Question au Gouvernement n° 56 :
police municipale

11e Législature

Question de : Mme Yvette Benayoun-Nakache
Haute-Garonne (4e circonscription) - Socialiste

Question posée en séance, et publiée le 9 octobre 1997

M. le président. La parole est à Mme Yvette Benayoun-Nakache.
Mme Yvette Benayoun-Nakache. Monsieur le ministre de l'intérieur, dans certaines municipalités, particulièrement celle de Vitrolles, la police municipale opère, on le sait, des contrôles d'identité avec des armes de gros calibre, outrepassant largement ses droits, et se substitue par là même à la police nationale.
Dans un climat général déjà lourd et pesant, alors même que les évêques de France ont, à Drancy, exprimé leur repentance et que la police nationale en a fait de même, eu égard à ses responsabilités dans la déportation des Juifs durant la guerre, la police municipale vitrollaise se permet d'agir brutalement et sans aucun respect de la légalité.
C'est la distinction même entre police nationale et police municipale qui est ici atteinte. Et nul ne sera surpris que cela se passe précisément dans l'une des quatre villes dirigées par le Front national.
Ma question sera donc simple: où en est, monsieur le ministre, le projet de loi sur les polices municipales ? Que comptez-vous entreprendre afin que la police municipale de Vitrolles, comme d'autres d'ailleurs, rentre dans le cadre légal ? Il s'agit de faire en sorte que la gangrène vitrollaise ne se propage pas et que, partout sur le territoire, le seul ordre qui règne soit l'ordre républicain. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le président. Je vous rappelle, ma chère collègue, qu'il faut s'efforcer de parler sans notes.
La parole est à M. le ministre de l'intérieur.
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Puis-je garder mes lunettes, monsieur le président ? (Sourires.)
M. le président. Oui, mais seulement pour ne pas lire (Rires.)

M. le ministre de l'intérieur. Madame la députée, vous avez évoqué des incidents survenus dans le courant de l'été, le 17 août 1997, dans le quartier de la Frescoule à Vitrolles. Un habitant a été conduit à faire usage d'une arme à feu contre des adolescents. Le premier adjoint de cette ville, M. Fayard, a pris parti pour le tireur. Ce n'est pas la première fois que l'on voit l'extrême droite alimenter ce dont elle se nourrit par ailleurs, c'est-à-dire des tensions entre diverses catégories de la population, alors que tout élu, et sur tous ces bancs, sait qu'il convient, dans notre République, de faire respecter quelques règles qui sont les conditions de la vie en commun.
Une polémique s'est élevée du fait que Mme Mégret, dans sa lettre du maire, a pris vivement à partie la police nationale. J'ai assuré la police nationale de mon soutien, car il se trouve qu'à Vitrolles, la délinquance a baissé de plus de 9 % depuis le début de cette année et que le mouvement est à peu près continu depuis quelques années. (Murmures sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
Il y a à Vitrolles une police municipale d'une cinquantaine de membres, dotés d'uniformes, de combinaisons noires, type GIPN, et armés de 357 Magnum, de bâtons de défense de type Tonfa, toutes choses qui rappellent la police nationale. Or il me paraît important de bien distinguer la responsabilité de la police nationale, qui est d'assurer la sécurité...
M. Pierre Lellouche. Vous faites de la publicité pour le Front national ! C'est honteux !
M. le ministre de l'intérieur. ... sur tout le territoire de la République. Il n'appartient pas à une police municipale d'opérer des flagrants délits, de créer des brigades d'intervention du type brigade anti-criminelle, ni de pratiquer des contrôles d'identité.
Il faut donc qu'un projet de loi, qui, au niveau de mes services, est désormais prêt, mette un terme à ces dérives, dans l'intérêt public, en rappelant aux polices municipales leurs compétences. Celles-ci peuvent être élargies, par exemple, dans le domaine de la circulation, mais ces unités ne peuvent pas être armées, sinon, exceptionnellement, avec des armes de sixième catégorie; en tout état de cause, leur uniforme et leur attitude doivent permettre de les distinguer clairement de la police nationale.
M. Patrick Ollier. Il faut les habiller en rose !
M. le ministre de l'intérieur. La police nationale, c'est le domaine de l'Etat, et son rôle est d'assurer la sécurité sur le territoire national. L'ordre républicain est fondé sur la liberté, sur la loi, sur quelques règles que nous avons adoptées en commun. La République est un régime de liberté, ce n'est pas un régime de faiblesse. Il faudra le rappeler à ceux qui seraient tentés de croire le contraire. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. Jean-Paul Charié. Il faudrait peut-être s'exprimer autrement !

Données clés

Auteur : Mme Yvette Benayoun-Nakache

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Police

Ministère interrogé : intérieur

Ministère répondant : intérieur

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 9 octobre 1997

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