commerce international
Question de :
Mme Béatrice Marre
Oise (2e circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 8 novembre 2001
M. le président. La parole est à Mme Béatrice Marre, pour le groupe socialiste.
Mme Béatrice Marre. Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'Etat au commerce extérieur.
Le vendredi 9 novembre s'ouvrira à Doha, au Qatar, la quatrième conférence ministérielle de l'Organisation mondiale du commerce - la désormais très célèbre « OMC » -, à laquelle participeront cent quarante-deux pays, et dont la Chine sera bientôt un nouveau membre.
Chacun se souvient du déroulement et de l'échec de la conférence de Seattle de décembre 1999 et, surtout, du formidable mouvement d'opinion international qu'elle avait suscité. Aujourd'hui, la situation est, me semble-t-il, différente au moins à deux titres.
En premier lieu, un gros travail a été accompli pendant les deux dernières années, en particulier avec l'association des pays en voie de développement. Les points de vue se sont incontestablement rapprochés et le travail de l'Union européenne et de Pascal Lamy n'y a pas été pour rien.
En second lieu et surtout, les dramatiques événements du 11 septembre dernier, avec le risque d'aggravation de la coupure Nord-Sud qu'ils comportent, ont ravivé l'impérieuse nécessité de multilatéralisme, seule parade contre la loi du plus fort.
Mais notre vision d'une mondialisation réorientée vers le développement et régulée par une OMC profondément réformée dans le cadre de l'ONU ne fait pas encore, tant s'en faut, consensus en dépit des qualités réelles du texte mis en négociation par M. Harbinson, président du conseil général de l'OMC.
Certains estiment qu'un nouvel échec serait préférable à un mauvais accord. D'autres pensent, et je me range parmi eux, qu'il reste possible de préserver à Doha l'un des rares outils efficaces de régulation internationale sans mettre pour autant en péril nos valeurs fondamentales - les services publics, le principe de précaution, le droit aux médicaments, sans oublier la défense d'une politique agricole commune réorientée vers la multifonctionnalité.
Monsieur le secrétaire d'Etat, pouvez-vous nous indiquer la position de la France au sein des Quinze ? Quelles sont les marges de négociation qu'elle souhaite voir accorder à Pascal Lamy pour parvenir à l'ouverture d'un cycle global de régulation du commerce international ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'Etat au commerce extérieur.
M. François Huwart, secrétaire d'Etat au commerce extérieur. Madame la députée, je souscris pleinement à votre analyse : les leçons de Seattle ont été en partie tirées et la négociation se présente aujourd'hui sous un jour plus favorable, sans que l'on sache encore exactement quel en sera le résultat.
Ce matin même s'est tenu un conseil restreint qui a réuni M. le Président de la République, M. le Premier ministre et les ministres concernés pour fixer la position de la France dans cette négociation, dans le cadre de l'Union européenne.
Comment cette négociation se présente-t-elle ?
Le texte qui est sur la table est bien meilleur que celui de Seattle parce qu'il prend en compte l'ensemble des préoccupations des pays de l'OMC. Mais il subsiste à nos yeux un certain nombre d'insuffisances et de difficultés.
Eu égard à notre volonté d'équilibrer la libéralisation par plus de régulation, nos préoccupations portent sur quatre points.
D'abord, en ce qui concerne l'agriculture, nous n'acceptons ni que les subventions à l'exportation soient supprimées ni que le rythme d'évolution de la politique agricole commune soit préempté, si je puis dire.
Ensuite, s'agissant de l'accès aux médicaments, question aujourd'hui très symbolique à l'OMC du rapport Nord-Sud, nous souhaitons qu'une clarification soit opérée. Les pays pauvres et les pays en développement doivent pouvoir lutter contre les pandémies de sida et d'autres maladies graves. A cet égard, la France aura des exigences à faire valoir.
Quant à l'environnement, nous souhaitons qu'il soit mieux pris en compte, de façon qu'il ne soit pas renvoyé à des négociations ultérieures.
Enfin, la dimension sociale de la mondialisation doit également être mieux prise en compte.
Tout cela pour vous dire, madame la députée, que nous ne sommes ni dans une stratégie d'échec ni dans une stratégie de renoncement : nous adoptons une attitude d'affirmation de la position constante de la France au sein des institutions internationales, qui est de promouvoir la régulation.
En ce qui concerne le mandat de M. Lamy, c'est sur place que nous pourrons évaluer les positions du négociateur. Ce mandat comporte suffisamment de souplesse et nous nous attacherons à ce qu'il soit honoré dans les meilleures conditions. (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste.)
Auteur : Mme Béatrice Marre
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Relations internationales
Ministère interrogé : commerce extérieur
Ministère répondant : commerce extérieur
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 8 novembre 2001