heures supplémentaires
Question de :
M. Georges Hage
Nord (16e circonscription) - Communiste
Question posée en séance, et publiée le 9 octobre 1997
M. le président. La parole est à M. Georges Hage.
M. Georges Hage. Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.
A la Française de Mécanique de Douvrin, Pas-de-Calais, 40 000 heures supplémentaires sont effectuées chaque mois, soit l'équivalent de 200 emplois à temps complet.
M. Pierre Lellouche. Nationalisez !
M. Georges Hage. Il en est de même à Renault Douai: 260 000 heures supplémentaires l'année dernière, mais tout autant dans les sept premiers mois de cette année-ci ! Pour la direction de ces deux entreprises, plus que réticentes devant l'embauche, la réduction du temps de travail est un mythe et la lutte contre le chômage un slogan. L'Etat y est pourtant l'actionnaire principal. («Ah !» sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.)
Une enquête récente de l'INSEE estime à 400 millions par an le nombre d'heures supplémentaires, soit 230 000 emplois à temps plein ! C'est que le patronat y trouve son compte: flexibilité, annualisation, recours au travail de nuit et toutes ces sortes de fluidités du code du travail. Sans oublier la pression patronale ou l'insuffisance des salaires qui concourent à cette dérive perverse.
Madame le ministre, après-demain s'ouvre la conférence sur l'emploi et les salaires. Si la gauche est plurielle, celle que je fréquente souhaite en l'occurrence un Premier ministre pugnace, et non arbitre impartial dans cet affrontement de classes. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Monsieur le député, s'il est une chose que l'on n'accepte pas en France, c'est qu'il y ait plus de 3,5 millions de chômeurs et en même temps des hommes et des femmes qui fassent des heures supplémentaires nombreuses et de manière permanente.
Chacun comprend que les entreprises aient recours à des heures supplémentaires afin de répondre dans les délais à une commande ou lorsque des stocks se sont brutalement effondrés car la demande est forte. Mais ce que nous n'acceptons pas, ce sont ces heures supplémentaires en grand nombre, qui usent du reste la santé des salariés et ne laissent pas la place à ceux qui ont besoin de travail.
Les chiffres que vous avez cités sont réels. L'INSEE vient de les fournir. Ces 400 millions d'heures supplémentaires correspondent théoriquement, il faut bien le dire, à 230 000 emplois à temps plein.
Je suis très attentive à cette situation. Vous avez cité deux exemples. Pour ce qui concerne l'usine de Douvrin qui fabrique des moteurs et qui appartient à deux grands constructeurs français, le très fort accroissement des heures supplémentaires est dû au lancement d'un nouveau moteur et à la constitution de stocks pour les anciens moteurs afin de répondre - ce dont nous ne pouvons que nous réjouir - à une demande particulièrement élevée du marché italien. L'inspecteur du travail a formulé des remarques. On nous a assuré un retour à la normale dans les prochaines semaines.
M. Patrick Ollier. Plus de commandes, donc plus de travail !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. L'usine de Douai, quant à elle, se caractérise depuis longtemps par beaucoup trop d'heures supplémentaires et beaucoup trop de travail temporaire. J'avais d'ailleurs été amenée à en parler entre 1991 et 1993. Je regrette que cet effort n'ait pas été poursuivi par la suite. Toutefois, des investissements complémentaires réalisés cet été et une nouvelle organisation du travail nous laissent à penser que les choses vont s'améliorer.
Pour répondre de manière plus globale, je crois, au regard des centaines d'emplois créés ces dernières années grâce à la diminution de la durée du travail, que la réduction des heures supplémentaires sera un des éléments clés du processus qui ne manquera pas de s'engager après la réunion de demain avec les partenaires sociaux.
J'ai entendu M. Séguin ironiser sur Chambéry et sur l'Italie. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.) Ce n'est pas moi, c'est lui ! Je lui fais remarquer que, à Luxembourg, non seulement l'Italie a rappelé pas plus tard que lundi soir la nécessité de réduire les heures supplémentaires, mais que l'Espagne aussi - et son gouvernement, me semble-t-il, est pourtant plus proche de vos opinions que des nôtres - a demandé à la Commission européenne de diminuer les heures supplémentaires sur l'ensemble de l'Europe. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert, et sur plusieurs bancs du groupe communiste.).
Auteur : M. Georges Hage
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Travail
Ministère interrogé : emploi et solidarité
Ministère répondant : emploi et solidarité
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 9 octobre 1997