Question au Gouvernement n° 548 :
délinquance

11e Législature

Question de : M. Gérard Hamel
Eure-et-Loir (2e circonscription) - Rassemblement pour la République

Question posée en séance, et publiée le 23 avril 1998

M. le président. La parole est à M. Gérard Hamel.
M. Gérard Hamel. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur.
Monsieur le ministre, en juillet 1995, j'avais proposé, pour mettre un terme aux violences commises par les mineurs, d'éloigner ceux-ci de leur milieu ou de leur famille. A l'époque, cette mesure avait été durement attaquée par vos amis. Aujourd'hui, je me réjouis de vous voir proposer la même idée.
En juillet 1997, j'ai pris un arrêté municipal demandant le recueil des enfants de moins de douze ans circulant seuls la nuit. Cet arrêté a été victime d'attaques virulentes, notamment de la part de votre collègue, Mme Royal, qui a osé dire que je prenais les enfants pour des chiens.
M. Michel Bouvard. C'est honteux !
M. Gérard Hamel. Cet arrêté a eu au moins le mérite d'ouvrir dans le pays un débat essentiel.
En octobre 1997, j'ai déposé une proposition de loi dont le but était, entre autres, de responsabiliser les parents. Aujourd'hui, le rapport remis au Premier ministre recommande une telle responsabilisation.
Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République. Très bien !
M. Gérard Hamel. Je m'inquiète que Mme Guigou ait refusé de commenter ce rapport alors que la délinquance des mineurs relève de sa compétence.
Quoi qu'il en soit, en dépit de toutes ces incohérences, voire toutes ces contradictions gouvernementales, il est nécessaire d'agir efficacement et rapidement. Les Français, tous les jours aux prises avec les voitures brûlées, les bâtiments dégradés, les vols, les agressions à n'importe quelle heure de la journée et de la nuit, n'en peuvent plus.
Puisque vous êtes maintenant d'accord avec nous sur l'ensemble de ces points, je vous demande de tout mettre en oeuvre en urgence afin que des mesures soient votées par notre assemblée avant l'été. Pour une fois, la procédure d'urgence aurait une justification. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Monsieur le député, la ville de Dreux a en effet le taux de délinquance le plus élevé de France. Ce n'est pas un fait nouveau, et il faut s'interroger sur les raisons pour lesquelles ce taux est tellement élevé. J'ai d'ailleurs posé la question à des fonctionnaires de la police nationale.
Vous devriez réfléchir au fait qu'on ne peut pas séparer une politique de répression d'une politique de prévention. L'inverse est vrai aussi. Il ne faut pas toujours mettre de l'huile sur le feu et il faut traiter les problèmes de sécurité, sécurité à laquelle nos concitoyens ont droit, dans un esprit de responsabilité.
Le Gouvernement a fixé un triptyque au colloque de Villepinte: citoyenneté, proximité et coopération efficace, notamment entre la police et la justice. C'est dans cette voie qu'il faut s'orienter.
Nous avons demandé un rapport à Mme Lazerges et à M. Balduyck. Ils ont fait plusieurs suggestions, notamment le renforcement des moyens mis en oeuvre pour remédier à l'explosion de la délinquance des mineurs. C'est un fait malheureusement ancien, qui ne date pas d'il y a un an. On peut relever cette croissance exponentielle de la délinquance des mineurs depuis au moins quatre ou cinq ans.
Des mesures très diverses doivent être prises. Elles ne se résument pas à l'éloignement, qui ne saurait d'ailleurs concerner qu'une poignée de délinquants multirécidivistes. C'est toute une politique de responsabilisation, vous l'avez d'ailleurs dit vous-même, en amont des acteurs de l'éducation, qui est nécessaire.
Pour ma part, j'ai une ligne tout à fait claire. Je ne veux pas me réfugier dans un discours qui se bornerait à la prévention. C'est un discours angélique, et tel n'est pas mon genre. Je préfère appeler un chat un chat. (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste.) Quand il y a un viol de la loi, il faut un rappel à la loi, mais nous devons aussi aborder ces problèmes de sécurité sans les exacerber, avec le désir de les dominer.
Je suis allé dans votre ville il y a deux ans. J'ai passé deux heures avec des jeunes originaires des dernières vagues de l'immigration. J'ai parlé avec eux, et je vous ai même défendu car ils ne voyaient pas d'autre solution à leur problème de chômage que l'octroi de petits boulots par la mairie de Dreux. Je leur ai expliqué que le problème n'était pas seulement que M. Hamel puisse leur fournir des emplois, qu'il fallait regarder aussi vers les usines qui sont implantées non loin de chez vous, Philips, je crois, ou une entreprise d'électronique.
Nous avons un effort à faire vis-à-vis de ces jeunes pour qu'il n'y ait pas de discrimination à leur égard, pour que le chemin de l'emploi, de l'intégration à la citoyenneté leur soit ouvert. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)
Si nous ne réglons pas ce problème, nous aurons dans vingt ans le problème des harkis à la puissance mille. Nous devons tous nous y mettre, en nous retroussant les manches. (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste.)

Données clés

Auteur : M. Gérard Hamel

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Jeunes

Ministère interrogé : intérieur

Ministère répondant : intérieur

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 23 avril 1998

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