réforme
Question de :
M. Jean-Marc Ayrault
Loire-Atlantique (3e circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 25 mars 1998
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Ayrault.
M. Jean-Marc Ayrault. Monsieur le Premier ministre,... (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.)
M. le président. Mes chers collègues, je vous trouve bien dissipés !
Monsieur le président Ayrault, vous avez la parole.
M. Jean-Marc Ayrault. Nous ne sommes pas dans un conseil régional qui vient d'élire son président avec les voix du Front national ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.)
On pourrait espérer que soit observée dans cette assemblée une plus grande dignité ! (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.)
M. Renaud Muselier. Dans votre conseil régional, c'était bien pire qu'ici ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. Je vous en prie, mes chers collègues !
M. Jean-Marc Ayrault. Monsieur le Premier ministre, vous venez d'analyser les résultats des élections régionales et cantonales. Pouvez-vous nous indiquer quelles sont, pour les prochains mois, les priorités de l'action du Gouvernement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.)
M. le président. Un peu de silence, s'il vous plaît !
La parole est à M. le Premier ministre. («Question téléphonée !» sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
M. Lionel Jospin, Premier ministre. Mesdames, messieurs les députés, il me semble que, pendant suffisamment d'années, vous avez eu au Parlement l'occasion de poser des questions préparées à des Premiers ministres qui étaient tout aussi préparés pour y répondre.
M. Jean-Louis Debré. Jamais !
M. le Premier ministre. Il faut accepter que les rites parlementaires se déroulent avec des effets de surprise quand il s'agit de l'opposition, et qu'ils soient un petit peu moins surprenants quand il s'agit de la majorité.
M. Louis de Broissia. Tout cela est bien grossier et, de plus, hors sujet !
M. le Premier ministre. Pour autant, vous ne devriez ni vous inquiéter, ni même être surpris du fait que, dans la majorité aussi, on entende tirer des leçons des élections qui viennent d'avoir lieu.
M. Jean Ueberschlag. Ca, vous pouvez le dire ! Mais il fallait le faire avant !
M. le Premier ministre. Ne me dites pas qu'il fallait le faire avant...
M. Jean Ueberschlag. Si, lors des législatives !
M. le Premier ministre. Certes, il nous aurait été loisible de modifier le mode de scrutin si nous avions trouvé chez vous la volonté de le faire sans que vous nous accusiez de vouloir changer les règles avant les élections. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.)
Nous changerons certainement le mode de scrutin, et j'y reviendrai. Mais sachez que rien, dans un mode de scutin, ne garantit contre les risques de l'extrémisme ni contre les tentations d'alliance. Tout mode de scrutin recèle ses propres risques.
M. Alain Calmat. Eh oui !
M. le Premier ministre. J'espère que nous avancerons ensemble. En tout état de cause, nous aurons aussi besoin, ensemble, chacun à notre place, de résister àl'extrémisme quels que soient les modes de scrutin. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. Pierre Lellouche. Je vous en prie ! Pas de leçon de morale !
M. le président. Monsieur Lellouche, un peu de calme !
M. le Premier ministre. Le Gouvernement, fort des résultats des dernières élections, notamment des élections cantonales, c'est-à-dire de celles qui ont été les plus claires et les plus nettes, entend poursuivre et amplifier son action.
J'attendrai que retombe l'émotion née du choc de ces élections, que nous connaissions en particulier tout le paysage politique régional qui résultera des décisions des prochains jours ou des prochaines semaines, pour rappeler au pays, et celui-ci est en droit de le souhaiter, les grandes orientations de l'action du Gouvernement - elle va se poursuivre.
Mais puisque le thème de la rénovation de la vie politique a été abordé, soyez persuadé que j'entends bien, avec le Gouvernement, tenir les engagements de rénovation...
M. Arthur Dehaine. Du Président de la République !
M. le Premier ministre. ... qui étaient exprimés dans ma déclaration de politique générale et que nous avons commencé à mettre en oeuvre,...
M. Jean-Louis Debré. Mauvaise oeuvre !
M. le Premier ministre. ... notamment en ce qui concerne la place des femmes dans la vie publique - cette majorité témoigne de l'effort accompli - (Applaudissements sur les mêmes bancs), du cumul des mandats ou de l'indépendance de la justice.
C'est ainsi que, le 8 avril, les textes concernant la limitation du cumul des mandats seront présentés au conseil des ministres puis à l'Assemblée nationale afin qu'elle puisse en discuter. Cela signifie que le Gouvernement est prêt et qu'il avait travaillé sur le sujet avant même le résultat des dernières élections. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
De même, le 15 avril, la ministre de la justice, garde des sceaux, Mme Elisabeth Guigou, présentera au conseil des ministres les textes concernant la réforme de la justice.
Je prends devant vous l'engagement - je réponds ainsi autant à M. Ayrault qu'à M. Debré, qui nous a demandé de présenter rapidement des propositions sur la réforme des modes de scrutin - que le Gouvernement fera rapidement des propositions à ce sujet. Elles concerneront au premier chef le mode de scrutin pour les élections régionales. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
Nous poursuivrons dans d'autres domaines, comme le Gouvernement s'y est engagé, le travail de rénovation de la vie démocratique à propos de laquelle j'ai constaté que le Président de la République éprouvait les mêmes exigences.
Nous savons tous que, pour retrouver équilibre et confiance, notre pays, nos concitoyens ont besoin de réponses et de résultats dans d'autres domaines, en particulier dans celui de l'emploi. Dès ce soir, mesdames, messieurs les députés, vous allez examiner, en deuxième lecture, le projet sur les 35 heures, qui ouvre la voie à des négociations dans les entreprises sur la diminution du temps de travail.
Mme Odette Grzegrzulka. Très bien !
M. le Premier ministre. Nous poursuivrons la politique de croissance qui est en train de recréer de l'emploi en France.
Quant aux mesures de lutte contre les exclusions, un projet de loi sera demain présenté par Mme Martine Aubry au conseil des ministres.
Mme Odette Grzegrzulka. Très bien !
M. le Premier ministre. Vous voyez donc que le Gouvernement agit en temps et en heure, comme il s'y est engagé.
Nous poursuivrons également notre action contre l'insécurité...
M. Jean-Louis Debré. Elle augmente !
M. le Premier ministre. ... notamment grâce au projet de loi sur les polices municipales présenté par le ministre de l'intérieur et aux efforts qui sont les siens en ce domaine.
M. Jean-Louis Debré. La langue de bois !
M. le Premier ministre. De plus, nous avons une approche volontariste, en même temps que réaliste, des problèmes de la politique européenne, que nous ne réduisons pas à sa dimension monétaire: nous voulons lui donner une dimension économique et sociale, tournée vers l'emploi, tout en défendant nos intérêts. La négociation agricole, dont a parlé le ministre des affaires européennes, en donne un exemple. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
C'est en faisant reculer le chômage et les injustices, en affirmant une vision de la société et de la République dans laquelle le plus grand nombre de Françaises et de Français puissent se reconnaître, que l'on fera reculer au-delà des réformes institutionnelles l'extrémisme de droite...
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la démocratie française. Et celui de gauche ?
M. le Premier ministre. ... dans notre pays et que l'on redonnera confiance aux Françaises et aux Français ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur plusieurs bancs du groupe communiste.)
Auteur : M. Jean-Marc Ayrault
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Etat
Ministère interrogé : Premier Ministre
Ministère répondant : Premier Ministre
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 25 mars 1998