Question écrite n° 12020 :
politiques communautaires

12e Législature

Question de : M. Kléber Mesquida
Hérault (5e circonscription) - Socialiste

M. Kléber Mesquida souhaite attirer l'attention de Mme la ministre de l'écologie et du développement durable sur la procédure de consultation des élus dans le cadre de l'établissement des dossiers « Natura 2000 ». Il semble en effet que parfois l'avis pourtant majoritairement défavorable des élus locaux ne soit pas pris en compte. Ce désaveu flagrant dénature la démarche cohérente de protection de l'environnement contenue à l'origine dans le projet « Natura 2000 ». Par exemple, sur le dossier en cours du site 1444 « Causse du Minervois », la concertation, repoussée par deux fois, faite en fin d'année 2001, a révélé un désaccord de la presque totalité des élus concernés avec un taux de 90 % d'avis défavorables. Ces réserves n'ont pas été retenues par le préfet de l'Hérault au motif qu'elles n'étaient pas motivées et qu'il fallait une cohésion régionale en continuité des projets de l'Aude. Une pétition a été signée en janvier 2002 par la quasi-majorité des élus (18) s'opposant à la transmission du dossier à la Commission européenne. Les principaux griefs retenus par les élus sont la rigidité excessive des textes quant à la liberté d'initiative laissée à l'intérieur des périmètres au regard de deux jurisprudences récemment rendues : l'arrêt de la Cour de justice européenne du 6 avril 2000 qui considère que... « tout plan au projet à l'intérieur des ZPS ne pourra se concrétiser que s'il est directement lié à la santé de l'homme ou à la sécurité publique » ; l'arrêt du 9 juillet 2001 du Conseil d'Etat qui annule un projet de replantation de vigne dans le Haut-Rhin. Aussi, lui demande-t-il de bien vouloir faire approfondir le processus de concertation quand une telle unanimité d'opposition se dégage sur des projets environnementaux.

Réponse publiée le 19 mai 2003

La ministre de l'écologie et du développement durable a pris connaissance, avec intérêt, de la question relative au projet de site Natura 2000 des Causses du Minervois, site qui lui a été proposé par le préfet de l'Hérault, malgré les avis défavorables émis par les communes consultées. Certains maires et propriétaires sont effectivement préoccupés par les conséquences de la désignation de sites Natura 2000 sur le développement économique local, même s'ils acceptent l'idée qu'une telle désignation pourrait contribuer à la préservation des richesses naturelles et à l'image de leur territoire communal. L'ambition du Gouvernement est d'inscrire Natura 2000 comme une politique de développement durable des territoires remarquables pour leur biodiversité garantissant, certes, la préservation de la faune, de la flore et des habitats naturels, mais permettant l'exercice d'activités économiques particulièrement indispensables au maintien des zones rurales et au développement équilibré des territoires. Le document qui définit les objectifs de gestion de chaque site permet aux acteurs locaux d'identifier et de choisir ensemble les règles d'encadrement et de soutien aux activités humaines pour la gestion de ces espaces à grande richesse patrimoniale. Si des incertitudes subsistent encore, il appartient aux acteurs locaux et aux membres des comités de pilotage de les discuter et de les lever en élaborant le document d'objectifs. Mais pour réussir la gestion des sites Natura 2000 et conserver les qualités qui les ont fait labelliser, les propriétaires et gestionnaires doivent être impliqués individuellement. Ils peuvent d'ores et déjà bénéficier des dispositions de l'ordonnance du 11 avril 2001 qui prévoit, par la signature de contrats Natura 2000 avec l'Etat, de leur accorder une aide appropriée en contrepartie des prestations ou des services rendus à la collectivité. La présente question fait référence à deux jurisprudences qui font craindre une rigidité excessive des textes quant à la liberté d'initiative laissée à l'intérieur des périmètres de sites : l'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE) du 6 avril 2000 et la décision du Conseil d'Etat du 9 juillet 2001. L'arrêt de la CJCE du 6 avril 2000 a effectivement condamné la France pour insuffisance de transposition de la directive Habitat du 21 mai 1992, en ce qui concerne son article 6 § 3 et 4 (évaluation de l'incidence des projets sur les sites Natura 2000). La France a, depuis cet arrêt, complété son dispositif de transposition par l'ordonnance du 11 avril 2001 et les décrets du 8 novembre et du 20 décembre 2001. Ces textes reprennent strictement en droit français les dispositions de l'article 6 paragraphe 4 de la directive Habitat en prévoyant qu'un projet soumis à autorisation, au titre des législations en vigueur, qui porte atteinte à l'état de conservation d'un site Natura 2000 de façon notable, ne peut être autorisé que si trois conditions sont remplies : absence de solution alternative, mesures compensatoires et raisons impératives d'intérêt public, qui ne sont toutefois pas limitées à la santé de l'homme ou la sécurité publique. Ainsi, il n'a pas été institué de régime d'autorisation spécifique aux sites Natura 2000, mais les autorités qui délivrent des autorisations dans le cadre de régimes en vigueur doivent tenir compte de l'incidence éventuelle des projets qui leur sont soumis sur les sites Natura 2000, de même qu'elles devaient déjà prendre en compte l'impact éventuel des projets sur des espèces de faune ou de flore protégées en droit français. La décision du Conseil d'Etat du 9 juillet 2001 est une ordonnance de référé qui suspendait l'application d'un arrêté du ministre chargé de l'agriculture autorisant des plantations de vignes dans une zone AOC en Alsace figurant dans un site Natura 2000 en projet. Le Conseil d'Etat a depuis statué au fond sur cette affaire, le 30 décembre 2002, en rejetant le recours en annulation présenté contre cet arrêté, reconnaissant ainsi qu'il n'y a pas d'antinomie a priori entre une activité telle que la viticulture et l'existence d'un projet de site Natura 2000. Les mesures nécessaires à la conservation de chaque site sont définies dans son document d'objectifs, en concertation avec tous les acteurs locaux concernés et en tenant compte des exigences économiques, sociales et culturelles ainsi que des particularités régionales et locales, comme le précise l'article L. 414-1 V du Code de l'environnement institué par l'ordonnance du 11 avril 2001. En ce qui concerne plus particulièrement le site des Causses du Minervois, il est essentiel que les collectivités et les acteurs de l'économie locale, tels que les viticulteurs, s'associent à la démarche de préparation du document d'objectifs du site qui sera lancée, afin que les intérêts économiques de cette zone soient justement pris en compte dans la définition des mesures de gestion du site.

Données clés

Auteur : M. Kléber Mesquida

Type de question : Question écrite

Rubrique : Environnement

Ministère interrogé : écologie

Ministère répondant : écologie

Dates :
Question publiée le 17 février 2003
Réponse publiée le 19 mai 2003

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