Question écrite n° 10966 :
procédure pénale

12e Législature

Question de : M. Yves Nicolin
Loire (5e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. Yves Nicolin appelle l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les dispositions de l'avant-projet de loi « d'adaptation des moyens de la justice aux évolutions de la criminalité » et l'adéquation des réformes envisagées avec la philosophie libérale qui inspire l'actuel Gouvernement. La chancellerie envisage d'étendre à de larges catégories d'infractions le régime d'exception réservé au terrorisme, au trafic de stupéfiants et au proxénétisme ; le régime de la garde à vue est profondément modifié, passant de 48 à 96 heures (soit 4 jours et 4 nuits) et la présence de l'avocat est renvoyé à la 36e heure. L'exception deviendrait alors la règle. Il est admis dans notre système de droit que l'accès à un conseil en matière pénale ne se divise pas, toute personne mise en garde à vue, quels que soient les soupçons pesant sur elle, devant pouvoir contacter un avocat dès le début de celle-ci. Il lui demande si ces modifications ne vont pas marquer un recul important des droits de la défense et suspicion déplacée à l'égard des auxiliaires de justice que sont les avocats. Par ailleurs, les autres mesures envisagées telles que la sonorisation et fixation d'images dans les lieux publics ou privés, l'extension des perquisitions en dehors des heures prévues ou l'allongement de la durée d'enquête de flagrance, accentuent les prérogatives du Parquet et des enquêteurs. Il lui demande si un contrôle réel et effectif est prévu à cet égard. Rappelant enfin que la procédure pénale, dans un Etat démocratique et libéral, est l'édifice des libertés car elle préserve l'équilibre entre l'accusation et la défense, qu'il doit y avoir égalité des armes entre le Parquet et la défense, que la rupture de cet équilibre fondamental est source d'arbitraire et d'erreurs judiciaires, il lui demande d'exposer les garanties dont disposeront les justiciables.

Réponse publiée le 14 juillet 2003

Le garde des sceaux, ministre de la justice, a l'honneur de faire connaître à l'honorable parlementaire que le texte définitif du projet de loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, actuellement en cours de discussion devant le Parlement, a fait l'objet de modifications significatives par rapport au texte de l'avant-projet, notamment en ce qui concerne les dispositions prévoyant une garde à vue de quatre jours pour les faits les plus graves de criminalité et de délinquance organisée. A la suite des différentes concertations organisées sur l'avant-projet, spécialement avec les organisations représentatives du barreau, le garde des sceaux a décidé de ne pas remettre en cause les textes actuels relatifs à l'intervention de l'avocat dès la première heure de la garde à vue. Ainsi, pour toutes les infractions pour lesquelles l'avocat intervient dès le début de ta garde à vue, s'il s'agit d'infractions relevant des nouvelles dispositions sur la criminalité ou la délinquance organisées susceptibles de donner lieu à une garde à vue de quatre jours, l'avocat pourra s'entretenir à quatre reprises avec la personne, à la première heure, puis à l'issue des 24e, 48e et 72e heures. Par ailleurs, ces concertations ont conduit le Gouvernement à compléter le projet par une disposition permettant aux avocats des personnes suspectées, dans certaines conditions, d'avoir accès au dossier de la procédure pénale dès la phase de l'enquête, notamment dans les procédures ayant donné lieu à une garde à vue de quatre jours. D'une manière générale, les dispositions du projet de loi garantissent ainsi un véritable équilibre entre les nouvelles possibilités d'investigations données aux enquêteurs, sous le strict contrôle des autorités judiciaire, et le respect des droits de la défense. Si la discussion parlementaire en cours est évidemment susceptible de modifier le texte du projet sur un certain nombre de points, le garde des sceaux s'opposera à toutes les modifications qui remettraient en cause cet équilibre. Ainsi, lors de l'examen du projet par l'Assemblée nationale au cours de mois de mai dernier, si les dispositions relatives à la garde à vue ont été en partie modifiées, la règle selon laquelle l'avocat intervient dès la première heure de la mesure dans les cas où cette intervention est actuellement prévue a été maintenue.

Données clés

Auteur : M. Yves Nicolin

Type de question : Question écrite

Rubrique : Droit pénal

Ministère interrogé : justice

Ministère répondant : justice

Dates :
Question publiée le 27 janvier 2003
Réponse publiée le 14 juillet 2003

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