Question au Gouvernement n° 3222 :
droit d'asile

11e Législature

Question de : M. François d'Aubert
Mayenne (1re circonscription) - Démocratie libérale et indépendants

Question posée en séance, et publiée le 16 janvier 2002

ABUS DU DROIT D'ASILE

M. le président. La parole est à M. François d'Aubert, pour le groupe Démocratie libérale et Indépendants.
M. François d'Aubert. Monsieur le président, ma question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères et à M. le ministre de l'intérieur. Elle porte sur les dérives constatées du droit d'asile.
Abusivement étendu par la loi Reseda, ou loi Chevènement, le droit d'asile est aujourd'hui accordé avec laxisme par le Gouvernement, ce qui amplifie l'immigration clandestine dans notre pays.
M. Jean Ueberschlag. Eh oui !
M. Jacques Myard. C'est vrai !
M. François d'Aubert. Ce laxisme de la politique d'asile est dénoncé très officiellement par le directeur des Français à l'étranger et des étrangers en France. Par une note du 11 décembre 2001 publiée par la presse, ce haut fonctionnaire du quai d'Orsay démontre que l'asile politique tel qu'il est pratiqué aujourd'hui n'a plus rien à voir avec celui qui était défini traditionnellement par l'article de la Constitution selon notre conception des droits de l'homme.
Les résultats constatés depuis maintenant deux ans sont ahurissants. Les demandes déposées auprès de l'OFPRA ont été multipliées par deux tandis que les demandes d'asile à la frontière ont progressé, de 1999 à 2000, de 53 % et les demandes d'asile territorial ont augmenté, sur la seule année 2000, de 69 %. Qui oserait aujourd'hui soutenir que la procédure d'asile n'est pas profondément pervertie et qu'elle remplit sa mission ?
Ainsi, en 2001, 95 % des personnes invoquant l'asile à nos frontières ont été admises en France alors que le ministère des affaires étrangères n'avait émis que 38 % d'opinion favorable. Il est même arrivé à la commission de recours des décisions de l'OFPRA de donner raison aux demandeurs d'asile - dans le doute, il est vrai - dans des cas de crime de droit commun, d'acte de terrorisme, voire de génocide. La législation actuelle est donc largement contournée par les filières d'immigration clandestine. La justice a une tendance certaine à interpréter de façon peu rigoureuse la Convention de Genève. Quant aux moyens matériels, en particulier ceux de la PAF, ils manquent cruellement.
Il faut le dire, monsieur le Premier ministre, messieurs les ministres, votre politique de maîtrise des flux migratoires et de lutte contre l'immigration clandestine est un véritable échec.
M. le président. Votre question, monsieur d'Aubert !
M. François d'Aubert. Certains diraient que la France a été transformée en une véritable passoire. Sont mises en cause à la fois vos négligences,...
M. Alfred Recours. La question !
M. François d'Aubert. ... votre méconnaissance des filières d'immigration clandestine et votre impuissance.
ainsi que l'absence de politique européenne dans le domaine du contrôle de l'immigration clandestine.
M. Jean Ueberschlag. C'est la vérité !
M. Christian Bourquin. La question !
M. le président. Votre question, monsieur d'Aubert.
M. François d'Aubert. Mes questions sont les suivantes. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste.)
Monsieur le Premier ministre, pourquoi cette absence de bilan honnête concernant l'application de la loi Chevènement sur la prétendue maîtrise des flux migratoires ? Un bilan devait être dressé. Il n'y en a pas eu.
M. le président. Bien !
M. Jean Ueberschlag. Mais oui !
M. François d'Aubert. Nous apprenons aujourd'hui qu'il existe une note plus ou moins officielle, mais réelle, du Quai d'Orsay.
Deuxièmement (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste), pourquoi ce laxisme et ce manque de moyens ? Pourquoi, surtout, ce manque de volonté politique dans la maîtrise des flux migratoires et la lutte contre l'immigration clandestine ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants et sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur, pour une brève réponse, s'il vous plaît.
M. Daniel Vaillant, ministre de l'intérieur. Monsieur le député, je tiens à excuser Hubert Védrine qui accompagne le Président de la République dans le cadre de la rencontre avec le président Poutine.
Le rapport du directeur des Français à l'étranger et des étrangers en France auquel vous avez fait allusion s'inscrit dans la suite des réflexions interministérielles que j'ai suscitées et qui ont été conduites avec d'autres de mes collègues ces derniers mois. En effet, nous n'avons pas attendu ce rapport pour nous alarmer du détournement des procédures et de l'action menée par les filières organisées d'immigration clandestine. La réflexion de ce haut fonctionnaire du Quai d'Orsay nécessite d'être confirmée et complétée par les différentes missions administratives en cours qui ont pour objet d'explorer, chacune dans sa sphère de compétence propre, les voies d'une réforme globale des procédures et de proposer les ajustements nécessaires des moyens tant de l'OFPRA que des préfectures.
M. Jean Ueberschlag. Et vous dites ça sans rire ?
M. Claude Goasguen. N'importe quoi !
M. le ministre de l'intérieur. Je note d'ailleurs qu'un rapport d'étape observe que cette réflexion aurait peut-être manqué durant une période intermédiaire, les années 1993 à 1997, qui aurait pu permettre d'anticiper les phénomènes que vous dénoncez aujourd'hui.
M. François Goulard. Vous êtes très convaincant !
M. le ministre de l'intérieur. Le Gouvernement est attentif et vigilant, plus que vous ne le dites, sur les aspects protecteurs des procédures conduites à l'égard de ceux qui fuient les persécutions dont ils sont victimes dans leur pays et qui méritent pour cela d'être bien accueillis en France.
M. Jean Ueberschlag. A Mulhouse ?
M. Charles Cova. Allez voir dans les banlieues !
M. le ministre de l'intérieur. Mais ce gouvernement est aussi intransigeant à l'égard des trafiquants et des filières d'immigration irrégulière.
M. Jean Ueberschlag. Oui, c'est ça. Venez donc voir à Mulhouse !
M. le ministre de l'intérieur. Il faut rechercher en permanence l'équilibre.
L'action entreprise par le Gouvernement ces dernières semaines a ainsi permis, avec le concours des pays de départ que je tiens à remercier tout particulièrement, de revenir à une meilleure situation sur le plan de la demande d'asile à la frontière en évitant que certaines compagnies aériennes ne chargent des étrangers démunis de tous papiers et de tout titre d'entrée en France, déstabilisant ainsi nos capacités d'accueil.
M. Claude Goasguen. Zéro !
M. Jean Ueberschlag. Et puis j'entends sur les bancs du Gouvernement des propos inadmissibles !
M. le ministre de l'intérieur. Le Gouvernement continuera de conduire une politique ferme en mettant en oeuvre ce type d'actions fortes qui n'entravent pas, par ailleurs, l'application des conventions internationales que la France entend bien toujours faire respecter. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Jean Ueberschlag. Vous ne répondez pas sur Mulhouse ?

Données clés

Auteur : M. François d'Aubert

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Étrangers

Ministère interrogé : intérieur

Ministère répondant : intérieur

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 16 janvier 2002

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