Question au Gouvernement n° 523 :
Kosovo

11e Législature

Question de : M. Pierre Brana
Gironde (5e circonscription) - Socialiste

Question posée en séance, et publiée le 9 avril 1998

M. le président. La parole est à M. Pierre Brana.
M. Pierre Brana. Ma question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères.
Monsieur le ministre, je reviens d'une mission parlementaire au Kosovo.
Dans la Drenica, où se sont déroulés des événements tragiques les dernières semaines, nous avons constaté un quadrillage serré par des forces puissamment armées, y compris d'engins lourds. Les contrôles sont multiples et la population évite, à l'évidence, de circuler.
Tous nos interlocuteurs, tant serbes qu'albanais, estiment que le statu quo n'est plus possible. A tout moment, de nouveaux incidents graves peuvent éclater et entraîner des massacres qui auraient des répercussions internationales puisque les Albanais du Montenegro et de la Macédoine que nous avons rencontrés ont tenu des propos sans ambiguïté: ils ne resteront pas indifférents.
Si l'on veut éviter que le Kosovo ne devienne une nouvelle Bosnie, des négociations doivent s'engager le plus rapidement possible. L'annonce par le Président Slobodan Milosevic d'un référendum sur l'opportunité d'une médiation internationale m'apparaît comme une opération de retardement, avec tous les risques que cela comporte.
Monsieur le ministre, je sais tous les efforts que vous avez déployés ces derniers mois pour aider à trouver une solution juste. Mais ne croyez-vous pas qu'il faille intensifier les démarches après cette annonce de référendum afin que Milosevic sache bien que la détermination des pays du groupe de contact reste intacte pour obtenir l'ouverture rapide de véritables négociations ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.
M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères. Monsieur le député, je redirai ici qu'à la différence de la situation qui prévalait il y a quelques années au moment de la désintégration de la Yougoslavie, il y a aujourd'hui, au sujet du Kosovo, une cohérence totale, que nous efforcerons de maintenir constamment, chez tous les pays concernés: le groupe de contact, l'ensemble des pays européens, l'ensemble des pays voisins.
Cette cohérence s'exprime dans le fait que personne ne soutient la demande d'indépendance du Kosovo, qui ferait de nouveau entrer cette région de l'Europe, qui n'en a pas besoin, dans un cycle de perturbations et d'affrontements. Cela dit, personne ne considère que le statu quo soit tolérable.
Nous concentrons notre action pour obtenir une autonomie substantielle dont nous n'allons pas définir a priori les contours exacts: ce sera aux négociateurs de le faire quand la négociation aura commencé.
Je souligne après vous que tous nos efforts actuels - quand je dis nous, je parle de la France, de l'Allemagne et des pays du groupe de contact - tendent à convaincre les responsables yougoslaves et serbes de mettre sur la table une proposition permettant aux Albanais d'accepter à leur tour d'entrer dans la négociation. Ils ont, certes, fait des pas en avant, mais pas suffisamment. Il faut qu'ils aillent plus loin en ce qui concerne l'absence de préalable et la composition de la délégation, qui doit engager clairement non seulement les Serbes mais aussi la fédération yougoslave.
Quant aux Albanais du Kosovo, nous les encourageons à entrer dans la négociation. M. Rugova a formé une équipe de conseillers-négociateurs bien choisis - des gens modérés et responsables. Mais il n'est pas encore assez sûr de la situation pour franchir le pas: il souhaite une présence internationale et un engagement du côté de Belgrade qui ne va pas pour le moment à cause de l'annonce d'un référendum, qui constitue une manoeuvre dilatoire.
Toute notre action vise à faire franchir aux uns et aux autres les quelques mètres qui permettront de commencer la négociation. Ce n'est qu'à partir de ce moment-là que nous pourrons penser que l'engrenage encore en marche aujourd'hui - est suspendu. Mais ce n'est pas encore le cas. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Données clés

Auteur : M. Pierre Brana

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Politique extérieure

Ministère interrogé : affaires étrangères

Ministère répondant : affaires étrangères

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 9 avril 1998

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