Question au Gouvernement n° 810 :
durée du travail

11e Législature

Question de : M. Hervé Gaymard
Savoie (2e circonscription) - Rassemblement pour la République

Question posée en séance, et publiée le 14 octobre 1998

M. le président. La parole est à M. Hervé Gaymard.
M. Hervé Gaymard. Madame la ministre de l'emploi et de la solidarité, lors du débat sur la réduction du temps de travail et au cours de la campagne de publicité dont nous parlions, vous nous avez dit que les 35 heures créeraient des emplois sans baisse des salaires.
Or, lors d'une interview parue dans la presse américaine, un de vos collègues du Gouvernement a déclaré ceci: «Les salariés devront accepter des restrictions salariales. Bien que le Premier ministre ait dit que les salaires ne doivent pas être baissés, il a dit aussi que les augmentations devraient être contrôlées. Un gel des salaires nominaux pour une période donnée et un gel des salaires réels pour une période plus longue sont des possibilités.»
Cet article, que je tiens à votre disposition, est long et argumenté. Il émane de M. Strauss-Kahn, ministre de l'économie (Exclamations et rires sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République)...
M. Hervé Gaymard. ... et se trouve dans la revue Leaders - volume 21, n° 3.
M. Jacques Myard. C'est de l'intox !
M. Hervé Gaymard. Première question, madame la ministre: êtes-vous d'accord avec ce que dit M. Strauss-Kahn sur les réductions salariales ?
Seconde question: ne pensez-vous pas que les restrictions salariales qu'entraîneront les 35 heures auront pour effet de diminuer la demande interne dans le contexte de crise internationale dans laquelle nous sommes, et que le Gouvernement ignore superbement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité. Monsieur le député, une fois de plus, je suisd'accord avec le ministre de l'économie et des finances. (Exclamations et rires sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) En effet, et si vous aviez suivi les débats longs, très longs, que nous avons eus sur la durée du travail, vous sauriez que j'ai toujours dit - c'est d'ailleurs écrit dans la brochure de cette magnifique campagne qui vous gêne décidément beaucoup -...
M. Arnaud Lepercq. Mais non !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. ... que la loi sur le passage aux 35 heures créera d'autant plus d'emplois qu'elle n'accroîtra pas le coût du travail et qu'elle permettra aux entreprises de gagner en compétitivité.
M. Hervé Gaymard. Et la baisse des salaires ?
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Un des moyens de le faire - et c'est ce que 90 % des 340 entreprises qui ont déjà signé des accords ont fait -, c'est de maintenir les salaires et de prévoir pour l'avenir une modération salariale.
Puis-je vous rappeler, monsieur le député, qu'en 1996 le pouvoir d'achat des salariés a baissé de 1,6 % à la suite des prélèvements opérés par le Gouvernement que vous souteniez ? (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
M. Philippe Auberger. C'est faux !
M. Bernard Accoyer. Répondez à la question !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Qu'en 1997, ce pouvoir d'achat n'a augmenté que de 1 %, qu'en 1998, il augmentera de 2,5 % malgré la réduction de la durée du travail et que, surtout, l'ensemble de la masse salariale distribuée - puisqu'aujourd'hui nous créons 8 % d'emplois dans les entreprises qui signent des accords - va s'accroître en France. Et nous savons bien que les chômeurs qui rentrent dans l'entreprise vont consommer, car ils en ont grand besoin.
Voilà les chiffres. Les Français apprécieront. Mais peut-être dois-je ajouter, parce que c'est intéressant, que la CFDT vient de publier une enquête menée auprès de 6 000 salariés dont la durée du travail a été abaissée à 35 heures.
M. Hervé Gaymard. Etes-vous d'accord avec M. Strauss-Kahn, oui ou non ?
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Selon cette enquête, 95 % des salariés concernés se sont déclarés très satisfaits.
L'Usine nouvelle, de son côté, a sorti ce matin un sondage qui montre que 18 % des entreprises sont déjà en train de négocier et que 20 % vont commencer à le faire dans les prochaines semaines.
M. Pierre Lellouche. Cela n'a rien à voir !
Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. Tout cela ne vous engage-t-il pas à éprouver plus d'optimisme pour la réduction de la durée du travail et pour l'emploi ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Données clés

Auteur : M. Hervé Gaymard

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Travail

Ministère interrogé : emploi et solidarité

Ministère répondant : emploi et solidarité

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 14 octobre 1998

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