Question au Gouvernement n° 2956 :
croissance

11e Législature

Question de : M. Gilles Carrez
Val-de-Marne (5e circonscription) - Rassemblement pour la République

Question posée en séance, et publiée le 10 octobre 2001

M. le président. La parole est à M. Gilles Carrez, pour le groupe RPR.
M. Gilles Carrez. Monsieur le Premier ministre, le projet de budget pour 2002 préparé par votre gouvernement repose sur une prévision de croissance de 2,5 %. Or tous les responsables économiques, dont votre ministre des finances lui-même, reconnaissent que cette prévision est irréaliste, qu'elle est surévaluée.
Déjà, il y a un an, vous aviez prévu, pour 2001, une croissance de 3,3 %. Malgré toutes nos mises en garde, vous avez refusé de la revoir à la baisse. Résultat : vous avez dû, cet été, faire machine arrière. En effet, la croissance ne sera plus que de 2,1 % selon l'INSEE et le déficit du budget va bien évidemment en pâtir. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Sachant cela, avant même les événements tragiques du 11 septembre, vous auriez dû présenter pour l'année prochaine un projet de budget sérieux et responsable, établi sur des hypothèses de croissance réalistes d'au maximum 2 %. Autrement dit, mes chers collègues, les députés vont examiner un budget artificiel, insincère dans lequel les recettes sont surévaluées alors que les dépenses ne sont absolument pas maîtrisées. La conséquence inévitable sera que le déficit va exploser.
Mme Odette Grzegrzulka. Oiseau de mauvais augure !
M. Gilles Carrez. Ainsi notre pays, qui a déjà été rappelé à l'ordre par le FMI et par la Commission de Bruxelles l'été dernier,...
M. Henri Emmanuelli. Quelle horreur !
M. Gilles Carrez. ... va voir ses marges de manoeuvre anéanties.
Vous faites le contraire des Etats-Unis qui ont déjà commencé à relancer leur économie grâce aux excédents qu'ils ont constitués pendant les années de croissance alors que vous avez gaspillé ces excédents ! (Applaudissements sur divers bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance. - Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
Il s'agit, pour l'opposition, non pas d'ajouter aux inquiétudes légitimes des Français, mais d'exiger du Gouvernement une démarche responsable. Le « patriotisme économique » n'y changera rien.
M. le président. Monsieur Carrez, voulez-vous conclure, s'il vous plaît ?
M. Gilles Carrez. Certainement, monsieur le président.
Monsieur le Premier ministre, personne n'a oublié la situation budgétaire désastreuse de 1992-1993...
M. Julien Dray. Et celle de 1995 ?
M. Gilles Carrez. ... quand la gauche a laissé une ardoise de plusieurs centaines de milliards à ses successeurs ! (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
C'est pourquoi je vous demande si le Gouvernement entend revoir rapidement son projet de budget pour 2002, comme sont en train de le faire tous nos partenaires européens. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le député, lorsque vous parlez de déficit, je vous écoute toujours avec beaucoup d'intérêt car je n'oublie pas que le dernier exercice que vous et vos amis avez conduit a laissé au pays un déficit de 300 milliards de francs ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Franck Borotra. Pas du tout !
M. Georges Tron. Il faut revoir vos chiffres !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. S'il n'avait pas été aussi élevé, nous aurions eu sans doute plus de facilité à le réduire. Pourtant nous l'avons fait, monsieur le député, mais vous avez oublié de le souligner dans votre question, puisque, depuis que le Gouvernement de M. Jospin est en place, le déficit budgétaire a été diminué de 100 milliards. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Georges Tron. Et la cagnotte ?
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Quant au choix des hypothèses, il constitue toujours un exercice difficile, surtout en des temps perturbés comme ceux que nous vivons. Néanmoins, je vous rappelle que, malgré un affaiblissement par rapport aux prévisions initiales, la croissance de la France sera, en 2001, la plus élevée des pays d'Europe comparables. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste.)
M. Pierre Lequiller. Et alors ?
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Telle est la réalité.
Immergés les uns et les autres dans la situation internationale, nous ne pouvons évidemment pas éviter un ralentissement. En conséquence il convient de juger un gouvernement sur sa capacité à réagir face à ce ralentissement.
M. Franck Borotra. Vous ne réagissez sur rien du tout.
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. De ce point de vue, alors que les taux d'intérêt sont les mêmes pour l'ensemble de l'Europe, alors que la situation générale est identique dans toute l'Europe...
M. Franck Borotra. Diminuez la pression fiscale !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... vous ne pourrez pas contester, monsieur le député, que l'inflation en France est la plus basse de tous les pays d'Europe et que sa croissance est la plus élevée. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur divers bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Pierre Lequiller. Et le chômage ?
M. le président. Du calme.
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Pour l'année prochaine nous avons présenté un projet de budget sur lequel nous reviendrons longuement puisque le Parlement s'en saisira la semaine prochaine en séance publique. Il est fondé sur des hypothèses de croissance dont j'ai indiqué moi-même, avec Mme Parly, comment elles avaient été élaborées. J'ai également précisé que nous devrions tenir compte des événements graves du 11 septembre.
Telles sont les bases sur lesquelles repose ce budget que nous avons voulu à la fois réaliste et volontaire.
M. Franck Borotra. Electoraliste !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Nous en discuterons à partir de la semaine prochaine.
Pour terminer cette courte réponse, monsieur Carrez, je veux souligner que, compte tenu de la situation actuelle, nous devrions l'aborder avec beaucoup de modestie et de volonté. Une telle attitude me paraît correspondre mieux à l'intérêt du pays qu'une critique systématique...
M. Georges Tron. Pas systématique : unanime !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... accompagnée d'un vide sidéral en ce qui concerne les propositions. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Franck Borotra. C'est nul !

Données clés

Auteur : M. Gilles Carrez

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Politique économique

Ministère interrogé : économie

Ministère répondant : économie

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 10 octobre 2001

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