Question écrite n° 110158 :
pesticides

12e Législature

Question de : M. Jean-Claude Bois
Pas-de-Calais (13e circonscription) - Socialiste

La moitié des cours d'eau et près d'un tiers des nappes souterraines françaises contrôlées en 2004 étaient gravement contaminées par des pesticides selon l'enquête de l'Institut français de l'environnement. Et après ce constat, que s'est-il passé ? Rien. La France détient toujours le record en tant que premier utilisateur de pesticides. En rivière, un pesticide est présent dans 96 % des 607 points de contrôle, en eau souterraine, 61 % des 910 points de contrôle révélaient la présence d'au moins un pesticide sur les 800 pesticides commercialisés en France. Ce constat est indécent. La France demeure la honte de l'Europe en matière de protection de l'environnement et de la biodiversité. Quant on parcourt le tableau de bord des activités du MEDD et le dossier de presse sur le projet de budget du ministère pour 2007, on ne peut être que consterné par le peu d'envergure des actions à entreprendre pour répondre à la directive européenne sur la réparation des dommages à l'environnement et celle de la directive cadre européenne sur l'eau qui préconise la protection écologique des milieux aquatiques. La Fédération nature environnement signale « que les pesticides ne tuent pas que les mauvaises herbes », en effet, cette très grave pollution ne représente pas qu'une menace pour notre environnement, puisque le rapport de 2002 du comité de prévention et de précaution réclamait déjà l'application du principe de précaution de manière à lutter immédiatement contre les risques, pour la santé humaine liés à l'utilisation de produits phytosanitaires de même que celui de la commission d'orientation du plan national santé environnement. De plus, l'OMS a, en juin 2006, présenté un rapport qui établit, un lien de cause à effet direct entre la mauvaise qualité de l'environnement et des eaux et plus de 80 % des principales maladies affectant l'homme. Pour aider les pouvoirs publics dans leurs choix stratégiques, des propositions ont été élaborées par l'INRA, le CEMACREF, des associations de protection de l'environnement en vue de la mise en oeuvre d'un plan interministériel de réduction des risques liés aux pesticides pour la période 2006-2009. Evidemment, le plan interministériel publié en juin ne correspond absolument pas aux espérances des acteurs soucieux de la préservation de notre capital eau, de la biodiversité française et bien entendu de la santé des citoyens. Ce plan, en plus de ne prévoir aucune restriction d'utilisation des pesticides par le monde agricole, n'est pas assimilé à des normes juridiques, l'utilisation des pesticides nocifs en tout point pour l'homme comme l'environnement perdurera et ce à l'avantage d'une poignée de personnes dont le but unique est toujours l'enrichissement. La directive européenne impose à chaque État, dont la France, de parvenir à un bon état biologique et chimique des eaux en 2015. Á lire les différents rapports, études et chiffres, ce challenge est irréalisable. M. Jean-Claude Bois demande, en conséquence, à Mme la ministre de l'écologie et du développement durable quand le Gouvernement va enfin entendre les inquiétudes des experts, des associations, d'une grande majorité de la population française et mettre un terme à l'utilisation trop souvent inutile de ces produits phytosanitaires qui représente une grande menace pour l'homme et la biodiversité.

Réponse publiée le 15 mai 2007

La ministre de l'écologie et du développement durable a pris connaissance, avec intérêt, de la question relative à l'utilisation des produits phytopharmaceutiques. Un plan interministériel de réduction des risques liés aux pesticides élaboré conjointement par les ministres en charge de l'écologie, de l'agriculture, de la santé, et de la répression des fraudes a été publié le 28 juin dernier, après une phase de consultation de l'ensemble des parties prenantes. Il a notamment pour objectif de réduire l'utilisation des pesticides et les risques qu'elle peut engendrer sur la santé, notamment celle des utilisateurs, ainsi que sur l'environnement et la biodiversité. Il définit une cinquantaine d'actions qui sont organisées en quatre axes complémentaires visant à agir sur les produits et sur les pratiques en améliorant leurs conditions de mise sur le marché, à minimiser le recours aux pesticides, à développer la formation des professionnels, à renforcer l'information et la protection des utilisateurs ainsi qu'à améliorer la connaissance et la transparence en matière d'impact sanitaire et environnemental. Les préoccupations des nombreuses associations de protection de la nature qui se sont exprimées au cours de la consultation organisée par les services ministériels ont été prises en compte, notamment à travers les actions suivantes : La loi sur l'eau et les milieux aquatiques du 30 décembre 2006 instaure une redevance qui sera perçue par les agences de l'eau dès 2008 sur ces produits en remplacement de l'actuelle taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) sur les produits antiparasitaires. Les taux plafonds adoptés conduisent à doubler quasiment le taux actuel de la TGAP pour les substances les plus dangereuses. Celui-ci passerait effectivement de 1,68 à 3 euros par kilo de substance active. Par ailleurs, le plan a pour objectif de réduire de 50 %, d'ici à fin 2009, les quantités de substances les plus toxiques pour l'homme et l'environnement, incluant notamment celles qui sont classées cancérogènes, mutagènes ou toxiques pour la reproduction. En ce qui concerne l'ensemble des pesticides, des réflexions sont en cours pour définir, à l'issue du plan 2006-2009, des objectifs chiffrés réalistes de réduction, par filière de production, en s'appuyant sur un indice de fréquence de traitement et en tenant compte des marges de progrès envisageables. L'élaboration d'un programme de travail pour y parvenir a été confiée par les ministres en chargé de l'agriculture et de l'écologie à l'lnstitut national de la recherche agronomique (lNRA) et au Centre national du machinisme agricole, du génie rural, des eaux et des forêts (CEMAGREF), dans le prolongement de l'expertise scientifique collective sur le thème des pesticides qu'ils ont conduite en 2005.Les pratiques et systèmes de production qui emploient moins de pesticides seront encouragés par l'acquisition et la diffusion de références techniques. Un programme de recherche sera développé, et des partenariats seront engagés avec les organismes de développement agricole, pour promouvoir des systèmes de production minimisant le recours aux pesticides. ll s'agit d'un travail qui s'inscrit dans la durée, compte tenu de la forte dépendance actuelle des systèmes de production français à l'utilisation des pesticides. Des incitations financières sont également prévues, notamment au titre du deuxième pilier de la politique agricole commune et des programmes d'intervention financière des agences de l'eau qui seront renforcés dans ce domaine, grâce au remplacement de l'actuelle taxe sur les activités polluantes par une redevance sur les pollutions liées aux pesticides dont les recettes annuelles sont estimées à 40 millions d'euros. Les exploitations ayant une part significative de production en agriculture biologique bénéficieront d'un crédit d'impôt. Des partenariats sont également envisagés pour réduire le recours aux pesticides dans les zones non agricoles (voies ferrées, jardins, routes, espaces verts, ...). L'arrêté du 12 septembre 2006 relatif à l'utilisation des produits phytopharmaceutiques permet aux préfets de prendre des mesures de restriction d'usage de ces produits dans les zones où la situation le justifie. Par ailleurs, l'article 21 de la loi sur l'eau permet aux préfets de définir des plans d'action pour lutter contre les pollutions diffuses dans les aires d'alimentation des captages d'eau potable, pouvant inclure des mesures de restriction d'usage des pesticides. De manière générale, un renforcement de la formation de l'ensemble des acteurs concernés (utilisateurs, distributeurs, prescripteurs, médecins en milieu rural), une plus grande transparence et une meilleure connaissance, s'agissant de la présence et de l'impact des pesticides dans l'environnement et les denrées alimentaires, permettront une sensibilisation accrue des acteurs concernés et de l'opinion publique, étape indispensable pour accompagner la réduction du recours à ces produits. A titre d'exemple, l'Observatoire des résidus de pesticides rassemblera et valorisera les informations sur la présence de ces produits dans l'environnement afin de caractériser l'exposition de la population et des écosystèmes et d'améliorer l'information du public avec l'ouverture d'un site internet (www.observatoire). Des études épidémiologiques permettront de mieux connaître l'impact des pesticides sur la santé des travailleurs. Pour évaluer les progrès accomplis, un comité de suivi de l'efficacité du plan, ouvert à la société civile, a été mis en place le 16 mars 2007. Il s'appuiera sur des indicateurs synthétiques de risque qui seront prochainement sélectionnés. L'évaluation sera facilitée par l'obligation de traçabilité des ventes de pesticides, prévue dans la loi sur l'eau et les milieux aquatiques.

Données clés

Auteur : M. Jean-Claude Bois

Type de question : Question écrite

Rubrique : Déchets, pollution et nuisances

Ministère interrogé : écologie

Ministère répondant : écologie

Dates :
Question publiée le 14 novembre 2006
Réponse publiée le 15 mai 2007

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