Question écrite n° 109564 :
environnement

12e Législature

Question de : M. Philippe Edmond-Mariette
Martinique (3e circonscription) - Députés n'appartenant à aucun groupe

M. Philippe Edmond-Mariette a pris acte de la présentation récente du volet outre-mer dans le cadre de la Stratégie nationale pour la biodiversité. Il souhaite cependant attirer l'attention de Mme la ministre de l'écologie et du développement durable sur l'impact des pesticides sur la biodiversité. En effet, un inventaire et une étude exhaustive de cet impact seraient souhaitables, notamment parce que dans les départements d'outre-mer où se situe 90 % de la biodiversité nationale, la rémanence de la molécule de pesticides organochlorés aux Antilles y est désormais confirmée « pour des siècles ». La Réunion, quant à elle, est touchée de plein fouet par le chikungunya. Dès lors, ces indices de dégradabilité des pesticides constituent des alertes, imposant au Gouvernement de se pencher en priorité sur les effets provoqués sur les insectes, végétaux ainsi que sur la faune et la flore. Il y a urgence à intervenir car la biodiversité ultramarine est menacée ; les spécialistes constatant par exemple que, chez certaines espèces sauvages, les pesticides ont une action endocrine et des effets sur le développement des organes sexuels, à tel point que la reproduction d'oiseaux et de mammifères marins est également altérée par la présence de ces organochlorés. Il souhaite connaître les mesures qu'il envisage de prendre sur cette épineuse question.

Réponse publiée le 17 avril 2007

La ministre de l'écologie et du développement durable a pris connaissance, avec intérêt, de la question relative à l'impact des pesticides sur la biodiversité ultra-marine. Les pollutions, dont celles dues aux pesticides répandus en milieu terrestre ou aquatique, sont l'une des causes reconnues de l'érosion de la biodiversité. La dissémination de pesticides dans le milieu naturel, quelle que soit leur origine, est d'autant plus problématique que certains d'entre eux peuvent avoir une durée de vie longue, voire très longue ; c'est le cas des polluants organiques persistants, parmi lesquels certains pesticides organochlorés. L'expertise scientifique collective réalisée en 2005 par l'INRA sur les pesticides a ainsi montré une contamination quasi généralisée des eaux souterraines et de surface par les pesticides, et une contamination de certains sols parfois sur des temps très longs. Les études menées montrent que les conséquences sur la biodiversité, si elles ne sont pas complètement connues, sont toutefois graves en particulier pour les insectes et les vertébrés sauvages. Les pesticides organochlorés sont maintenant interdits en France, certains depuis plusieurs dizaines d'années. En outre, pour lutter contre les impacts des pesticides en général, tant en métropole qu'outre-mer, plusieurs mesures sont à l'étude ou en cours de déploiement. En cohérence avec le plan d'action agriculture de la stratégie nationale pour la biodiversité porté par le ministère de l'agriculture et de la pêche, un plan interministériel de réduction des risques liés aux pesticides a ainsi été adopté le 28 juin 2006. Un de ses objectifs importants vise à réduire de moitié l'emploi des produits phytopharmaceutiques les plus dangereux. Pour ce faire, plusieurs objectifs sont fixés : d'une part, renforcer les critères d'évaluation des produits préalablement à leur mise sur le marché, et notamment limiter l'utilisation des produits contenant des substances cancérogènes, mutagènes et toxiques pour la reproduction. D'autre part, minimiser le recours aux pesticides en en promouvant un usage raisonné et en recherchant des pratiques alternatives. Dans le domaine de l'analyse des pesticides et de leurs effets sur la biodiversité enfin, l'Observatoire des résidus des pesticides a vocation à renforcer la connaissance sur la présence et l'impact des pesticides dans tous les compartiments de l'environnement, ce qui permettra de mieux quantifier les conséquences des pesticides sur la faune et la flore et d'apprécier sur cette base les priorités d'action. L'impact des pesticides sur notre biodiversité outre-mer, d'une grande richesse mais également d'une grande fragilité, est un enjeu particulièrement important. En Martinique, une mission d'expertise a établi que la situation était préoccupante du fait de la présence de pesticides, notamment organochlorés (chlordécone), qui étaient utilisés auparavant sur les bananes, dans les milieux aquatiques et terrestres ainsi que chez certaines espèces animales et végétales. Une carte de présence potentielle du chlordécone dans les sols a été réalisée afin de planifier les interventions prioritaires sur la qualité de l'eau et pour les milieux terrestres. Les analyses se poursuivent afin d'envisager les mesures les plus appropriées pour remédier à ses impacts. Les plans d'action locaux en faveur de la biodiversité élaborés dans le cadre de la stratégie nationale pour la biodiversité par chaque département, territoire et collectivité d'outre-mer pointent la maîtrise des pollutions dont celles dues aux pesticides comme l'un des enjeux majeurs pour enrayer la perte de biodiversité. Ils offrent un cadre spécifique, complémentaire du plan interministériel sur les pesticides, pour y répondre en planifiant des actions concrètes et ciblées : maîtrise des effluents pour la filière canne en Guadeloupe, mesures agro-environnementales adaptées à la Réunion par exemple. L'ensemble de ces mesures doit permettre de lutter plus efficacement contre la dissémination de pesticides dans les milieux, dont les milieux naturels, en particulier à l'outre-mer. Toutefois, des progrès restent encore à accomplir, non seulement afin de réduire l'impact des pesticides en particulier organochlorés, déjà présents dans le milieu, sur la biodiversité, mais aussi pour limiter l'impact d'autres sources de pollution, comme les pollutions d'origine minière ou les effluents liés à l'urbanisation, qui sont des défis importants pour l'outre-mer. L'intégration de la biodiversité et plus largement des préoccupations environnementales dans tous les secteurs d'activité est à cet égard essentielle.

Données clés

Auteur : M. Philippe Edmond-Mariette

Type de question : Question écrite

Rubrique : Outre-mer

Ministère interrogé : écologie

Ministère répondant : écologie

Dates :
Question publiée le 7 novembre 2006
Réponse publiée le 17 avril 2007

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