Question au Gouvernement n° 475 :
PAC

11e Législature

Question de : Mme Marie-Hélène Aubert
Eure-et-Loir (4e circonscription) - Radical, Citoyen et Vert

Question posée en séance, et publiée le 26 mars 1998

M. le président. La parole est à Mme Marie-Hélène Aubert.
Mme Marie-Hélène Aubert. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture et concerne aussi la politique agricole commune, mais, pour ne pas lasser l'assistance, elle sera plus précise que la précédente posée sur le même sujet et portera davantage sur la loi d'orientation agricole et sur son articulation avec la politique agricole commune.
Tout le monde l'a souligné, la réforme de la PAC 1992, et, plus encore, l'approfondissement qui nous est proposé aujourd'hui tendent à nous faire oublier que la production agricole n'est pas une production comme les autres, mais qu'elle est liée de façon très étroite à un territoire, à des sols, à l'utilisation de ressources naturelles, aux hommes et aux femmes qui travaillent sur ces terres. On ne peut donc pas lui appliquer une logique de marché et de compétitivité économique à la sauce néolibérale.
Nous savons, monsieur le ministre, que cet oubli n'est pas le vôtre et que, dans votre projet de loi d'orientation agricole, vous nous proposez un véritable contrat entre l'agriculteur et la société, modulant les aides en fonction de cahiers des charges adaptés aux contextes régionaux. Bref, vous nous invitez, à juste titre, à adopter une logique totalement différente de celle de la Commission européenne qui, elle, semble plutôt obnubilée par le marché et l'Organisation mondiale du commerce.
Dans ces conditions, ne craignez-vous pas que la future PAC vienne compromettre le succès de la loi d'orientation ? Quelles initiatives concrètes comptez-vous prendre pour convaincre nos partenaires européens de mieux considérer l'impact territorial, social, environnemental et sanitaire de l'agriculture et des aides qui lui sont attribuées ?
Sans une parole décisive de la France, le fameux modèle agricole européen dont on nous rebat les oreilles, ce modèle revendiqué haut et fort par tous nos décideurs, nous sera encore une fois imposé par la puissance américaine et les tenants, même aussi séduisants que Tony Blair, d'un credo néolibéral soi-disant moderne, mais en fait dévastateur pour le plus grand nombre et pour l'environnement. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et du groupe communiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.
M. Louis Le Pensec, ministre de l'agriculture et de la pêche. Madame la députée, vous avez eu raison de situer les discussions sur la future politique agricole commune dans le contexte plus large des négociations multilatérales à venir au sein de l'Organisation mondiale du commerce. Si nous nous contentions d'une baisse généralisée des prix et d'une augmentation des soutiens, nous aurions passé un marché de dupes, car un jour dans les négociations sur l'OMC, ces aides, qui figurent, comme l'on dit, dans la «boîte bleue», seront dans l'oeil du cyclone et feront l'objet de pressions telles que leur pérennité n'est pas assurée.
M. Bernard Charles. C'est vrai !
M. le ministre de l'agriculture et de la pêche. C'est là une question centrale et c'est ce qui nous conduit à considérer que la France, première nation agricole de l'Europe, doit se présenter, mardi, comme une force de proposition, après avoir dit quelles propositions de la Commission ne sont pas acceptables. Nous demanderons que la politique agricole soit refondée sur de nouveaux objectifs. La dimension d'aménagement du territoire doit notamment être prise en compte, ainsi que les autres fonctions de l'agriculture. Pour cela, notre pays mais aussi l'Europe disposent de réels atouts, et je suis convaincu que la France peut infléchir les propositions de la Commission, ce qu'elle entreprendra de faire dès mardi prochain.
Entre la loi d'orientation, les discussions sur la PAC et l'Organisation mondiale du commerce, il y a un fil conducteur qui est le découplage entre les aides et la production. Nous nous engagerons dans cette voie dès la loi d'orientation agricole, qui prend en compte la dimension territoriale de l'agriculture et qui entend, autour d'un territoire, fonder un nouveau pacte. Le contrat territorial d'exploitation entre les agriculteurs et la nation traduit cette nouvelle approche. Oui, il fallait refonder sur d'autres bases la politique agricole nationale, et c'est la même bataille que nous allons livrer au niveau communautaire.
Les propositions qui nous sont soumises n'excluent pas de telles orientations, mais la déclinaison qu'en fait la Commission les rendent inintelligibles, incompréhensibles, et donc inapplicables. A nous de redonner du sens à la politique agricole en servant déjà, ce sera le cas dès le printemps, notre politique nationale à travers la loi d'orientation agricole. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Données clés

Auteur : Mme Marie-Hélène Aubert

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Agriculture

Ministère interrogé : agriculture et pêche

Ministère répondant : agriculture et pêche

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 26 mars 1998

partager