Question au Gouvernement n° 3306 :
défense : budget

11e Législature

Question de : M. Georges Sarre
Paris (6e circonscription) - Radical, Citoyen et Vert

Question posée en séance, et publiée le 7 février 2002

SITUATION DES ARMÉES

M. le président. La parole est à M. Georges Sarre, pour le groupe RCV.
M. Georges Sarre. Depuis cinq ans, dans le silence approbateur du chef des armées, les crédits accordés à celles-ci ont sans cesse diminué. Le général Crène, chef d'état-major de l'armée de terre, le déclare aujourd'hui en évoquant les pièges de la professionnalisation.
Certes, monsieur le Premier ministre, votre prédécesseur avait commencé le désarmement de la France. Aujourd'hui, le constat est dramatique. Notre force de frappe vieillit de jour en jour. Aucun système de réserves n'est venu remplacer le service militaire. En même temps, au regard de la condition militaire, soldats, marins et aviateurs grognent et demandent un effort.
Mme Christine Boutin. Mais vous avez voté tous les projets du Gouvernement !
M. Georges Sarre. Chers collègues, depuis le 11 septembre nous savons que les « dividendes de la paix » ne sont que funeste illusion.
M. Pierre Lellouche. Il faut le dire à Fabius !
M. Georges Sarre. A la lumière de ces récents événements, il était du devoir des autorités françaises de réagir afin que notre pays retrouve sa capacité à agir et préserve les moyens de son autonomie. Or, vous n'avez pas cherché à retourner la tendance.
Mme Christine Boutin. Vous avez voté le budget ! C'est honteux !
M. Georges Sarre. Dans le récent conflit d'Afghanistan, notre armée a fait pâle figure par son manque cruel de moyens.
M. Pierre Lellouche. Absolument !
M. Georges Sarre. La situation est telle qu'aujourd'hui les Etats-Unis ne voient plus de raisons de se concerter avec nous.
M. Pierre Lellouche. C'est vrai !
M. Georges Sarre. L'armée française n'a pourtant pas vocation à jouer les supplétifs. La voix de notre pays doit se faire entendre et non plus se laisser dominer.
Mme Christine Boutin. Vous avez pourtant voté le budget !
M. Georges Sarre. La défense reste l'outil essentiel d'une politique extérieure indépendante. Cela a un prix qu'il faut payer. Il y va de la sécurité de notre République. Que compte faire le Gouvernement pour améliorer les budgets de fonctionnement, d'investissement et de recherche de la défense nationale ? (Applaudissements sur divers bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
M. Pierre Lellouche et M. Charles Civa. Très bien.
M. le président. La parole est à M. le ministre de la défense.
M. Alain Richard, ministre de la défense. Monsieur le député, dans la mesure où elle soulève un ensemble de problèmes politiques, votre question est utile au débat démocratique. (Exclamations sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Pierre Lellouche. Vous avez amputé l'armée française de moitié ! Vous en portez la responsabilité !
M. le ministre de la défense. Toutefois, sur une question qui intéresse l'ensemble de la représentation nationale, je voudrais que nous sachions nous garder de toute fascination pour l'option maximaliste choisie par les Etats-Unis. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe communiste. - Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Ce n'est d'ailleurs pas la première fois qu'ils font un tel choix. Cela a aussi été la politique du président Reagan, que nous n'avions pas non plus suivie à l'époque. Nous ne partageons pas, et je crois que c'est une position très largement partagée ici, l'analyse faite par le président Bush dans son récent discours...
M. Jacques Myard. Ce n'est pas le problème !
M. le ministre de la défense. ... des menaces pour la paix et la sécurité internationales. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) La France et ses partenaires européens ont une autre vision des priorités et des méthodes. Nos options de défense ne doivent pas être décalquées sur la politique américaine. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Quant à nos moyens de défense,...
M. Pierre Lellouche. C'est votre budget !
M. le ministre de la défense. ... ils sont stables et nous placent parmi les pays les plus ambitieux quant à la notion principale d'autonomie, que vous avez bien identifiée, monsieur le député.
M. Pierre Lellouche. Assumez !
M. le ministre de la défense. Nous avons passé des commandes massives de tous les matériels de nouvelle génération,...
M. Pierre Lellouche. Quels matériels ? C'est honteux !
M. le ministre de la défense. ... qu'il s'agisse des avions de combat,...
M. Pierre Lellouche. Combien ?
M. le ministre de la défense. ... des satellites d'observation, des avions de transport ou des sous-marins de la force nucléaire stratégique française. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Pierre Lellouche. Combien d'appareils ?
M. le ministre de la défense. Par conséquent, il faut se garder, monsieur Sarre, de glisser vers une désinformation à visée politicienne (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe communiste. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), en passe de devenir l'un des faux-semblants de la prochaine campagne présidentielle ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur divers bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Les militaires de ce pays ont des aspirations et des revendications. Nous y répondons par le dialogue et dans un esprit de responsabilité. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Pierre Lellouche. Vous êtes responsable !
M. le ministre de la défense. Mais ils n'ont pas l'intention de servir de balle de ping-pong dans le débat présidentiel. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
Pour conclure, monsieur le député, il y avait une absente dans votre question : c'est l'Europe. Si nous voulons une politique de défense autonome et distincte de celle des Etats-Unis, il nous faut faire le choix politique de l'Europe (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert) à condition d'accepter ce choix politique dans son intégralité !
L'Europe a et aura un rôle à jouer dans tous les grands choix internationnaux, à condition qu'elle accepte les défis, qu'elle construise les projets et qu'elle refuse la fascination de l'échec. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Données clés

Auteur : M. Georges Sarre

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Ministères et secrétariats d'etat

Ministère interrogé : défense

Ministère répondant : défense

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 7 février 2002

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