conseillers prud'homaux
Question de :
M. Jean-Claude Lefort
Val-de-Marne (10e circonscription) - Député-e-s Communistes et Républicains
M. Jean-Claude Lefort attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les conséquences du projet de réforme de la justice prud'homale. Incluse dans le projet de loi sur le développement de la participation et de l'actionnariat salarié, cette réforme inscrit dans la loi des conclusions du rapport du procureur Desclaux invitant le ministère de la justice à modifier les textes encadrant l'activité prud'homale, notamment l'article L. 514-1 du code du travail qui traite des vacations des conseillers prud'homaux salariés. Ces vacations sont indemnisées majoritairement par les sommes reversées aux employeurs des conseillers prud'homaux du collège salariés, dans le cadre du maintien de salaire assuré aux élus pour l'exercice de leur mandat. Actuellement l'indemnité est fonction du temps consacré à l'activité prud'homale par le conseiller et sur la base d'une déclaration du conseiller lui-même. Or, le rapport Desclaux préconise la mise en place d'un système de forfait ayant pour but de limiter considérablement le temps consacré à leur activité par les conseillers salariés. Ces nouvelles contraintes sont totalement injustifiées et mettent, au fond, en cause la juridiction prud'homale alors que le nombre des affaires traitées liées au droit du travail augmente chaque année. Il lui demande de bien vouloir lui préciser les intentions du Gouvernement afin de dissiper au plus vite les très vives et légitimes inquiétudes des organisations syndicales de salariés.
Réponse publiée le 19 décembre 2006
Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que, pour le temps consacré à leur fonction, et pour les frais qu'ils exposent à l'occasion de leur exercice, les conseillers prud'hommes sont dédommagés. Cependant, le régime juridique de cette indemnisation repose sur des textes anciens, dont l'interprétation a conduit au fil des années à des pratiques hétérogènes sur l'ensemble du territoire. Dans le même temps, la réforme budgétaire issue de la loi organique du 1er août 2001, dite LOLF, oblige à définir le montant de la dépense annuelle de façon limitative et non plus évaluative. Dans le cas du fonctionnement de l'institution prud'homale, maîtriser la dépense consiste à assurer une juste indemnisation en contrepartie de la contribution apportée au service de la justice. Plusieurs missions ont abordé les difficultés soulevées par le régime actuellement applicable à l'indemnisation des conseillers prud'hommes. Ainsi, le procureur général honoraire Henri Desclaux a remis son rapport le 5 octobre 2005. Dans le prolongement de ce rapport qui a été bien accueilli par les organisations syndicales et qui écarte toute forfaitisation de l'indemnisation, un projet de loi et deux projets de décrets ont été rédigés. D'une part, ces projets conservent, s'agissant des conseillers prud'hommes du collège salarié, le mécanisme du maintien du salaire pour les fonctions juridictionnelles exercées pendant les heures de travail. D'autre part, s'agissant de l'indemnisation du temps de rédaction, le projet de réforme opte pour un système d'indemnisation reposant sur l'activité réelle des conseillers et exclut tout système forfaitaire. En effet, le projet de décret qui s'est appuyé sur le rapport précité pour déterminer les durées moyennes de rédaction des décisions rendues par les conseillers prud'hommes (trente minutes pour un procès-verbal, une heure pour une ordonnance et trois heures pour un jugement), prévoit que les durées mentionnées ci-dessus peuvent être dépassées lorsque la complexité du dossier, le nombre de parties à l'instance et la multiplicité des chefs de demande le justifient. De plus, compte tenu des observations formulées par les partenaires sociaux à l'occasion du Conseil supérieur de la prud'homie du 5 mai 2006, le caractère « exceptionnel » des dépassements a été supprimé. Si le dépassement n'est pas regardé comme exceptionnel, un encadrement est indispensable, sauf à ne pas résoudre les difficultés mises en évidence par le rapport Desclaux. À cet effet, le projet de décret privilégie la seule solution juridiquement incontestable qui est de confier la charge de cet encadrement à la formation de jugement elle-même plutôt qu'à une autorité extérieure. Ainsi, deux modes d'indemnisation se superposent : un mode déclaratif reposant sur le seul conseiller rédacteur ; un mode délibératif reposant sur la formation de jugement dès lors qu'un certain seuil de temps est dépassé. En outre, ces projets de textes accroissent le nombre d'activités indemnisables. C'est ainsi que les conseillers prud'hommes seront également indemnisés du temps d'étude nécessaire à l'examen d'une affaire. Ces temps sont cumulables. Enfin, les textes améliorent la prise en charge des frais de déplacement des conseillers prud'hommes pour l'exercice de leur mission. Il convient de souligner qu'avec cette réforme, comme annoncé au Conseil supérieur de la prud'homie du 13 octobre dernier, le taux des vacations versées pour indemniser les conseillers prud'hommes du collège « salarié » en dehors des heures de travail, les conseillers au chômage ou à la retraite et les conseillers prud'hommes du collège « employeur », sera augmenté de 15 %. Ainsi, l'indemnisation des conseillers prud'hommes dans l'exercice de leur fonction sera mieux assurée et constituera le juste reflet de leur activité pour le service public de la justice. À cet égard, l'étude d'impact menée sur un échantillon représentatif des conseils de prud'hommes confirme l'accroissement des dépenses budgétaires induit par la réforme. Ce nouveau dispositif, qui fait l'objet d'une large concertation, devrait être prochainement soumis au vote du Parlement dans le cadre d'un projet de disposition législative nouvelle dont l'entrée en vigueur sera subordonnée à celle des décrets d'application.
Auteur : M. Jean-Claude Lefort
Type de question : Question écrite
Rubrique : Justice
Ministère interrogé : justice
Ministère répondant : justice
Dates :
Question publiée le 10 octobre 2006
Réponse publiée le 19 décembre 2006