personnes défavorisées
Question de :
Mme Conchita Lacuey
Gironde (4e circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 22 avril 1998
M. le président. La parole est à Mme Conchita Lacuey.
Mme Conchita Lacuey. Madame la ministre de l'emploi et de la solidarité, malgré des dispositifs successifs destinés à combattre le chômage, nous sommes obligés de constater aujourd'hui que l'exclusion sociale gagne du terrain dans notre pays. («Ah !» sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.)
Ne pas se laisser gagner par la fatalité en luttant contre l'exclusion, c'est le pari de la nouvelle loi présentée par le Gouvernement: c'est la manifestation évidente d'une volonté de redonner à chacun la place qui lui est due. Je sais qu'une des priorités de cette loi est de garantir aux plus démunis l'accès aux droits fondamentaux. L'effort budgétaire est remarquable, les mesures prises sont significatives. Soyez assurée de ma totale confiance dans ce projet capital pour la cohésion de notre société.
Cependant, je souhaite attirer votre attention sur l'écart important qui existe entre l'élaboration d'une loi généreuse et humaine et sa mise en pratique sur le terrain.
Au cours de la consultation que j'ai menée dans ma circonscription sur les problèmes liés à l'exclusion, j'ai relevé des dysfonctionnements graves aux niveaux de la caisse d'allocations familiales, des ASSEDIC et de l'ANPE. Les modalités pratiques de la mise en oeuvre des dispositifs donnent souvent lieu, pour les personnes les plus fragilisées, à une interprétation trop rigide de la réglementation qui occulte le caractère humain.
Il faut donner des moyens aux services publics. Il faut faire évoluer le fonctionnement des administrations, en privilégiant la formation des personnels pour améliorer la connaissance et l'accueil des populations très démunies. La revendication essentielle des exclus est de ne plus être considérés comme des demandeurs perpétuels mais comme des citoyens à part entière. C'est une question de dignité humaine et je sais, madame la ministre, que c'est une valeur essentielle pour vous.
C'est la raison pour laquelle je vous demande ce que vous envisagez de faire de manière concrète pour amener les diverses institutions gestionnaires de prestations à revoir leur fonctionnement concernant l'accueil des usagers et le traitement des dossiers. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité, pour deux minutes seulement.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Madame la députée, je veux d'abord vous remercier pour votre soutien au projet de loi contre les exclusions (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française), qui, comme vous l'avez dit, vise d'abord à faire sortir le plus vite possible, chaque fois que c'est faisable, nos concitoyens de l'assistance pour leur redonner une vraie place dans la société.
Nous le ferons en donnant à tous accès aux droits fondamentaux - logement, emploi, santé, culture -, et nous reparlerons de ce sujet à l'Assemblée dans quelques jours. Nous le ferons en menant une action de prévention contre les exclusions, les expulsions et l'endettement, et en traitant les situations d'urgence.
Mais vous avez raison de dire qu'il faut aussi changer les comportements de ceux qui sont au contact des plus exclus. Je l'ai dit plusieurs fois devant l'Assemblée, il n'est pas acceptable qu'une famille, qu'une personne, pour que ses droits soient appliqués, doive frapper de bureau en bureau et expliquer, parfois dans des conditions difficiles, sa situation personnelle et sa douleur. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
Nous allons changer cela et nous avons commencé à le faire. Nous avons, avec M. le Premier ministre, rencontré les préfets ce matin afin qu'il y ait une coordination des mesures d'urgence pour que, quel que soit le guichet où l'on se présente, on ait la réponse sans avoir besoin de courir à un autre guichet.
Mais nous le ferons aussi grâce à la réforme que le ministre de la fonction publique met en place pour que les établissements publics, les services publics et les fonctions publiques soient plus ouverts aux assujettis et mieux à même de rendre service à chacun. Nous ferons en sorte que toutes les dispositions de la loi contre les exclusions visent à simplifier, à ce que chacun ait une information sur ses droits et que les différents dispositifs soient le plus efficaces possible dans les plus brefs délais.
Je vous remercie à nouveau pour votre question (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française), car vous avez évoqué un point essentiel dont souffrent beaucoup de nos concitoyens exclus, qui voudraient être entendus et souhaitentque leur dignité et leur autonomie soient reconnues. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Auteur : Mme Conchita Lacuey
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Politique sociale
Ministère interrogé : emploi et solidarité
Ministère répondant : emploi et solidarité
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 22 avril 1998