politique de l'emploi
Question de :
M. Pierre Albertini
Seine-Maritime (2e circonscription) - Union pour la démocratie française
Question posée en séance, et publiée le 25 mars 1998
M. le président. La parole est à M. Pierre Albertini.
M. Pierre Albertini. Monsieur le Premier ministre, dans une heure environ, nous recevrons pour la première fois le Premier ministre britannique, M. Tony Blair, à un moment où celui-ci assume la présidence de l'Union européenne. Il aura certainement l'occasion d'exposer quelques aspects fondamentaux de sa politique économique et sociale. Il est vrai que, sur ce terrain, d'ailleurs largement préparé par l'action de ses prédécesseurs, les résultats obtenus en Grande-Bretagne sont tout à fait éloquents. J'en retiendrai deux: la diminution très sensible du chômage et le dynamisme économique retrouvé. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Naturellement, le modèle britannique n'est pas transposable tel quel dans notre pays. (Mêmes mouvements.)
Plusieurs députés du groupe socialiste. Heureusement !
M. Pierre Albertini. Mes chers collègues, vous pouvez manifester votre sentiment d'une autre manière que par la vocifération ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française et du groupe du Rassemblement pour la République.)
Nous pourrions, il me semble, nous inspirer très utilement d'un certain nombre de mesures lorsqu'elles ont des effets bénéfiques sur l'économie et sur la société. Par exemple, la souplesse du marché du travail, l'encouragement au développement des petites et moyennes entreprises, la réduction des déficits publics, les privatisations («Ah !» sur plusieurs bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert), qui ne sont pas des demi-mesures, comme en France, mais des aspects fondamentaux de la politique économique et sociale.
Monsieur le Premier ministre, vous qui appartenez à la même famille politique que Tony Blair, entendez-vous nous proposer des mesures comparables, et notamment une diminution des impôts et des charges pesant sur les ménages et sur les entreprises ? Ce serait, à notre sens, beaucoup plus susceptible de relancer l'économie et de résorber le chômage que la réduction autoritaire et programmée du temps de travail ! (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française et du groupe du Rassemblement pour la République. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le député, vous nous proposez une comparaison intéressante entre ce qui se passe en Angleterre et ce qui se passe en France. Vous avez vous-même pris la précaution de dire que de telles comparaisons avaient leurs limites: l'histoire et les structures sociales de nos deux pays sont différentes, ainsi que la pratique de leurs élus (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)
Il reste que, dans une Europe qui se construit, nous avons à prendre des leçons, à regarder ce qui se fait ailleurs et à voir quand c'est utilisable. Parfois, ça l'est, parfois non...
Vous avez pris l'exemple de la poliique de l'emploi et vous avez évoqué le marché du travail, je constate avec un certain plaisir que nos amis britanniques mettent en oeuvre, pour lutter contre le chômage des jeunes, une politique très proche de la nôtre (Exclamations sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française et du groupe du Rassemblement pour la République) ou, pour le dire autrement, que note politique en la matière est très proche de la leur («Oh !» sur les mêmes bancs)...
M. Laurent Dominati. C'est l'inverse !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie... puisque, vous le savez, -peut-être certains d'entre vous ne le savent pas, ce qui explique leur surprise - ils ont décidé de créer des emplois-jeunes financés par des fonds publics. Avec toutefois une différence, je le reconnais («Ah !» sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française et du groupe du Rassemblement pour la République): nous, nous les avons financés sur la dépense publique existante alors qu'eux ont créé une taxe spéciale sur les entreprises pour pouvoir les payer. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) A cette nuance près, dont vous conviendrez qu'elle n'est pas celle qui vous satisfait, les emplois-jeunes sont les mêmes chez nous et chez eux. («Non !» sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française.)
M. René André. Ce n'est pas vrai !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Ce que je constate, monsieur le député, c'est qu'après de longues années de gouvernement conservateur, les citoyens britanniques ont considéré que les résultats n'étaient pas à la hauteur de leurs espérances. Dans un mouvement d'une ampleur considérable en politique - vous connaissez comme moi les résultats - ils ont préféré les travaillistes aux conservateurs et à leur politique libérale. Si je devais prendre un exemple dans la politique de nos voisins d'outre-Manche, ce serait celui-ci: prendre garde aux excès de libéralisme -, un libéralisme que vous prônez souvent: manifestement, en Grande-Bretagne, ces excès n'ont pas plu à la population. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le Président. Nous aurons l'occasion d'entendre parler bientôt, n'anticipons pas ! (Sourires)
Auteur : M. Pierre Albertini
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Emploi
Ministère interrogé : économie
Ministère répondant : économie
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 25 mars 1998