Question au Gouvernement n° 945 :
secteur public

11e Législature

Question de : M. Maurice Leroy
Loir-et-Cher (3e circonscription) - Union pour la démocratie française-Alliance

Question posée en séance, et publiée le 25 novembre 1998

M. le président. La parole est à M. Maurice Leroy.
M. Maurice Leroy. Le projet de loi sur l'audiovisuel qui va nous être soumis, avec quel retard d'ailleurs, se trompe de siècle. Il vise en effet à réglementer la télévision des années soixante et ne prépare pas celle des années 2000.
M. Arnaud Montebourg. Et Carignon, c'était quoi ?
M. Maurice Leroy. Ce texte oublie l'aide aux créateurs...
Mme Odette Grzegrzulka. Vous ne l'avez pas lu !
M. Maurice Leroy. ... et à la production française. Il ne répond en rien à la seule question qui se pose: comment réglementer les nouvelles télévisions numériques ou par satellite ?
Devant ces manques reconnus sur tous les bancs de notre assemblée, et tout particulièrement sur les vôtres, mes chers collègues socialistes, vous avez demandé, monsieur le Premier ministre, à Mme Bredin de combler les carences de ce projet de loi. (Sourires sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Ainsi, les principales dispositions du texte de loi ne seront passées - c'est une première ! - ni devant le CSA, ni devant le Conseil d'Etat, ni devant le conseil des ministres, ce qui est encore formidable !
M. Arnaud Montebourg. Ni devant Carignon !
M. Maurice Leroy. La question que nous vous posons, monsieur le Premier ministre, est donc simple: ne vaudrait-il pas mieux prendre le temps de la concertation plutôt que de présenter un texte vide et passéiste ? Enfin, Mme Bredin serait-elle devenue le Premier ministre virtuel de la communication de la Ve République ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)
M. le président. La parole est à Mme la ministre de la culture et de la communication.
Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication. Vous pouvez toujours railler, monsieur le député, car M. Douste-Blazy, que je vois à vos côtés, n'avait quant à lui rien prévu, dans le projet de loi qu'il avait présenté au Sénat, pour donner les moyens à l'audiovisuel public d'affronter la révolution numérique et la compétition avec les chaînes privées. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Alors, je comprends votre dépit et vos railleries.
Mme Christine Boutin. C'est nul ! Double zéro !
Mme la ministre de la culture et de la communication. Certes, il faut tenir compte du fait que l'audiovisuel est pris dans un monde concurrentiel, mais nous n'acceptons pas pour autant la société de marché car, pour nous, les trois heures que passent les Français devant la télévision ont une fonction à la fois culturelle, de citoyenneté et de démocratie. Voilà pourquoi nous avons la conviction que le service public doit être pérennisé, conforté et renforcé. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)
Ensuite, les Français se sont prononcés pour un retour à la véritable nature du service public en commençant par faire en sorte qu'il ne soit plus dépendant des recettes commerciales, c'est-à-dire de la publicité (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.): 68 % des Français approuvent la réduction de la publicité et ils sont largement majoritaires à considérer qu'ils y gagneront en qualité de programmes. Je conçois que vous en ressentiez un certain dépit, mais il faut écouter la parole des Français !
Par ailleurs, c'est une question de volonté politique. Le Premier ministre s'est en effet engagé - c'est une première - à compenser la perte de recettes publicitaires par des crédits dégagés sur le budget de l'Etat. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Cela sera confirmé par le Gouvernement pendant nos débats à l'Assemblée.
Vous prétendez que le Gouvernement ne prévoit aucune mesure concernant les producteurs et tous les métiers liés à l'industrie de programmes en France. Si vous aviez bien entendu ce qu'a dit le Premier ministre et ce que j'ai dit moi-même, qui sera confirmé dès la semaine prochaine lors du débat en commission, vous auriez dû constater que ce que nous avons appelé l'effet d'aubaine, c'est-à-dire le transfert de recettes vers les chaînes privées, fera l'objet de mesures d'écrêtement et que celles-ci iront vers l'industrie des programmes et les producteurs. Cette réforme sera donc utile aux Français. Elle sera utile au service public et à l'industrie de programmes.
Enfin, au moment où le groupe français de télévisions publiques doit affronter la concurrence avec les chaînes privées, où il doit être à la hauteur de la BBC et des chaînes allemandes, il faut le doter d'une structure plus forte, lui donner les moyens d'intervenir dans les négociations de droit et d'assurer le développement technologique, notamment le passage à la télévision numérique.
Dans l'esprit de la résolution qui a été votée à l'unanimité, la semaine dernière, à l'initiative de la France, au Conseil des ministres européens de la culture et de la communication, nous considérons que le service publique audiovisuel est une nécessité en Europe et que les Etats sont compétents en matière d'organisation et de financement. La France, et nous en sommes fiers, sera le premier pays à doter son groupe de télévisions publiques de la force et de l'esprit de compétitivité nécessaires pour assurer sa pérennité. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur quelques bancs du groupe communiste.)

Données clés

Auteur : M. Maurice Leroy

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Audiovisuel et communication

Ministère interrogé : culture et communication

Ministère répondant : culture et communication

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 25 novembre 1998

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