questions au Gouvernement
Question de :
M. Didier Quentin
Charente-Maritime (5e circonscription) - Rassemblement pour la République
Question posée en séance, et publiée le 8 octobre 1998
M. le président. La parole est à M. Didier Quentin.
M. Didier Quentin. Monsieur le président, ma question s'adresse à M. le Premier ministre, et je dis bien à M. le Premier ministre car elle concerne le Gouvernement dans son ensemble et ses rapports avec le Parlement. (Ah ! sur les bancs du groupe socialiste.)
Je pense en effet nécessaire, pour la clarification du rôle et des pouvoirs de l'Assemblée nationale, de redéfinir l'objet des deux séances hebdomadaires de questions au Gouvernement. S'agit-il pour les ministres d'un exercice d'autoglorification (Sourires sur les bancs du Gouvernement. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste) ou les ministres doivent-ils apporter des réponses précises aux questions des députés ?
M. Jean-Claude Gayssot, ministre de l'équipement, des transports et du logement. Des réponses précises à des questions qui ne le sont pas !
M. Didier Quentin. Si, comme nous sommes un certain nombre à le penser sur ces bancs, il s'agit bien d'informer la représentation nationale, je me permets de vous rappeler, monsieur le Premier ministre, que aux deux questions qu'il a posées hier le groupe RPR n'a pas reçu de réponse. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. Jean Glavany. Mais si, de très bonnes réponses. Seulement, vous êtes aveugles et sourds !
M. Didier Quentin. Premièrement, oui ou non la campagne de promotion des 35 heures a-t-elle reçu le visa du contrôleur financier ?
Deuxièment, oui ou non les chiffres d'augmentation de la délinquance et de la criminalité enregistrés depuis le début de l'année 1998 seront-ils rendus publics ? Et si oui, à quelle date ?
M. Arnaud Montebourg. Démago !
M. Didier Quentin. Nous attendons, monsieur le Premier ministre, des réponses précises à ces deux questions. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. le président. La parole est à M. le Premier ministre. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. Lionel Jospin, Premier ministre. Monsieur le député, je repondrai moi-même à votre question, puisque vous le souhaitez, mais je souligne que le Premier ministre reste libre d'apprécier s'il doit répondre lui-même ou s'en remettre à l'un des membres du Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Tout serait plus simple si les intitulés de vos questions au Gouvernement tels que vous nous les transmettez étaient plus clairs. Mais, que dis-je - je rassure M. Debré qui pourrait penser ne plus tenir ses troupes, ce qui est impossible à imaginer (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) -, votre souci de l'obscurité dans le questionnement est tel que vous ne nous les transmettez même pas. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République).
M. Thierry Mariani. Vous faisiez pareil !
M. le Premier ministre. J'y reviendrai !
En fait, nous savons simplement que tel ou tel député de l'opposition, RPR ou UDF...
Plusieurs députés du groupe Démocratie libérale et Indépendants. Ou Démocratie libérale !
M. le Premier ministre. ... ou Démocratie libérale - enfin je ne veux pas décliner tous les sigles (Sourires sur les bancs du groupe socialiste) va poser une question. Mais il paraît que l'opposition d'hier, aujourd'hui majorité, avait pris l'habitude - n'étant pas sur les bancs de l'Assemblée à ce moment-là, je ne partage pas cette responsabilité (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République) - de masquer les questions.
M. Philippe Vasseur. Il faut être capable de répondre. Pour cela il faut connaître ses dossiers !
M. le Premier ministre. Cette façon de procéder présente un avantage et un inconvénient.
L'avantage, c'est qu'on peut espérer surprendre, encore que les membres du Gouvernement ont suffisamment d'expérience pour ne pas être surpris trop longtemps et pour se montrer capables de répondre au pied levé - les membres de ce Gouvernement en ont fait la preuve (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
L'inconvénient, c'est que lorsque vous posez des questions précises...
M. Philippe Vasseur. Vous devez avoir les réponses ! (Vives protestations sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le Premier ministre. Monsieur Vasseur ! Historiquement et professionnellement, vous avez été davantage en situation de poser des questions que d'apporter des réponses ! (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) Dans les postes de responsabilité que vous avez occupés ensuite, nous n'avons pas eu l'impression que les réponses que vous apportiez étaient totalement satisfaisantes ! En tout cas, elles ne vous ont pas empêché de vous retrouver sur les bancs de l'opposition. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)
Il est certain que si vous nous informiez davantage sur vos questions, vous auriez plus de chances d'avoir des réponses articulées.
M. Philippe Vasseur. On doit connaître les dossiers dont on parle !
M. le Premier ministre. Pour le reste, je voudrais rappeler une loi de la vie parlementaire: vous être libres de vos questions et nous sommes libres de nos réponses. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
Plusieurs députés du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance. Merci !
M. le Premier ministre. Le Gouvernement, par la voix de ses ministres, n'a nullement l'intention de se livrer à des exercices d'autocongratulation, mais je n'ai jamais constaté non plus dans la vie politique de mon pays ou de tout autre pays que les gouvernements passaient leur temps, en répondant aux questions, à se battre la coulpe.
M. Thierry Mariani. Vous n'étiez pas là quand nous étions au pouvoir !
M. le Premier ministre. Vous-mêmes, quand vous étiez au pouvoir, vous essayiez de défendre votre politique en fonction des convictions qui sont les vôtres, alors supportez que nous défendions la nôtre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
Cela dit, je pense que vous pourriez très utilement nous confier vos questions quand vous souhaitez des réponses particulièrement précises.
M. Olivier de Chazeaux. Du chantage !
M. le Premier ministre. Je prends l'engagement auprès de vous que si jamais nous devions nous trouver dans la position inverse d'avoir à vous questionner, je serais d'accord, pour ce qui me concerne, pour qu'on vous pose les questions à l'avance. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) A l'évidence, nous n'y sommes pas !
En attendant, je n'ai pas compris - mais peut-être n'ai-je pas été assez attentif - que, dans la question posée hier à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité - si elle est interrogée dans la suite de cette séance, elle pourra vous répondre de façon plus précise - le visa du contrôleur financier avait été évoqué. Il ne me semble pas que ce point figurait dans la question.
Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République. Ce n'était pas la question !
M. le Premier ministre. Merci, messieurs, de votre bonne foi qui vous amène à confirmer que ce n'était pas dans la question. Comment aurions-nous pu répondre sérieusement hier à une question que vous venez de poser aujourd'hui ? Il ne faut tout de même pas exagérer ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
J'avais en revanche bien compris hier que vous demandiez s'il y avait eu un appel d'offres, une mise en concurrence. La réponse de Mme la ministre a été claire, elle vous a dit: oui ! Elle a rappelé par ailleurs le coût bien plus élevé, surtout pour l'une, des deux campagnes de publicité lancées par le précédent gouvernement et je ne suis pas sûr qu'il soit souhaitable d'y revenir.
M. Jean-Michel Ferrand. Répondez !
M. le Premier ministre. Quant aux chiffres de la délinquance, ils seront publiés - je parle sous le contrôle du ministre de l'intérieur - à la fin de l'année, c'est-à-dire à leur date normale. Comment pourrait-il d'ailleurs en être autrement, compte tenu de notre conception de la vérité et de la transparence ? Si tel n'était pas le cas, vous ne manqueriez pas de nous le rappeler, j'espère de façon plus pertinente. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. le président. Sans prendre partie sur le fond du débat, j'observe qu'on peut répondre brillamment à une question impromptue ! (Sourires sur les bancs du groupe socialiste.)
M. le Premier ministre. Merci, monsieur le président !
Auteur : M. Didier Quentin
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Parlement
Ministère interrogé : Premier Ministre
Ministère répondant : Premier Ministre
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 8 octobre 1998