Etats-Unis
Question de :
Mme Monique Collange
Tarn (4e circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 21 février 2002
RELATIONS ENTRE L'UNION EUROPÉENNE
ET LES ÉTATS-UNIS
M. le président. La parole est à Mme Monique Collange, pour le groupe socialiste.
Mme Monique Collange. Monsieur le ministre des affaires étrangères, ma question concerne les relations de l'Union européenne avec les Etats-Unis d'Amérique.
Les réflexions et les analyses européennes, parfois critiques, notamment les vôtres, monsieur le ministre, suscitées par le discours sur « l'axe du mal » prononcé le 29 janvier dernier par le président Bush, qui a été très mal perçu partout en Europe, ont provoqué de vives réactions des responsables américains.
Pouvez-vous nous donner votre sentiment à cet égard ainsi que celui du Gouvernement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert).
M. le président. Merci, madame, pour la brièveté de votre question.
La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.
M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères. Madame la députée, compte tenu de nos liens historiques, de notre amitié pour le peuple américain, de notre alliance avec ce pays, de son rôle dans le monde, notre premier souhait, notre préférence va à la coopération avec les Etats-Unis dans un vrai partenariat. Ce n'est que lorsque cela s'avère impossible que nous marquons nos désaccords ou que nous nous résolvons à agir sans eux, si possible avec nos partenaires européens.
Depuis 1997, ce Gouvernement a démontré à maintes reprises, notamment dans les Balkans ou lorsque le président Clinton s'est engagé personnellement dans la recherche de la paix au Proche-Orient, combien il entendait rester fidèle à cet état d'esprit constructif.
Depuis un an, les Etats-Unis ont pris en matière internationale un certain nombre de décisions que nous avons regrettées : leur refus de ratifier la création de la Cour pénale internationale, le protocole de Kyoto, le traité sur les mines antipersonnel, leur retrait du traité ABM et bien d'autres choses encore. Nous avons contesté ces décisions, car elles ne correspondent pas à notre conception du monde, mais nous avons toujours su garder le sens de la mesure.
Depuis le 11 septembre, nous n'avons pas marchandé notre solidarité au peuple américain, terriblement éprouvé. Nous avons été parmi les premiers à juger légitime et nécessaire la réaction américaine contre Al-Qaïda, qui a d'ailleurs été bien menée.
La lutte contre le terrorisme est une impérieuse nécessité. Elle doit être poursuivie avec énergie. Nous y sommes résolus. Mais tous les problèmes du monde se ramènent-ils à la seule lutte contre le terrorisme ?
M. Christian Cuvilliez. Non !
M. le ministre des affaires étrangères. Celle-ci ne doit-elle être menée que par des moyens militaires, en ignorant ses causes et ses racines profondes ?
M. Christian Cuvilliez. Non !
M. le ministre des affaires étrangères. C'est cela qui serait trop simpliste, qui serait dangereux, inefficace. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Nous avons été plusieurs responsables européens à le dire et à nous en inquiéter. Les Américains s'en sont étonnés. Mais comme l'a dit Joschka Fischer, les alliés ne sont pas des satellites. Et comme l'a demandé José Maria Aznar, il est indispensable qu'il y ait un débat, notamment entre alliés,...
M. Maurice Leroy. Si Aznar l'a demandé !
M. le ministre des affaires étrangères. ... sur la forme que doit prendre dans la durée la lutte contre le terrorisme, ainsi que la lutte contre la prolifération des armes de destruction massive, qui pose un autre problème.
Je l'avais déjà dit devant l'ONU : il faut compléter la coalition contre le terrorisme par une coalition pour un monde équitable. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)
Ce débat, nous avons l'intention d'y participer dans la clarté, dans un esprit de responsabilité et en y apportant nos propositions.
La puissance exceptionnelle des Etats-Unis leur confère à notre sens une responsabilité non moins exceptionnelle. Nous souhaitons qu'ils acceptent ce débat légitime et qu'ils se réengagent avec nous, comme le Premier ministre les y a appelés il y quelques jours, dans une approche multilatérale et concertée des grands problèmes du monde. Il faut certes éradiquer le terrorisme, mais aussi la pauvreté,...
M. Jean-Claude Lefort. Parfaitement !
M. le ministre des affaires étrangères. ... les injustices...
M. Jean-Claude Lefort. Voilà !
M. le ministre des affaires étrangères. ... les tragédies régionales, le défaut de gouvernance d'un monde qui nous est commun. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)
Pour notre part, c'est cette approche de la mondialisation que nous continuerons à promouvoir. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert ainsi que sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Auteur : Mme Monique Collange
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique extérieure
Ministère interrogé : affaires étrangères
Ministère répondant : affaires étrangères
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 21 février 2002