football
Question de :
M. Gaëtan Gorce
Nièvre (2e circonscription) - Socialiste
Question posée en séance, et publiée le 21 octobre 1998
M. le président. La parole est à M. Gaëtan Gorce.
M. Gaëtan Gorce. Madame la ministre de la jeunesse et des sports, les déboires qui ont affecté certains événements sportifs, notamment au cours de l'été, ont conduit nos concitoyens à s'interroger de plus en plus sur les relations entre le sport et l'argent. En effet, le fossé risque de se creuser encore entre un sport amateur, marqué par le désintéressement et le bénévolat, et un sport professionnel qui semble gouverné de plus en plus par les lois de l'entreprise, de la rentabilité et de la performance à tout prix. De ce point de vue, la question du dopage ne peut évidemment pas être esquivée.
J'aimerais donc, madame la ministre, connaître votre sentiment sur deux questions.
D'abord, comment les recettes liées à la dernière Coupe du monde de football pourraient-elles être réorientées vers le sport amateur ?
Ensuite, le mouvement sportif s'est ému du projet de superligue dans laquelle certains grands clubs professionnels souhaitent se réunir pour éliminer des concurrents peut-être moins prestigieux et se partager les droits de retransmission. Quel est votre opinion sur ce sujet ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la jeunesse et des sports.
M. François Goulard. Vive le sport façon pays de l'Est !
Mme Marie-George Buffet, ministre de la jeunesse et des sports. Monsieur le député, oui, le risque existe - et pas à long terme ! - d'une rupture entre le sport amateur, accessible à tous et à toutes, et une partie du sport professionnel.
C'est un risque inhérent à la superligue qui tend, en fait, à organiser une «tournée spectacle» entre clubs choisis, non parce qu'ils ont gagné des championnats, mais parce que leur image est particulièrement rentable.
Un député du groupe socialiste. Très juste !
Mme la ministre de la jeunesse et des sports. La superligue, c'est la mise à mort des règles sportives. C'est un calendrier sportif alourdi, avec des risques de dérives comme le dopage. C'est la remise en cause des équipes nationales et des championnats nationaux.
Mais pour maintenir la cohésion du mouvement sportif, il ne suffit pas de s'opposer à la superligue. Il faut aussi chercher des solutions pour s'adapter aux mutations actuelles du sport. J'en vois deux principales.
D'abord, celle que vous avez évoquée: la redistribution de l'argent. Sachez que l'essentiel des droits de télévision de la Coupe du monde est allé à la Fédération internationale de football. Quant au comité français d'organisation, il a dégagé des bénéfices qui, comme l'avait souhaité le regretté Fernand Sastre, seront répartis entre les petits clubs. Nous avons maintenant l'accord de toutes les parties concernées. Reste à trouver la méthode, ce qui ne saurait tarder. On peut estimer, avant impôt, que ces bénéfices seront de 400 millions de francs environ. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
M. François Rochebloine. Très bien !
Mme la ministre de la jeunesse et des sports. Mais il faut aller plus loin. Les droits de télévision sur une année représentent pour le sport 1 250 millions de francs environ, somme qui peut être multipliée par trois, voire quatre, en comptant les bénéfices publicitaires engendrés par le passage à l'antenne.
Cet argent, malheureusement, reste concentré au «sommet» de la pratique sportive. Il faut le faire redescendre vers celle qui est ouverte à tous, c'est-à-dire vers les clubs associatifs. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
C'est pourquoi nous travaillons, dans la loi d'orientation sur le sport, à préparer des mesures visant à mutualiser cet argent et, par une tutelle plus stricte, à mieux le redistribuer.
M. Guy Drut. Je préconisais une CSG sportive !
Mme la ministre de la jeunesse et des sports. La deuxième solution pour maintenir la cohésion du mouvement sportif, et permettre que le développement de la pratique sportive dans notre pays se poursuive, consiste à améliorer la vie démocratique fédérale.
M. Robert Hue. En effet !
Mme le ministre de la jeunesse et des sports. Les bénévoles qui dirigent les clubs doivent pouvoir participer à un débat sur la gestion financière des fédérations et sur leurs projets sportifs.
A l'aube du XXIe siècle, on ne sauvera pas le mouvement sportif si on ne progresse pas sur ces deux mesures. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Auteur : M. Gaëtan Gorce
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Sports
Ministère interrogé : jeunesse et sports
Ministère répondant : jeunesse et sports
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 21 octobre 1998