Question écrite n° 117725 :
conditions de vente

12e Législature

Question de : M. Alain Suguenot
Côte-d'Or (5e circonscription) - Union pour un Mouvement Populaire

M. Alain Suguenot appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur les dysfonctionnements constatés dans la distribution des crédits affectés. En effet, la qualification du contrat souscrit pour le financement d'un bien ou service déterminé auprès d'un intermédiaire de crédit (exemple l'abonnement à un club de sport) est essentielle pour le consommateur puisqu'elle conditionne la question de la suspension au non du contrat de crédit en cas d'interruption du contrat principal. L'arrêt rendu le 29 juin 2004 par la première chambre civile de la Cour de cassation a statué dans un sens très défavorable au consommateur, en poussant le formalisme à l'extrême. Cette décision affirme qu'une mention écrite dans l'offre de crédit de la prestation financée est indispensable pour créer un lien d'interdépendance entre le contrat de crédit et le contrat principal. Le formalisme institué à l'origine pour protéger le consommateur s'est retourné contre lui. Même si la jurisprudence est désormais plus favorable, il est indispensable d'apporter des précisions permettant de prescrire de manière définitive tout risque de contournement de la législation. Par ailleurs, lorsque le contrat principal est résolu ou annulé du fait de la cessation d'activité du vendeur ou du prestataire, le consommateur doit pouvoir bénéficier de garantie. Ce dernier doit ainsi avoir la possibilité de se voir garantir du remboursement du prêt par le vendeur. Par ailleurs, en cas de collusion frauduleuse, il doit pouvoir être libéré de ses obligations. Aussi il lui demande ce qu'il compte entreprendre en ce sens afin de protéger légitimement le consommateur.

Réponse publiée le 3 avril 2007

La législation française sur le crédit à la consommation comporte, depuis 1978, un dispositif spécifique de protection du consommateur lorsque celui-ci contracte un crédit destiné à financer un bien ou un service. Dès lors que l'offre préalable de crédit comporte la mention du bien ou du service à financer (obligation de l'article L. 311-2 du code de la consommation), il existe un lien juridique d'interdépendance entre le contrat principal de vente et le contrat de crédit, qui permet au consommateur : de résoudre le contrat de vente ou de prestation de service sans indemnités, dans un délai de 7 jours s'il exerce son droit de rétraction sur le contrat de crédit (art. L. 311-25 du code de la consommation) ; de conditionner ses obligations de remboursement du prêt à la livraison ou la fourniture du bien ou service et, en cas d'interruption de prestations à exécution successive, de faire cesser les paiements. (art. L. 311-20 du code de la consommation) ; de faire prononcer par le juge la suspension du contrat de crédit en cas de contestation sur l'exécution du contrat principal et d'obtenir la résolution ou l'annulation par le juge du contrat de crédit, si le contrat principal est lui-même annulé (article L. 311-21 du code de la consommation) ; de demander au juge la condamnation du vendeur à garantir le remboursement du prêt, si la résolution judiciaire ou l'annulation du contrat survient du fait du vendeur lui-même. Ces dispositions subordonnent le prêt à la vente et offrent au consommateur la possibilité d'agir sur le contrat de financement en cas de difficultés d'exécution du contrat principal. Ce dispositif de protection de l'acheteur-emprunteur est unique en Europe. Il est vrai que, jusqu'à présent, la Cour de cassation faisait une interprétation très formelle de la législation sur le crédit affecté, et notamment de l'article L. 311-20 du code de la consommation, en refusant de (re)qualifier en crédit affecté tout crédit dont l'offre ne mentionnait pas le bien ou le service à financer, quand bien même tous les éléments concouraient à considérer qu'il s'agissait de crédits destinés spécifiquement à financer un bien ou un service (arrêts des 26 septembre 1991, 17 février 1998 et 29 juin 2004). Cette application littérale de l'article L. 311-20 était critiquée notamment par certains juges du fond qui considéraient que cette interprétation permettait aux organismes de crédit de faire le choix, de manière unilatérale, de la forme de crédit sans tenir compte de l'attente légitime du consommateur et ainsi d'échapper à tout risque au cas où le contrat principal ne serait pas exécuté. Mais dans un arrêt récent, la Cour de cassation est revenue sur cette position, reconnaissant que des contrats de crédits renouvelables, souscrits pour financer des contrats d'abonnement à un club de sport, pouvaient effectivement être requalifiés en crédits affectés pouvant entraîner la cessation du paiement des mensualités, le club ayant fermé ses portes et les prestations n'étant plus rendues (Cass. civ. 7 février 2006). Dès lors que le formalisme du contrat n'est plus interprété de façon stricte, mais que l'économie générale du contrat est prise en compte pour en apprécier la qualification, il ne paraît plus opportun de modifier l'article L. 311-20, dont le formalisme est aussi destiné à mieux informer le consommateur. Au 3e trimestre 2006, une enquête a été réalisée par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) dans 28 départements auprès de 200 vendeurs et prestataires de service afin de vérifier les conditions dans lesquelles étaient octroyés les crédits affectés. Il a notamment été constaté que les prestataires de services à exécution successive, comme les responsables de clubs de sport ou d'agences matrimoniales, proposent des facilités de paiement échelonnées sur la durée de la prestation qui n'entrent plus dans le cadre de la législation sur le crédit. Il a par ailleurs été constaté que le crédit affecté est parfois délaissé par le consommateur lui-même, qui lui préfère un crédit personnel souscrit auprès de sa banque à un taux moindre. Le taux effectif moyen au dernier trimestre 2006 s'établissait en effet à 14,3 % pour le crédit affecté et à 6,33 % pour les crédits personnels.

Données clés

Auteur : M. Alain Suguenot

Type de question : Question écrite

Rubrique : Consommation

Ministère interrogé : économie

Ministère répondant : économie

Dates :
Question publiée le 6 février 2007
Réponse publiée le 3 avril 2007

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