politique fiscale
Question de :
M. Jean-Claude Sandrier
Cher (2e circonscription) - Communiste
Question posée en séance, et publiée le 6 mai 1998
M. le président. La parole est à M. Jean-ClaudeSandrier.
M. Jean-Claude Sandrier. Monsieur le ministre de l'économie et des finances, il y a quelques jours, ici même, le collègue rapporteur général de la commission des finances déclarait que la question d'une taxe sur les mouvements financiers et spéculatifs devait être à nouveau posée. Inutile de vous dire la satisfaction des élus communistes devant ce souhait qu'eux-mêmes expriment depuis fort longtemps.
En effet, un nombre croissant d'économistes considèrent que les vraies charges qui pèsent sur notre société, ses salariés, les petites et moyennes entreprises sont dues à l'argent qui fructifie seulement en circulant. Cela représente 1 200 milliards de dollars chaque jour, dont 70 % correspondent à des opérations spéculatives, certains vivant comme des parasites sur la société.
Il existe une façon, parmi d'autres, de rendre cet argent utile pour l'investissement, la consommation et l'emploi: il suffit de taxer les mouvements financiers. Quand le Gouvernement va-t-il engager les initiatives nécessaires à la mise en oeuvre de cette mesure de salubrité publique. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Monsieur le député, je suis heureux que, lors du débat sur l'euro, le rapporteur général ait eu l'occasion d'exprimer une préoccupation qui est traditionnellement celle du groupe communiste.
Les mouvements spéculatifs, dont vous avez rappelé l'ampleur, sont effectivement très déséquilibrants pour le monde dans lequel nous vivons. Le revenu qu'ils rapportent est, c'est vrai, un pouvoir d'achat procuré à certains sans qu'une production en soit à l'origine. Par ailleurs, nous avons vu lors de la crise asiatique, comment ils pouvaient être à l'origine de la déstabilisation d'économies entières, avec les conséquences sociales que cela entraîne ensuite pour les peuples des pays concernés lorqu'il faut bien finir par redresser les choses. Nous devons donc faire en sorte de limiter ces spéculations.
De ce point de vue, d'ailleurs, vous aurez remarqué pendant la crise asiatique que la perspective de l'euro a évité toute déstabilisation en Europe, mais elle n'a pas suffit, bien entendu, pour stabiliser l'ensemble de la planète.
La dernière réunion des ministres des finances du G7, au cours de laquelle j'ai rencontré mes collègues des principaux pays, s'est préoccupée de cette question en proposant un ensemble de mesures visant à une plus grande transparence - il faut connaître avant de pouvoir agir - et une meilleure surveillance des mouvements de capitaux, des organismes publics, des banques centrales, ou bien des organismes privés, notamment des fonds nord-américains, qui ont, on le sait, des ressources considérables.
L'idée que vous émettez a de nombreux supporters, et certains la trouvent très séduisante, mais elle a une faiblesse: c'est que tout le monde doit prendre la décision en même temps.
M. Richard Cazenave. Un peu comme pour les 35 heures !
M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Les pays qui ne suivraient pas les autres deviendraient sinon un paradis fiscal, et la mesure profiterait au crime.
Le problème est celui du contrôle fiscal. En France, Christian Sautter et moi-même avons donné des instructions très rigoureuses pour que toutes les plus-values sur devises, qu'elles soient faites par des particuliers ou par des entreprises, soient correctement fiscalisées et répertoriées.
Nous devons nous orienter vers une meilleure surveillance des flux de capitaux, vers une ouverture ordonnée du monde financier et non une libéralisation débridée. Le Gouvernement se préoccupe comme vous de la façon dont nous pouvons, grâce à une coopération internationale, éviter que des mouvements erratiques de capitaux ne déstabilisent des économies entières. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. Richard Cazenave. Ce n'est pas demain que ça va bouger !
Auteur : M. Jean-Claude Sandrier
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Impôts et taxes
Ministère interrogé : économie
Ministère répondant : économie
Date : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue au Journal officiel du 6 mai 1998