politiques communautaires
Question de :
M. Antoine Carré
Loiret (1re circonscription) - Union pour la démocratie française
Question posée en séance, et publiée le 12 février 1998
M. le président. La parole est à M. Antoine Carré.
M. Antoine Carré. Madame le ministre de l'environnement, dans quelques jours, plus de cent mille chasseurs seront dans les rues de Paris (Exclamations sur divers bancs) pour manifester leurs inquiétudes sur le devenir de la chasse. Le moins que l'on puisse dire est que votre attitude peu encline au dialogue et à l'écoute sur le sujet ne les rassure pas.
Les représentants des chasseurs vous ont présenté des propositions, fondées sur des données objectives, en ce qui concerne les dates d'ouverture et de fermeture de la chasse aux gibiers migrateurs. Des parlementaires, de droite et de gauche, ont élaboré une proposition de loi améliorant le texte du 15 juillet 1994 qui fixe ces dates. Elle a fait l'objet d'un consensus. Par son refus de prendre en compte ces propositions, le Gouvernement multiplie les contentieux.
Les chasseurs souhaitent que des négociations s'engagent auprès de la commission européenne. («Très bien !» sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française et du groupe du Rassemblement pour la République.) S'agissant de la directive Natura 2000, dont personne ne conteste le bien-fondé pour protéger les habitats (Exclamations sur divers bancs) le flou persiste quant à la notion de perturbation et de dérangement, mettant en péril la pratique d'activités humaines dont la chasse fait partie. Si rien n'est précisé, les litiges se multiplieront.
Les chasseurs ne peuvent plus se contenter de quelques déclarations d'intention.
M. le président. Monsieur Carré, interrompez-vous quelques instants, car je dois demander à mes collègues, de faire silence. Ce fond sonore persistant est en effet désagréable tant pour celui qui pose une question que pour ceux qui écoutent ou qui nous regardent. (Appaudissements.)
Il est très gentil d'applaudir, mais il serait encore mieux de respecter cet appel au silence.
Monsieur Carré, poursuivez.
M. Antoine Carré. Les chasseurs ne peuvent plus se contenter de quelques déclarations d'intention du Gouvernement à propos de Natura 2000.
Pour ce qui est enfin du maintien de la chasse populaire, la contestation des ACCA - les associations de chasse communales agréées - par des opposants à la chasse remet en cause la loi initiée par le sénateur socialiste Verdeille. Or, madame le ministre, vous avez déclaré, en juillet 1997, au congrès de l'Union nationale des fédérations départementales de chasseurs, qu'il s'agissait d'une bonne loi cynégétique.
Sur ces trois points - Natura 2000, dates d'ouverture et de fermeture de la chasse aux gibiers migrateurs, soutien et renforcement des ACCA - quelle est votre position ? Souhaitez-vous que les activités cynégétiques perdurent sur le territoire national ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française et du groupe du Rassemblement pour la République et sur divers bancs du groupe socialiste.)
M. le président. Madame la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement, vous avez la parole pour une réponse assez courte, si vous le voulez bien.
Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Monsieur le président, il me sera très difficile de répondre brièvement à quatre questions !
M. le président. Il le faudra, néanmoins.
Mme le ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement. Monsieur le député, les rumeurs les plus extravagantes ont circulé à propos de mes intentions en matière de chasse. («Ah !» sur de nombreux bancs.) J'ai ainsi entendu prétendre que je souhaitais interdire la chasse le mercredi, le dimanche, raccourcir la durée de chasse à trois mois par an, démanteler la loi Verdeille, que sais-je encore ? Laissez-moi donc vous dire qu'il s'agit non seulement de rumeurs infondées, mais même de ragots (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française), si j'en crois certains comptes rendus de presse.
J'ai effectivement participé au congrès de l'Union nationale des fédérations de chasseurs au cours duquel j'ai formulé des propositions de nature à apaiser l'inquiétude des chasseurs.
Je me suis également rendue à Bruxelles, pour rencontrer personnellement la commissaire à l'environnement, Mme Bjerregaard et évoquer les modalités de sortie d'un conflit, qui dure depuis des années, sur les dates d'ouverture et de fermeture de la chasse au gibier d'eau, dans le cadre de la directive Oiseaux. En cette occasion, nous avons fait le point non seulement sur ces dates, mais aussi sur la liste des espèces protégées et sur bien d'autres sujets qui contribuent à dégrader quotidiennement le climat entre chasseurs et protecteurs de l'environnement, entre chasseurs et personnels chargés de veiller au respect des dispositions encadrant la chasse.
J'ai souhaité développer le dialogue avec les chasseurs, d'abord par la mise en place d'une commission de médiation sur les problèmes de la garderie; ensuite par la création d'un comité national de suivi de Natura 2000, afin d'approfondir les notions de perturbation et de dérangement; enfin en engageant les discussions avec les présidents de fédération qui souhaitaient, à propos de Natura 2000, que des problèmes plus ponctuels soient évoqués.
Permettez-moi de vous dire que, dans cette affaire, je n'ai pas l'impression d'avoir mal fait mon travail et d'avoir failli à l'obligation d'avoir un dialogue approfondi sur la mise en oeuvre de textes dont l'un, la directive Oiseaux -, il faut tout de même le rappeler - a été signée, au nom de la France, par Michel d'Ornano dont l'histoire n'a pas retenu qu'il était un militant fanatiquement anti-chasse !
Je tiens donc à vous faire part à la fois de ma volonté de poursuivre ce dialogue, et de ma grande méfiance à l'égard d'une manifestation qui, après celles de Périgueux et de Bordeaux, intervient dans l'immédiate proximité de temps électoraux. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.) Il sera, en effet, très facile de mêler la défense d'une activité traditionnelle à laquelle des millions de personnes sont attachées et des sentiments antieuropéens qui ont été malheureusement portés par des listes électorales que nous connaissons.
D'ailleurs, je ne suis pas absolument convaincue qu'il soit légitime de faire financer par les fédérations de chasse qui gèrent des fonds publics le déplacement, par train ou par bus, de ces dizaines de milliers de manifestants que vous avez évoqués, monsieur le député. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste et sur divers bancs du groupe communiste. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.)
Auteur : M. Antoine Carré
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Environnement
Ministère interrogé : aménagement du territoire et environnement
Ministère répondant : aménagement du territoire et environnement
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 12 février 1998