 150 millions d'euros au Fonds mondial pour la santé et à la lutte contre le sida.
Il faut aussi, bien sûr, permettre l'accès aux médicaments. («Répondez à la question !» sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Olivier de Chazeaux. Le temps passe, monsieur le président !
M. le ministre délégué à la coopération et à la francophonie. A la suite du Conseil des ministres européens qui s'est tenu sous la présidence française le 10 novembre 2000, l'Union européenne s'est engagée à cet égard en essayant d'obtenir des industriels un système de prix différenciés. Pascal Lamy s'y emploie.
Notre engagement en faveur de prix différenciés ne nous fait pas oublier la question de la propriété intellectuelle, notamment des licences obligatoires. Les pays doivent pouvoir fabriquer librement les médicaments reconnus comme essentiels pour lutter contre les trois grands fléaux que vous avez rappelés. Ce n'est pas seulement une question juridique: c'est aussi une question de solidarité internationale. C'est aussi cela, la mondialisation ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Auteur : M. Jean-Claude Lefort
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Relations internationales
Ministère interrogé : coopération
Ministère répondant : coopération
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 21 juin 2001