Question écrite n° 111344 :
incapables majeurs

12e Législature

Question de : M. Denis Jacquat
Moselle (2e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. Denis Jacquat attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les recommandations exprimées par le Conseil économique et social au sujet du projet de réforme des tutelles, dans son rapport intitulé « Réformer les tutelles ». Il est notamment recommandé de préciser ou de compléter certaines dispositions juridiques, en particulier en affirmant les droits des personnes protégées. À cet effet, et au-delà des dispositions du code civil, le rapport préconise l'adoption d'une charte des droits de la personne protégée, qui s'inspirerait de celles qui sont appliquées au sein de plusieurs associations. Il le remercie de bien vouloir lui faire connaître son avis sur ce sujet.

Réponse publiée le 17 avril 2007

Le garde des sceaux, ministre de la justice, fait connaître à l'honorable parlementaire que la loi du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs rénove l'ensemble du dispositif de protection des personnes vulnérables. Elle répond aux recommandations préconisées par le Conseil économique et social dans son rapport intitulé « Réformer les tutelles ». Ainsi, la loi consacre les principes de nécessité, de subsidiarité et de proportionnalité des mesures judiciaires de protection. En conséquence, le régime des tutelles et curatelles est recentré sur les personnes réellement atteintes d'une altération de leurs facultés personnelles. Une personne atteinte d'une altération de ses facultés mentales ou d'une altération corporelle de nature à entraver l'expression de la volonté pourra bénéficier d'une mesure de protection juridique. Cette altération devra être constatée par un médecin agréé qui rédigera un certificat circonstancié et précis, posant à la fois un diagnostic et un pronostic de l'affection de la personne concernée, puisque ce certificat devra permettre au juge de connaître à la fois l'altération mentale ou corporelle pour choisir la mesure la plus adaptée et l'évolution envisagée afin de fixer la durée de la mesure qui soit la plus adaptée à l'état de santé de la personne. Le médecin agréé pourra solliciter l'avis du médecin traitant de la personne à protéger. Par ailleurs, par décret seront précisés le contenu du certificat médical ainsi que les critères, notamment d'expérience et de formation particulière, qui justifieront l'inscription des médecins sur la liste des experts établie par le procureur de la République. Si la nécessité d'une protection est médicalement établie, elle ne sera prononcée que s'il ne peut être pourvu aux intérêts de la personne par d'autres dispositifs de protection moins restrictifs de droits, tels que ceux résultant du droit commun de la représentation, des règles relatives aux droits et devoirs respectifs des époux ou des régimes matrimoniaux. Si une mesure de protection judiciaire s'impose, elle devra être proportionnée et individualisée en fonction de l'altération des facultés. Dans cette optique, la réforme consacre la protection de la personne elle-même et non plus seulement celle de son patrimoine. Elle impose ainsi une meilleure prise en compte de la volonté de la personne à protéger et de ses droits. La loi dispose en outre que la protection s'effectue dans le respect des droits fondamentaux de la personne. Afin que soit vérifié régulièrement le respect de ces droits, la loi nouvelle prévoit que le juge devra fixer la durée de la mesure lors de son ouverture, et ce pour cinq ans maximum. L'exception prévue par la loi permettant au juge de prononcer une mesure pour une durée indéterminée est, d'une part, clairement et strictement circonscrite aux altérations insusceptibles de « connaître une amélioration selon les données acquises de la science » et, d'autre part, n'empêchera aucunement que le juge puisse être saisi d'une demande en révision de la mesure à tout moment, tant par la personne protégée que par ses proches. Cette exception ne remet donc pas en cause le principe général de limitation dans le temps de la mesure. La réforme donne une place plus importante dans le processus judiciaire à la famille et aux proches qui ont qualité pour saisir le juge d'une demande de protection d'un des leurs. Ils doivent être systématiquement entendus avant toute décision - même s'ils ne sont pas auteurs de la requête auprès du juge -, ils doivent être désignés en priorité comme curateur ou comme tuteur par le juge et celui-ci doit prendre en considération leurs recommandations lors du choix du curateur ou du tuteur. Par ailleurs, si le principe de confidentialité est expressément posé par le texte, un nouveau droit d'accès aux comptes de gestion par la famille et les proches est instauré sur autorisation du juge. Enfin, la réforme maintient dans le nouvel article 421 du code civil, le principe de la responsabilité des organes tutélaires en cas de « faute quelconque ». Elle ne procède donc pas à une extension de la responsabilité des organes tutélaires. Le maintien de l'actuel régime de responsabilité pour faute quelconque est justifié par la vulnérabilité des personnes protégées : celles-ci sont en effet moins à même de discerner et de s'opposer aux dysfonctionnements ou aux irrégularités causés par les organes tutélaires sous la protection desquels elles ont été placées. Il est donc nécessaire que la responsabilité de ces organes soit engagée pour n'importe quelle faute ayant entraîné un dommage. Néanmoins, la curatelle simple étant une mesure protégeant des personnes dont l'altération des facultés est moins importante, la réforme restreint le champ de la responsabilité des curateurs en prévoyant que celle-ci ne sera engagée qu'en cas de dol et de faute lourde.

Données clés

Auteur : M. Denis Jacquat

Type de question : Question écrite

Rubrique : Déchéances et incapacités

Ministère interrogé : justice

Ministère répondant : justice

Dates :
Question publiée le 28 novembre 2006
Réponse publiée le 17 avril 2007

partager