Question au Gouvernement n° 2965 :
exercice de la profession

11e Législature

Question de : M. Bernard Accoyer
Haute-Savoie (1re circonscription) - Rassemblement pour la République

Question posée en séance, et publiée le 11 octobre 2001

M. le président. Pour le groupe RPR, la parole est à M. Bernard Accoyer.
M. Bernard Accoyer. Monsieur le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, pour le passage à l'euro, le Gouvernement a fait le choix de la double circulation sur une période relativement longue. Il a également confié cette mission essentielle au commerce et à l'artisanat. Cela représente une charge supplémentaire de travail, une responsabilité : tenir une double caisse, faire de la pédagogie, assurer la sécurité, jouer un rôle de banquier et de guichetier. Aussi, monsieur le ministre, quelles mesures envisagez-vous de prendre pour que le passage à l'euro, qui doit être réussi - c'est fondamental -, soit effectivement couronné de succès ?
Deux mesures paraissent indispensables pour favoriser les paiements par chèque et par carte bancaire : d'une part, la revalorisation de la garantie bancaire pour les chèques, qui n'a pas été réévaluée depuis 1975, c'est-à-dire depuis vingt-six ans, d'autre part, la suspension, durant la période de double circulation, de la commission prélevée par les organismes bancaires et financiers sur les paiements par carte bancaire pour des montants inférieurs à 30 euros.
Par ailleurs, comme le demandent leurs organisations professionnelles, il paraît légitime d'accorder aux artisans et commerçants un crédit d'impôt compensant la surcharge de travail que représente la véritable mission de service public qui leur est confiée.
Enfin, pour éviter le télescopage entre la date d'introduction de l'euro et l'application des 35 heures dans les entreprises de moins de vingt salariés, il serait raisonnable de reporter l'application de la réduction du temps de travail dans le commerce et l'artisanat. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur Accoyer, je sais que vous suivez ces questions avec beaucoup d'attention et je vous en remercie.
Les artisans et les commerçants ont accompli un gros travail de préparation, et il faut leur en rendre hommage. Nombre d'entre eux ont déjà organisé leur commerce de manière que tout se passe bien. Les dernières statistiques montrent que, pour les paiements scripturaux en euros, essentiellement les paiements par chèque, le mouvement a bien démarré, et que la progression est importante, ce dont nous nous réjouissons tous. Nous avons examiné à plusieurs reprises, au sein du comité national de l'euro, où siègent tous les représentants des parties concernées, ainsi que des parlementaires, quelles pouvaient être les mesures concrètes. La totalité des mesures auxquelles vous faites allusion n'a pas pu être retenue, mais vous aurez satisfaction, je crois, sur un ou deux points.
La règle générale, c'est que, pour le passage à l'euro, chaque groupe social - je le dis un peu brutalement - paie pour ce qui le concerne ; c'est la règle européenne. L'Etat paie, par exemple, pour la sécurité et la fabrication des billets ; les banques ont aussi des coûts à supporter. Il en est de même pour les commerçants et les artisans, dans une certaine mesure.
Mais comme il peut y avoir des coûts particuliers, nous avons décidé que les frais engagés, par exemple pour changer de caisse enregistreuse ou pour modifier un terminal, pourraient faire l'objet dès cette année d'un amortissement accéléré, permettant ainsi, sur le plan fiscal, d'aboutir pratiquement au remboursement de ces sommes. De telles mesures vont dans le sens que vous souhaitez.
Enfin, on pourrait relever une certaine ambiguïté lorsque vous dites que les commerçants et les artisans jouent un rôle de banquier. C'est d'ailleurs un discours que j'entends fréquemment. Qu'il n'y ait pas d'ambiguïté sur ce point : c'est aux banques qu'il appartient de faire le change.
M. Arnaud Lepercq. Dans les magasins, il n'y a pas de banquiers !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Les commerçants et les artisans, grâce au travail des pouvoirs publics et des organisations professionnelles, acceptent le rendu de monnaie en euros, et des possibilités leur sont offertes par le biais des machines qui ont été mises en place.
M. Jean-Pierre Soisson. Comment définir l'équilibre ?
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Mais il ne faut pas transférer sur les commerçants et les artisans la charge du change. Les banques le demandaient, mais telle n'est pas la position des pouvoirs publics,...
M. Jean-Pierre Soisson. Très bien !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. ... et telle n'est pas non plus, je le sais, votre position. Chacun doit faire le chemin qui le concerne.
Enfin, j'évoquerai un dernier point. Si l'on parle beaucoup de technique - et on a raison -, on n'a pas assez remarqué que l'euro nous a d'ores et déjà rendu un singulier service eu égard aux événements dramatiques qui sont intervenus aux Etats-Unis et à ceux qui ont suivi. Je gage en effet que, si nous n'avions pas déjà eu l'euro, la monnaie française, comme d'autres monnaies, aurait pu être attaquée, et que les taux d'intérêt auraient dû augmenter massivement, avec les effets négatifs que cela aurait entraînés pour notre économie. Si notre monnaie n'a pas été attaquée, si les taux d'intérêt n'ont pas augmenté mais ont, au contraire, baissé, c'est parce que nous avons d'ores et déjà fait le choix de l'euro. Il faut le rappeler alors que de nombreuses personnes - je pense aux artisans et commerçants - rencontrent parfois des difficultés pour passer à l'euro.
Fondamentalement, avoir adopté l'euro est une excellente décision. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)
M. Jean-Pierre Soisson. Très bien !

Données clés

Auteur : M. Bernard Accoyer

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Commerce et artisanat

Ministère interrogé : économie

Ministère répondant : économie

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 11 octobre 2001

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