regroupement familial
Question de :
M. Jean-Claude Guibal
Alpes-Maritimes (4e circonscription) - Rassemblement pour la République
Question posée en séance, et publiée le 23 octobre 1997
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Guibal.
M. Jean-Claude Guibal. Monsieur le Premier ministre, en 1982, le gouvernement de l'époque, qui était un gouvernement socialiste, avait régularisé la situation de 131 360 immigrés.
Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République. Scandaleux !
M. Jean-Claude Guibal. Neuf ans plus tard, en 1991, un autre gouvernement socialiste régularisait celle de 15 000 immigrés.
Quant à votre gouvernement, monsieur le Premier ministre, il a, dès son installation, décidé de récidiver en régularisant les immigrés vivant en situation irrégulière dans notre pays.
A la date du 1er octobre 1997, 120 000 demandes de régularisation ont été déposées. A ce rythme, on peut s'attendre à ce que, au 1er novembre, le nombre des demandes atteigne 150 000.
De ce fait, monsieur le Premier ministre, à l'issue de la procédure de régularisation, vous aurez très probablement régularisé environ 100 000 immigrés en situation irrégulière.
Ma question est simple: ces 100 000 régularisations ouvriront-elles droit au regroupement familial ?
Si tel était le cas, les Français ont le droit de le savoir. Monsieur le Premier ministre, vous avez le devoir de leur dire combien d'étrangers supplémentaires vont, grâce à vos régularisations, entrer dans notre pays et s'y installer. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.) Seront-ils 200 000, 300 000 ou plus nombreux encore ? (Mêmes mouvements.)
Monsieur le Premier ministre, vous devez nous dire la vérité. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'intérieur.
M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur. Monsieur le député, votre intervention illustre par excellence, si je puis dire, la mauvaise manière de poser la question. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur plusieurs bancs du groupe communiste. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)
M. Patrick Ollier. C'était une bonne question !
M. le ministre de l'intérieur. Le 24 juin dernier, le Gouvernement a publié, sous ma signature, une circulaire définissant les critères retenus pour la régularisation - ce sont ceux de la Commission nationale des droits de l'homme - afin de permettre le réexamen de la situation d'un certain nombre d'étrangers en situation irrégulière, et dont beaucoup se trouvaient à la fois irrégularisables et inexpulsables du fait de lois précédentes.
Plusieurs critères ont été pris en compte. Le critère essentiel est celui de la famille. M. Jean-Louis Debré avait d'ailleurs lui-même signé une circulaire allant dans le même sens et qui tendait à la régularisation d'un certain nombre de parents d'enfants français ou de conjoints de Français.
Par conséquent, en effet, un certain nombre de régularisations interviendront. Vous avez cité un chiffre. Je vous en laisse l'entière responsabilité, mais il n'a aucune vraisemblance. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.) Le Gouvernement n'a avancé aucun chiffre de cet ordre. La régularisation se fait sur la base de critères donnés. Actuellement, j'évalue à 10 000 le nombre des réexamens qui feront l'objet d'une décision favorable d'ici à la fin du mois.
Un député du groupe du Rassemblement pour la République. Menteur !
M. le ministre de l'intérieur. Il est donc tout à fait inutile d'essayer de réveiller les fantasmes malsains sur ce sujet. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)
Pour ceux qui bénéficieront d'une régularisation au titre du droit de vivre en famille, on peut penser que le problème du regroupement sera résolu par là même.
Pour les autres, considérez-vous que la situation des étudiants poursuivant leurs études ne mérite pas d'être réexaminée favorablement alors que le nombre des étudiants d'origine africaine qui étudient dans nos universités a diminué de 20 000 depuis quatre ans ? Les plus hautes autorités de l'Etat ont été alertées sur ce sujet.
Pensez-vous que l'on doit séparer une mère de ses enfants, un vieil homme de sa famille ? (Vives exclamations sur les bancs du groupe du rassemblement pour la République.) Tout cela est une question de bon sens.
N'êtes-vous pas soucieux du rayonnement de la France ? Voulez-vous empêcher des chercheurs étrangers de poursuivre leurs recherches en France ? Voulez-vous que nous nous repliions frileusement à l'intérieur de nos frontières, alors que la France accueille chaque année 85 millions d'étrangers. (Protestations sur les mêmes bancs.)
Je pense qu'il faut partir de quelques notions simples: le droit de vivre en famille, qui est formellement reconnu par la Convention des droits de l'homme et, tout simplement, l'intérêt national. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe Radical, Citoyen et Vert, et sur plusieurs bancs du groupe communiste. - Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française.)
Auteur : M. Jean-Claude Guibal
Type de question : Question au Gouvernement
Rubrique : Étrangers
Ministère interrogé : intérieur
Ministère répondant : intérieur
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 23 octobre 1997