lutte contre l'exclusion
Question de :
M. Alain Clary
Gard (1re circonscription) - Communiste
Question posée en séance, et publiée le 14 février 2002
INÉGALITÉS DE REVENUS
M. le président. La parole est à M Alain Clary, pour le groupe communiste.
M. Alain Clary. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.
Voilà quelques jours, la presse titrait : « La rémunération des dirigeants des grands groupes a augmenté de 36 % en un an. » Et d'indiquer que dix-sept grands patrons, qui rendent public le montant de leurs revenus, ont touché chacun, en moyenne, en 2001, l'équivalent de 498 SMIC annuels.
Un député du groupe communiste. Scandaleux !
M. Alain Clary. Nos concitoyens ont certainement été heureux d'apprendre que les grands patrons français gagnent désormais autant que leurs homologues américains.
M. Franck Dhersin. Merci Fabius !
M. Alain Clary. Mais ils n'auront certainement pas manqué de comparer cette fulgurante augmentation à l'évolution du salaire mensuel de base, qui, lui, n'a progressé que de 1,1 % en un an.
M. Lucien Degauchy. La faute à qui ?
M. Alain Clary. Certes, le thème électoral de la fracture sociale a été enterré par ses promoteurs. Pourtant, les inégalités sociales ont continué de s'approfondir ces dernières années.
M. Maurice Leroy. Merci Jospin !
M. Alain Clary. Leur réduction demeure donc plus que jamais d'actualité. Il y va de la justice et de la cohésion sociales, tout comme du soutien à la croissance pour l'emploi.
Face au credo libéral de baisse des dépenses publiques, de privatisations tous azimuts martelé par le MEDEF et par une droite qui rêve de revanche, nous opposons l'urgente nécessité d'une audace nouvelle en matière sociale.
M. Maurice Leroy. Mais la situation que vous décrivez est celle d'aujourd'hui ! C'est la revanche de qui ? C'est ridicule !
M. Alain Clary. Oui, soutenir la consommation populaire en décidant, par exemple, d'aller au-delà de l'augmentation de 2 % des minima sociaux, relever le taux horaire du SMIC ainsi que les minima sociaux, les retraites, l'allocation adulte handicapé constituerait un acte politique fort et porteur de sens pour l'avenir.
Madame la ministre, quelles dispositions le Gouvernement envisage-t-il de prendre pour affirmer jusqu'au bout du mandat que lui ont confié les Français la priorité donnée à la justice sociale et à la lutte contre les inégalités ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.
Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité. Monsieur le député, comme vous j'ai appris avec étonnement il y a quelques jours que les dirigeants des grands groupes français se sont accordé en 2000 des augmentations de rémunération de 36 % en moyenne. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. Jean-Claude Lenoir. Assez d'hypocrisie !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. C'est vrai que l'année 2000 a été exceptionnellement bonne sur le plan économique puisque nous avons connu un record historique de 560 000 créations d'emplois. Pour autant, je trouve en effet choquant que la politique salariale dans ces entreprises n'ait pas suivi la même pente ascendante, notamment pour les salariés peu qualifiés.
Un député du groupe du Rassemblement pour la République. C'est l'effet des 35 heures !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Le Gouvernement n'a évidemment pas le pouvoir de décider des salaires dans les entreprises, mais il peut en revanche intervenir en matière de minima conventionnels. C'est pourquoi j'ai demandé il y a plusieurs semaines aux partenaires sociaux de travailler ensemble à trouver des solutions pour assurer une meilleure échelle des salaires au sein des grilles conventionnelles. Et je regrette que le MEDEF n'ait pas voulu s'associer à cette démarche.
Mme Odette Grzegrzulka. Exactement !
M. Lucien Degauchy. C'est toujours la faute des autres !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Vous avez parlé d'audace sociale, monsieur le député. Je voudrais vous rappeler que le Gouvernement et la majorité n'ont pas manqué d'audace dans le domaine social depuis 1997. Souvenez-vous des 35 heures,...
M. Philippe Auberger. Qui ne sont pas financées ! Mais à part ça, tout va bien !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. ... des emplois-jeunes, de la couverture maladie universelle, de la loi de lutte contre les exclusions, du récent plan de lutte contre les exclusions, de la lutte contre la précarité de l'emploi. Souvenez-vous du rétablissement des comptes de la sécurité sociale...
M. Lucien Degauchy. Bref, tout va bien !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. ... qui étaient déficitaires de plus de 200 milliards de francs dans la période précédente, et qui sont redevenus excédentaires. Souvenez-vous des crédits supplémentaires que nous avons pu dégager pour l'hôpital, pour l'allocation personnalisée d'autonomie, pour l'éducation ou pour la justice. Je pourrais encore allonger la liste.
Je voudrais aussi rappeler que la loi sur les nouvelles régulations économiques votée en mai 2001 à l'initiative du Gouvernement instaure une obligation de transparence pour les rémunérations des dirigeants d'entreprise. C'est un progrès, même si je crois qu'il faudrait encore aller plus loin. Pour que cette transparence soit mieux assurée, les salariés doivent être associés beaucoup plus directement aux décisions stratégiques des entreprises.
Je vous épargnerai le rappel de toutes les mesures que nous avons prises contre les inégalités sociales : je vous renvoie sur ce point à la lettre que j'ai écrite au président de votre groupe, M. Alain Bocquet. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
Auteur : M. Alain Clary
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique sociale
Ministère interrogé : emploi et solidarité
Ministère répondant : emploi et solidarité
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 14 février 2002